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Le massacre de Marzabotto

Publie le vendredi 25 avril 2003 par Open-Publishing

Italie : le massacre de Marzabotto sous la direction de Arrigo Petacco

Le massacre de Marzabotto, du 29 septembre 1944, fut l’étape
finale et tragique d’une « marche de la mort » qui avait
commencé dans la région de la Versilia.

L’armée alliée hésitait devant la Ligne Gothique et le maréchal
Albert Kesserling, pour se protéger du « cauchemar » des
partisans, avait ordonné une politique des « terres brûlées » derrière
lui.
Kesserling fut le commanditaire d’un massacre dont les dimensions
et la férocité ne furent jamais dépassés et qui prit symboliquement
le nom de Marzabotto, même si le nombre des villages touchés
fut bien plus important. L’exécuteur s’appelait Walter Reder.
C’était un major SS, surnommé « le manchot » parcequ’il avait
perdu l’avant-bras gauche à Charkov, sur le front de l’Est.
Kesserling l’avait choisi parcequ’il était considéré comme
un « spécialiste » en la matière.
Le 12 août, le « manchot », à la tête du 16ème Panzergrenadier « Reichsführer »commença
une marche qui le porterait de la Versilia à la Lunigiana
et à la région de Bologne, en laissant derrière lui une traînée
ensanglantée de trois mille corps torturés : hommes, femmes,
vieillards et enfants.
En Lunigiana, certains éléments des Brigades noires de Carrare
rejoignirent même les SS et c’est avec l’aide des collaborateurs
en chemise noire que Reder continua à semer la mort. Gragnola,
Monzone, Santa Lucia, Vinca : une succession de massacres
sans motif. Dans la région, il n’ y avait pas de partisans :
la sentence de condamnation de Reder le dira également : « Il
n’y avait pas de combattants. Dans les escarpements, aux
alentours du village, il n’y avait que de pauvres gens terrorisés… ».

Fin septembre, le « manchot » fit une pointe en Emilie, au
pied du mont Sole où se trouvait la brigade de partisans « Stella
Rossa ». Durant trois jours, à Marzabotto, Grizzana et Vado
di Monzuno, Reder effectua la plus terrible de ses représailles.
Dans la localité de Caviglia, les nazis firent irruption
dans l’église où Don Ubaldo Marchioni avait rassemblé les
fidèles pour réciter le rosaire. Ils furent tous exterminés à coups
de mitrailleuse et de grenades à main. Au lieu-dit Castellano,
une femme fut tuée avec ses sept enfants, à Tagliadazza,
ils fusillèrent onze femmes et huit jeunes enfants, à Caprara,
108 habitants furent raflés et tués, dont la famille entière
d’Antonio Tonelli (15 membres dont 10 enfants).
A Marzabotto, furent aussi détruits 800 appartements, une
usine de papeterie, une fabrique de riz, quinze routes, sept
ponts, onze cimetières, neuf églises et cinq chapelles. Et
pour finir, la mort cachée : avant de s’en aller, Reder fit
parsemer le territoire, de mines qui tueraient encore 55
personnes, jusqu’en 1966.
Les victimes de Marzabotto, Grizzano et Vado di Monzuno furent
en tout 1.830. Parmi les morts, 95 avaient moins de seize
ans, 110 avaient moins de 10 ans, 22 moins de deux ans, 8
avaient un an et 15 moins d’un an. Le plus jeune s’appelait
Walter Cardi : il n’avait que deux semaines.

Après la Libération, Reder qui était parvenu à rejoindre
la Bavière fut fait prisonnier par les Américains. Extradé en
Italie, il fut jugé par le Tribunal militaire de Bologne
en 1951 et condamné à la prison à vie. Après de nombreuses
années passées au pénitencier de Gaeta, il fut gracié, le
gouvernement autrichien ayant intercédé en sa faveur. Il
mourut quelques années plus tard, en Autriche, sans avoir
jamais été effleuré par l’ombre d’un remords.

(paru dans « il Resto del Carlino », le 12 avril 2002 )

Les survivants

A Marzabotto, les uniques survivants furent deux enfants,
Fernando Piretti âgé de huit ans et Paolo Rossi, âgé de six
et une femme, Antonietta Benni, jardinière d’enfants des
Ursulines. Durant 33 heures, elle fit semblant d’avoir été abattue,
elle aussi et quand elle put finalement se relever, elle
commenta, à voix haute : « Tous morts, ma mère, ma tante,
ma grand-mère Rosina, ma grand-mère Giovanna, mon petit frère… Tous
morts ».

Les collaborateurs italiens

A Marzabotto aussi, il y avait des SS qui parlait un italien
parfait : ils étaient Italiens.
Pour les faits de Marzabotto, il y eu aussi une suite en
terme de procés italiens. Avant la condamnation du major
Reder, en 1946, la cour d’assises de Brescia avait jugé Lorenzo
Minguardi et Giovanni Quadri, deux « repubblichini » ( le
premier responsable du « faisceau » de Marzabotto et de plus
commissaire préfectoral durant le carnage), pour collaboration,
homicide, incendie et dévastation. Minguardi eut la peine
de mort, transformée par la suite en détention à perpétuité.
Le second, une peine de trente ans, réduite par la suite à dix
ans et huit mois. Tous les deux furent amnistiés, l’un après
l’autre.

ANPI

Traduit par : Marie-Claude R.
24.04.2003
Collectif Bellaciao