Accueil > Etats-Unis : la planche à billets va tourner à plein régime pour acheter (...)

Etats-Unis : la planche à billets va tourner à plein régime pour acheter des bons du Trésor américain ! !

Publie le jeudi 29 janvier 2009 par Open-Publishing

La Fed envisage des pistes inédites contre la crise.

Après avoir rendu "l’argent gratuit" en décembre 2008, en abaissant jusqu’à 0 % le niveau des taux d’intérêt américains, la Fed (la Réserve fédérale américaine) a annoncé, mercredi 28 janvier, de nouvelles mesures exceptionnelles pour stimuler le financement de l’économie.

La banque centrale américaine a notamment indiqué être "prête" à acheter des bons du Trésor, correspondant à des emprunts d’Etat d’échéance dix ans, vingt ans… vendus sur le marché. Il y a un mois, l’autorité monétaire avait déjà évoqué cette possibilité, signalant "qu’elle évaluait les effets positifs d’une telle action".

Aujourd’hui, "elle s’engage plus", remarque Elsa Dargent, économiste à New York chez Natixis. Le sujet a créé un vif débat au sein de la Fed. Jeffrey Lacker, président de la Réserve fédérale de Richmond, aurait ainsi préféré que la banque centrale adopte tout de suite cette mesure.

De fait, la Fed, n’ayant plus la possibilité de réduire les taux d’intérêt, doit déployer d’autres outils pour soulager une économie qu’elle juge "à risque". Elle a déjà fait le choix d’acheter des obligations d’entreprises à court terme et des titres hypothécaires. La Fed prévoit de consacrer jusqu’à 600 milliards de dollars (460milliards d’euros) pour l’achat de titres hypothécaires. Toutefois, acheter des bons du Trésor serait bien plus audacieux.

Dans le détail, cela signifie que l’"Etat" (via la Fed) rachète sa dette (émise par le Trésor). L’objectif serait notamment de faciliter le financement du "plan de relance et de réinvestissement américain" de 819 milliards de dollars, de Barack Obama, adopté mercredi par la Chambre des représentants.

En dépit de ce montant colossal, la Fed ne redoute pas que la dette publique ne trouve plus d’acheteurs. Les titres d’emprunt américains restent les plus demandés par les investisseurs. Mais la Réserve fédérale ne veut pas que leur prix dérape, que la "prime" réclamée, les taux d’intérêt ne s’envolent. Ils sont aujourd’hui historiquement bas, autour de 2,5 %.

En agissant ainsi, la Fed ne pense pas qu’aux pouvoirs publics. Le niveau des taux d’intérêts des obligations souveraines sert en effet de référence à tout le marché du crédit à long terme. En contribuant à les faire baisser, la Fed espère, par ricochet, réduire le coût du crédit aux entreprises, voire aux ménages.

Plus globalement, la Réserve fédérale lutte contre la menace de déflation, c’est-à-dire la baisse généralisée des prix et des salaires… en créant de l’inflation. Acheter des bons du Trésor revient à "faire marcher la planche à billets", ce qui contribue à gonfler le niveau de la masse monétaire, signale Jean-Louis Mourier chez Aurel BGC.

Mais la mesure n’est pas sans danger. Son résultat est incertain. La Banque du Japon a testé l’expérience pour sortir de la crise bancaire des années 1990, avec un succès mitigé. Et si, pour Thomas Philippon, professeur à l’université Stern de New York, "il serait plus dangereux de ne rien faire", la plupart des experts restent réservés.

"En mettant les taux à 0 %, la Fed a été au bout de l’exercice. Son rôle devrait s’arrêter là", estime notamment l’économiste Philippe Brossard. "Pour réduire plus efficacement le coût du crédit, il faudrait être plus radical, nationaliser les banques, estime-t-il. Mais les Etats-Unis, sans doute par idéologie, s’y refusent."

En usant de tels outils, la Fed démontre aussi que ses marges de manœuvre sont de plus en plus réduites. La Banque centrale européenne (BCE), avec des taux d’intérêt à 2 %, se veut plus prudente. Mercredi, au Forum économique de Davos, Jean-Claude Trichet, son président, a signalé que "des taux d’intérêts très très bas avaient des inconvénients que les gouverneurs tentent d’éviter".

http://www.lemonde.fr/la-crise-financiere/article/2009/01/29/la-fed-envisage-des-pistes-inedites-contre-la-crise_1147902_1101386.html