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Le mouvement étudiant en Croatie pour un enseignement gratuit..

Publie le lundi 11 mai 2009 par Open-Publishing

Le mouvement étudiant en Croatie pour un enseignement gratuit..

(source : Le Courrier des Balkans 28/04/09)

Depuis plusieurs jours, les étudiants croates bloquent les universités du pays. Pacifiste, cette action bénéficie du soutien des syndicats et d’une majorité de la population. Si, par son ampleur, cette action ressemble au Printemps croate de 1971, les étudiants refusent toute comparaison avec leurs aînés. Un mouvement parti pour durer. 

Les étudiants ont occupé la faculté d’une manière presque religieuse. Pas une seule cigarette ou un verre d’alcool. Pas de chef ni de cris. Miroslav Tu ?man a été le seul à essayer de tromper les étudiants, mercredi, au troisième jour de la grève à la Faculté de philosophie de Zagreb.Miroslav Tu ?man, directeur du Département des théories de l’information et ancien chef des services secrets croates (1993-98) a réuni en cachette dans son bureau un groupe d’étudiants opposés à la grève et il a commencé son cours. Il était presque arrivé à la fin quand est entré le plus grand étudiant de l’université. Celui-ci a expliqué qu’il serait impossible de terminer ce cours à cause du bruit que les manifestants feront. Miroslav Tu ?man a rétorqué de son côté qu’il perturberait le mouvement. Surpris, le géant dalmate a demandé : « Comment pensez-vous le faire ? ».

« Notre action ne produira pas de nouveau Printemps croate [1]. Le nom de notre représentant n’a aucune importance, et il peut changer chaque jour », affirme un étudiant. Il est 22 heures passées. J’attends devant la porte de la salle 7 dans laquelle siège une assemblée générale depuis 20 heures. Plusieurs milliers de jeunes sont assis sur les bancs, beaucoup restent de côté, les débats sont en cours. Les porte-paroles, les négociateurs et les membres groupes de réflexion sont élus directement. Ils changent quotidiennement, les candidatures sont déposées personnellement et on attend le débat. Il n’y a pas de chefs ni d’ambitions.

Je discute à voix basse avec Andrea Zlatar, professeure de littérature comparative et candidate au poste de doyen : « une délégation de dix membres s’est rendue aujourd’hui au Conseil de l’université. Un jeune homme pris de trac s’est mis à lire leur première revendication. Il s’est arrêté et sa voisine a dû reprendre la lecture. Les étudiants envoient négocier des représentants lambdas, ceux qu’ils ont élus, au lieu des plus habiles ou des plus charismatiques. »

La génération d’aujourd’hui et celle des années 1970

Depuis que le Conseil des universités a décidé de soutenir les demandes des étudiants comme la suppression des frais d’inscription, il semble que les étudiants fassent preuve du plus grand sérieux dans leur action.

Ils ont analysé en détail chaque phrase, en silence et sans hâte. Une vingtaine de professeurs étaient présents, pour la plupart de jeunes enseignants d’histoire de l’art, de linguistique, d’histoire, de philosophie et de sociologie. Deux étudiants ont commencé à discuter de l’identité croate et de son utilisation dans l’argumentation étudiante. Chacun a donné son avis, sans querelle ni intervention intempestive.

Les étudiants du Printemps croate, qui pourraient être les grand-parents de ceux d’aujourd’hui, semblent appartenir à un autre temps. À l’époque, les couloirs auraient été plein de fumée et l’alcool aurait coulé à flot, les agents de la police secrète se seraient infiltrés tandis que les jongleurs auraient fait leur cinéma dans la cour de la fac. Aujourd’hui, le blocage se tient dans un calme presque religieux, sans tabac ni alcool.

Vers 23 heures l’A.G s’est terminée et les portes de l’université se sont fermées. Tous ceux qui le souhaitaient ont pu rester à l’intérieur. Ceux qui ont décidé de sortir ne pourront rentrer que le lendemain matin, pour le cours de yoga. Une cinquantaine d’étudiants, les plus engagés, sont restés passer leur troisième nuit dans les locaux.

Beaucoup d’étudiants sont restés regarder un film dans la salle 7, transformée en cinéma pour l’occasion. Ce soir, ils regardent The Man from Earth, de Richard Schenkman.

Ni gauche ni droite

Dans le club des étudiants, je discute avec un étudiant très éloquent qui tient les comptes des dons pour l’organisation des activités du lendemain. « Ici, on nous apprend à devenir critiques de la société et de l’État. C’est une des futures tâches qu’auront les étudiants en philosophie. Mais il est impossible de nous diviser en partisans de gauche ou de droite. Regardez, vous avez sur ce mur un immense Jésus, sans visage mais avec un coeur énorme. Dans l’iconographie médiévale, Jésus sans visage représentait le diable. Sur le mur d’en face, peint en rouge, vous voyez les visages de Friedrich Engels, de Karl Marx et de Lénine. On nous a accusé d’anti-cléricalisme, ce qui est faux. Ce serait une erreur de dire que nous avons bloqué la faculté. Ce n’est pas le cas, chacun peut entrer et sortir librement. Parler du libéralisme et s’opposer à la mondialisation ne signifie pas automatiquement appartenir aux mouvements communiste ou anarchiste, contrairement à ce qu’on veut faire croire ».

Soutien des médecins et de plusieurs syndicats

La coordination de la médecine familiale croate (KoHOM) a fait part de son soutien au mouvement étudiant. Cette organisation estime que tout le monde doit bénéficier d’un accès égal à l’éducation et à la santé. « Je soutiens leur droit à protester, c’est une action légitime. J’espère sincèrement que les étudiants parviendront à un accord avec le ministre de l’Éducation », a déclaré Darko Milinovi ?, ministre de la Santé.

Kre ?imir Sever, président des Syndicats indépendants de la Croatie (NHS) a également assuré les étudiants de son soutien. Dans son communiqué de presse, la Confédération des syndicats indépendants de la Croatie (SSSH) a, de son côté, rejoint les revendications des étudiants de l’Université de Zagreb et des autres universités croates.

Le président de l’Ordre des avocats de la Croatie, Leo Andreis, souscrit aux revendications mais s’oppose à la méthode employée. « Je n’ai rien contre les demandes des étudiants, mais je m’oppose à la manière dont ils les expriment », a estimé Leo Andreis.

Les étudiants de la Faculté de sciences politiques de Zagreb ont voté le blocage, mais ne se sont pas parvenus à se mettre d’accord sur un texte. Les étudiants d’Osijek ont rejoint leurs collègues de Zagreb, Rijeka et Zadar et ils ont bloqué les cours de philosophie et de l’IUFM. Les étudiants en droit et en économie les ont soutenus mais leur locaux ne sont pas bloqués. À Split, les étudiants ont également annoncé le blocage de la Faculté de philosophie.
 
Les étudiants ont rassemblé 37.000 signatures ,source :

http://balkanikum.vefblog.net/29.html#_154)

Zagreb – Split : La pétition de soutien aux étudiants qui mènent un blocage des facultés en réclamant un enseignement gratuit a pour l’instant été signée par 37.000 citoyens et, comme le signalent les étudiants, la liste des noms ne cesse de s’allonger de jour en jour.Les étudiants à la Faculté de philosophie de Zagreb voient des pressions émanant du Ministère de l’éducation derrière le fait que le Collège des recteurs et le Sénat de l’Université n’ont pas appuyé les demandes des étudiants mais demandent au contraire que cesse le blocage et que se poursuivent les cours.

Menaces des doyens

Ils n’ont pas le courage de se manifester en public et préfèrent manoeuvrer les universités afin qu’elles règlent elles-même le problème – a-t-il été dit lors de la conférence pour les journalistes tenue par l’Initiative estudiantine indépendante au travers de laquelle s’organisent les étudiants.

Entre temps, les étudiants ont décidé durant le week-end de se répartir en groupes de travail ; l’un des ateliers dénommé “Comment utiliser les médias de masse” est dirigé par l’activiste et journaliste Zoran O ?tri ?.

La dizaine d’étudiants avec lesquels nous avons discuté s’accorde sur un point : “Le moment où les personnes compétentes offriront une solide garantie que les demandes seront satisfaites, les cours reprendont leur cours normal”.

A plusieurs centaines de kilomètres de là, à Split, les étudiants ont voté dans la nuit de vendredi à samedi la poursuite du blocage des facultés occupées malgré que certains doyens aient menacé que les professeurs invités resteront sans salaire à cause de l’interruption des cours, quant aux étudiants ils resteront sans signature.

Marche estudiantine à Split

Qui plus est, soutenus par les étudiants de la Faculté de philosophie de Zagreb, les Splitois ont décidé que lundi à 9h00 ils entameraient une marche estudiantine sur le trajet des facultés bloquées.

Cet article a été publié à 03/05/2009 à 9:50

http://futurrouge.wordpress.com/2009/05/03/le-mouvement-etudiant-en-croatie-pour-un-enseignement-gratuit/

le blog international du mouvement etudiant croate (anglais allemand) :

http://www.slobodnifilozofski.bloger.hr/post/1st-press-release-in-english-and-german/1378531.aspx