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Censure aux Beaux-Arts !

Publie le jeudi 11 février 2010 par Open-Publishing
4 commentaires

Une artiste Chinoise censurée par les Beaux-Arts de Paris
Par Sophie Verney-Caillat | Rue89 | 11/02/2010 | 13H24

Quatre mots qui dérangent : travailler, gagner, plus, moins. L’installation de l’artiste chinoise Siu Lan Ko, dont le vernissage était programmé vendredi, a été démontée quelques heures après leur affichage sur la façade de l’École des Beaux- Arts, quai Malaquais. « Censure politique », dénonce l’artiste.

« Un week-end de sept jours », une exposition collective à la connotation délibérément utopique, devait présenter du 13 au 21 février des œuvres d’étudiants du Royal College of Art de Londres, et de Lasalle College of the Arts de Singapour.

Siu Lan Ko, qui connaît bien les Beaux-Arts de Paris pour y avoir passé deux ans en résidence, avait imaginé deux bannières réversibles de 7 mètres de haut sur 1,2 m de large, visibles depuis les quais de la Seine et incluant simplement quatre mots. Selon le chemin que l’on empruntait, on pouvait lire les mots ci-dessous. (Voir la photo)

photo travailler plus gagner moins

* Gagner Plus Travailler Moins
* Travailler Plus Gagner Moins
* Travailler Moins Gagner Moins
* Travailler Plus Gagner Plus
* Plus Gagner Plus Travailler
* Moins Gagner Plus Travailler
* Moins Travailler Moins Gagner
* Plus Travailler Plus Gagner
* Plus Gagner Moins Travailler
* Plus Travailler Moins Gagner

L’artiste explique avoir cherché à évoquer « à la fois la question du travail et de la propagande, dans un esprit universel » et s’être « bien sûr inspirée du slogan du candidat Sarkozy. »

Œuvre dérangeante vis-à-vis des ministères ?

Mercredi à 10h30, comme prévu, les bannières ont été montées sur la façade située à deux pas de l’actuelle résidence de Jacques Chirac, quai Voltaire. Mais dans l’après-midi, elles ont été retirées alors que l’artiste n’a été officiellement avertie que par un mail reçu dans la soirée de sa commissaire d’exposition, Clare Carolin, du Royal College of Art de Londres. « Le pire est que tout était calé depuis un an, le catalogue imprimé, ils n’ont pas découvert ça hier ».

D’après les informations que nous avons recueillies, la direction de l’école aurait jugé cette œuvre trop dérangeante et aurait argué qu’elle avait choqué certains membres du personnel de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts et du ministère de l’Éducation.

Le directeur aurait ajouté que la période était particulièrement sensible alors que l’école était en train de renouveler sa convention de financement avec les ministères.

À la commissaire d’exposition Clare Carolin, on a simplement proposé de rapatrier les bannières à l’intérieur de l’école, mais elle ne pouvait prendre une telle décision sans prévenir l’artiste. Elle n’a pas eu le temps de le faire puisque lorsqu’elle est sortie de la réunion, l’œuvre était déjà démontée.
« Le climat conservateur de la France de Sarkozy »

On imagine que pour une Chinoise, même élevée à Hong-Kong, une telle censure au pays des droits de l’homme soit à peine croyable. Siu Lan Ko :

« Je trouve dur de découvrir que cette forme de censure brutale puisse se produire en France. Il n’y a même pas de place pour la discussion, tout se passe dans mon dos et celui de la commissaire. Encore plus dur que cela se produise dans la plus ancienne école d’art française, où l’on est supposé encourager l’expression la plus libre des artistes.

Dur de croire encore que les enjeux économiques et politiques l’emportent sur toute autre préoccupation. Cela montre à mes yeux dans quel climat conservateur est tombée la France de Sarkozy, et à quel point celui-ci fait peur.

Je demande que mon travail soit remis sur la façade et que l’école donne une explication officielle à cette censure et s’excuse. Je réfléchis aussi à une éventuelle action judiciaire. »

Messages

  • Vous avez tout à fait raison c’est insupportable !
    D’autant plus qu’il n’y a rien de spécialement choquant dans ce travail, rien de brutal, rien de porno, rien d’injurieux, rien de scato ou autre.

    Dans le même temps, quelque part, c’est pas mal que cette censure tombe sur une artiste chinoise et sur une des plus anciennes école des beaux arts de France, question symbolique ça c’est plutôt réussi ;)

    Est-ce que cela circule à travers le réseau des école d’arts dans le pays ?
    Si ça n’est pas le cas, c’est à faire...
    Et pourquoi pas organiser un travail collectif à travers toute la France dans le même esprit ? Ça serait un bon pied de nez aux autorités et à l’administration, non ?!

    De plus vu le type de travail il est tout à fait envisageable de joindre les écoles d’architecture à ce type d’action. M’est avis que dans la plupart des établissements à travers le pays pas mal de monde sera enchanté de faire la nique à l’esprit sarkophile
    ^^

    Des fois ya des trucs comme ça qui peuvent enfler,
    qui partent d’un petit rien, comme une goutte en trop...

  • Le peuple a voulu du sako,... il va en bouffer !

  • Une fois de plus, lorsque de pareils cas apparaissent — c’est-à-dire le cas particulier d’une censure décidée par une institution (et non un procès intenté par une association lobbyiste) —, on ne se pose jamais les bonnes questions : Qu’est-ce que les artistes cherchent réellement à montrer (ou démontrer) avec ce type d’œuvre ? Quelles raisons objectives poussent les institutions à promouvoir ces travaux (même si ils finissent par être censurés) ? Quelle est la « pertinence » de l’œuvre incriminée.

    la suite ici : http://osskoor.wordpress.com/2010/02/15/censure-aux-beaux-arts-de-paris-les-questions-qui-fachent/