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Etats-Unis : à Detroit, scènes de chaos dans les files d’attente de l’aide sociale.

Publie le jeudi 8 octobre 2009 par Open-Publishing
8 commentaires

La ville de Detroit avait annoncé la distribution de 5 000 formulaires de demande d’aides au logement. Mais ils ont été plusieurs dizaines de milliers à se presser sur les lieux, provoquant bousculades et altercations entre des chômeurs désespérés. Plusieurs personnes ont été blessées, piétinées par la foule. Les reporters du Detroit News témoignent de la violence de la crise sociale au cœur de l’Amérique.

de Charlie LeDuff, George Hunter et Santiago Esparza

Les milliers de personnes qui se sont pressées dans l’espoir d’obtenir les formulaires de demande d’aide fédérale pour les loyers et les factures de services publics ont transformé aujourd’hui les abords du Cobo Center [un centre d’exposition et de conférences - ndt] en une scène de chaos.

Les demandeurs étaient venus à pied, en fauteuil roulant, en vélo et en voiture. Environ six personnes ont quitté les lieux en ambulance. En raison de la tension et de l’énervement croissants, plusieurs personnes ont été piétinées, indique un infirmier présent sur les lieux.

Les habitants de Detroit tentaient de mettre la main sur les 5 000 formulaires de demande d’aide fédérale distribués par la ville. Detroit a reçu près de 15,2 millions de dollars de fonds fédéraux au titre des programmes de Prévention des Sans-abris et du Relogement Rapide, qui attribuent une aide financière temporaire et des logements aux personnes et aux familles sans-abri, ou qui le seraient en l’absence de ces aides.

Des membres des services médicaux d’urgence présents sur les lieux ont déclaré avoir traité des demandeurs qui ont été blessés lors de la ruée de la foule tentant d’obtenir ces formulaires.

Voilà ce qui arrive lorsqu’une ville remplie de gens ruinés reçoit un peu d’argent, déplore Walter Williams, 51 ans, qui avait commencé à faire la queue pour un formulaire avant le lever du jour.

« Ce matin, j’ai vu le rideau se lever sur le malheur », dit-il. « Des gens qui se battent en faisant la queue. Ils se menaçaient de se tirer dessus. Est-ce que nous en sommes arrivés là ? »

« Les gens ont désespérément besoin d’aide financière pour conserver leur logement, payer leurs factures, pour qu’ils puissent faire la soudure avant d’avoir retrouvé un emploi ».

Ce mercredi, à l’extérieur du Cobo Center, certaines personnes fendaient la foule pour arracher les formulaires des mains de ceux qui les avaient déjà obtenus. Les lieux résonnaient du vacarme constant des cris des personnes tentant de pénétrer à l’intérieur du Centre.
Latanya Williams, qui vit à Detroit depuis 32 ans, déclare avoir rapidement rempli son formulaire car « les gens les volent ».
« J’espère obtenir n’importe quelle aide qu’ils puissent me donner », dit-elle. « Tout le monde a besoin d’aide. »

En fin de matinée, les formulaires manquaient. Mais des escrocs ont eu l’idée de photocopier l’original et de vendre ces copies pour 20 dollars. Ils faisaient de bonnes affaires. Les désespérés sont des proies faciles. Les formulaires originaux de couleur blanche portaient une mention indiquant clairement : « Ne pas dupliquer - Vous devez utiliser le formulaire original. »

En fin de matinée, toutefois, les volontaires du Detroit Planning and Development Department distribuaient eux-mêmes des photocopies jaunes.

« Je ne suis même pas sûr que le gouvernement acceptera ces formulaires », s’interroge Pam Johnson, une bénévole. « C’est comme s’il fallait calmer les gens. Il y avait presque une émeute. Il a fallu faire appel à l’escouade de répression des gangs. J’ai vu une vieille dame presque piétinée à mort ».

Pour Jean Paul, qui vit à Detroit depuis 25 ans, cette foule et ce chaos montrent que les gens ont besoin d’aide.
« Nous en avons besoin », dit-il, en parlant d’argent. « Quoi qu’ils aient pour moi, cela sera bien ».

John Roach, le second adjoint de la police, considère que les 150 agents présents ont gardé le contrôle de la situation. « Il ya eu quelques bousculades, et certaines personnes ont perdu connaissance », précise-t-il. « Étant donné que nous avions là 15 000 personnes, je suis surpris que les choses se soient déroulées de façon aussi ordonnée. »

Il est difficile d’estimer la foule présente car toutes les files d’attente serpentaient à travers le centre de convention, à l’extérieur le long du bâtiment, et en bas de la rampe du parking. Un officier de police a estimé la foule à 50 000 personnes.

Plus de 25 000 formulaires avaient été retirés en moins de trois heures la veille dans les bureaux de quartier de la Mairie. Karen Dumas, la porte-parole du maire Dave Bing, explique que ce jour là certains ont cru à tort qu’ils recevraient des espèces sur place.
« C’est totalement faux », précise-t-elle. « Il y a un circuit administratif ».

L’affluence a été si importante que les fonctionnaires de police de Detroit et les responsables des pompiers ont envisagé d’arrêter la distribution en raison du trop grand nombre de personnes.

Nous avons rencontré Kelley Turcotte, qui est plongeur dans un restaurant, près de l’extrémité de la file d’attente vers 10h30. Agé de 27 ans, il vient d’avoir un fils et ne peut pas faire face à ses factures.
« J’espère que le gouvernement verra ce qui se passe, et comprendra que la ville a besoin de beaucoup plus d’aide que celle qui lui est donnée », déclare-t-il.

Luis Irizarry, 35 ans, est venu de Flint en voiture, espérant profiter de l’occasion d’obtenir une aide. C’est seulement ensuite qu’il a découvert que seuls les habitants de Detroit pouvaient en bénéficier. Pour lui, ce fut un choc de voir autant de gens dans le besoin.

Tony Johnson est venu à 5 heures du matin. M. Johnson n’a pas réussi à trouver d’emploi depuis trois ans.

« Si je pouvais gagner à la loterie, je ne serais pas ici », plaisante-t-il. Puis il poursuit : « il n’y a pas de tranquillité parce qu’il n’y a pas d’emplois. Tout le monde est à la recherche d’un extra, d’un coup de main. Ils ne me comptabilisent pas comme chômeur parce que je n’ai pas d’allocation. C’est comme si je n’existais même pas. Mais j’existe. Regardez autour de vous. Il y a des milliers de gens ... des millions de gens dans ce cas. »

Dan McNamara, qui dirige la section 344 des pompiers de Detroit, observe depuis sa fenêtre le Cobo Center.

« C’est tout à fait représentatif des difficultés de la classe moyenne en Amérique », juge-t-il. « Nous avons été trahis par le gouvernement, par les agents immobiliers et par ceux qui en ont profité. Le contrat a été rompu. »

The Detroit News, 7 octobre 2009.

http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2832

Messages

  • Non non , le peuple americain n’as pas ete trahi !!tant que l’argent rentrait et que les seuls écrasés etaient les autres , tout le monde fermait sa gueule devant ce systeme capitaliste mortifaire.Maintenant que ça touche plus de monde , évidemment , c’est beaucoup moins plaisant.Il se passera certainement les memes scenes de survie dans toutes nos vieilles démocratie et on ne peut pas dire que les peuples n’ont pas été prévenu mais ils se réfugient maintenant en majorité dans les bras de leurs prédateurs. C’est a désespérer de l’intelligence humaine !!!!

  • Les Etats-Unis c’est la France dans 10 ans. Des portiques détecteur d’armes dans les lycées et collèges, une assistance médicale de misère et des déficits à n’en plus finir.

    • Ce qu’on peut voir ici c’est le résultat de la disparition de la notion de classe. Et le niveau zéro de la conscience politique.

      Aux Etats-Unis depuis le MacCarthysme le Pc a été laminé, les organisations d’Extrème gauche manipulées par des agents de la NSA les Mouvement d’Emancipation noyautés par le FBI. Et la masse décervelée par une prese aux ordres.

      ICI même il y en a qui oeuvrent depuis des décennies pour nous amener au même niveau, et s’ils n’y sont pas arrivé tout à fait c’est parce que le Peuple Français et d’autres Peuples européens ont toute une histoire de lutte collective derrière eux. Luttes identitaires, politiques, de classe, et même religieuses. qui ont permis de relativiser les différences.

      Et ces personnes qui travaillent dans l’ombre chez nous elles sont aussi, et surtout dans les partis de Gauche qui tour à tour glissent vers un droitisme en remplacement de ceux qui les ont précédé pour rester dans la "légalité républicaine". Qui n’est que la version politique de la célèbre "conscience professionnelle " vis-à-vis du Patronat, dont ont sait ce que Karl Marx en pensait.

      Les USA n’ont pas vraiment de passé car ils ne sont qu’un peuple de colons sans histoire réelle, sinon une légende dorée forgée de toute pièce qui évacue le génocide amérindien et l’exploitation féroce des immigrants par une poignée de WASP même pas réellement descendants du "Mayflower".

      On ne peut pas avoir une conscience politique collective de classe quand son passé est basé sur le "Struggle for Life" et l’assassinat de tout ce qui bouge et vous gêne à l’horizon.

      Les Etats-Unis en sont au stade ultime de désagrégation en tant qu’entité cohérente politique et économique. Mais ça ne veut pas dire que ça sera rose pour ceux qui vont vivre la suite. Ce qu’ils vont avoir c’est simplement des états fascistes réels qui prendront la place de l’Etat fédéral fasciste de fait qui est maintenant bien ancré comme tel.

      Il reste que pour le Capital du coin ça ne sera pas très bon pour les dividendes car l’économie usaméricaine est bien trop engagée dans le système de la socialisation des pertes et de la privatisation des profits pour pouvoir surnager à ce genre de seïsme comme l’a pu faire l’économie postsoviétique.

      Sans compter que les autres pays "amis" ou "complices" sont entrain de chercher comment se débarrasser du "bâton merdeux". Et qu’à plus ou moins long terme ca ne peut finir qu’en guerre civile interne.

      Mais je regrette de le dire, c’est ce qui peut leur arriver de mieux. En reforgeant un inconscient collectif populaire à condition qu’il aient enfin trouvé la bonne cible vers qui tourner les fusils.

      G.L.

    • Je te trouve vachement pessimiste sur le peuple américain, tu oublie Thoreau, les grandes luttes sociales très violentes des années 60-70, plien d’autres trucs.

      La propagande officielle est très à droite, mais le peuple, ou en est-il vraiment ?

    • Le Peuple américain, hélas, pour ce que j’en sais, il est bien au fond du trou.

      Et ceci sans nier les grandes luttes de classe interne ainsi que les batailles pour les droits civiques.

      Mais faut-il te rappeler que le Peuple américain n’est en réalité pas un Peuple au sens stricto sensus ou nous le comprenons en Europe ?

      On a bien vu avec l’Ex-Yougoslavie ce qui arrive lorsque des entitités politiques sont basées sur la coercicion et l’artificialité. Dès que ça va mal ça se fissure.

      Et encore il y a dans ce cas l’existence d’une histoire commune du sol.

      Le peuple américain au départ il aurait du être le premier peuple socialiste du Monde. Il avait la Classe ouvrière et les dirigeants pour ça. Mais comment créer une société socialiste sur le vol des terres d’autrui, le génocide, et l’individualisme. Sans compter que la Constitution américaine prévoit dès le départ l’impossibilité de la disparition de la propriété privée et de la prédominance du travail sur le capital.

      Les USA ont été crées artificiellement comme une colonie anglo-saxonne blanche et puritaine et TOUT a été mis en place pour que ça reste comme ça. C’est l’Afrique du Sud, Israël, le Commonwealth, et l’AOF et l’AEF, tout à la fois. mais en même temps c’est une colonie ou les colons n’ont pas de pays d’origine de replis, ni même de référence.

      G.L.

  • y a que des noirs , wawwwww
    c’est comme en irak et en afghanistan ,y a beaucoup de noir au combat

    ce type d’info ne passe au au 20h sur fr2

  • j’espère que les médias qui parlent des américains et des gens de Detroit en particulier, nous montreront hormis les images de panique, également celles de l’action politique des collectifs des chômeurs, celles de la révendication d’un Revenu Garanti Inconditionnel, ou Allocation Universelle (http://fr.wikipedia.org/wiki/Allocation_universelle) par exemple.
    angela anaconda