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Yann Moix, réhabilité, Antonin Artaud, viré, de Facebook…

Publie le lundi 15 février 2010 par Open-Publishing

de Andy Verol

Ce qui suit n’est pas un appel à l’insurrection, ni même un article dénonçant une pratique honteuse régie par les réseaux dits « sociaux  ». Il s’agit surtout de faire le point sur des outils de communication complètement cadenassés, verrouillés, tenus par de lamentables fourvoyeurs de la liberté d’expression.

Il y a quelques jours, le réalisateur et écrivain Yann Moix, un provocateur propre sur lui, un chroniqueur risible officiant pour l’immonde Figaro, s’insurgeait, vociférait dans la presse, indiquant que son compte Facebook avait été supprimé, suite à la diffusion d’un extrait de son prochain livre-démago, La Meute, où il mollardait sur un pays entier, un peuple, le montrant du doigt, globalisant et le balançant dans la fosse à purin antisémite.

 

Yann a de l’esprit, et Yann a de la colère. Yann voulait montrer qu’il était le plus fervent défenseur de Polanski, tentant de prouver que le réalisateur était assigné à résidence parce que les Helvètes n’étaient que d’immondes antisémites, et ce, bien entendu, depuis la Seconde Guerre mondiale… Yann, génie grand public et copain des péquenots rebelles du XVIe et autres Versailles, globalisait, à la manière d’un Joseph Arthur de Gobineau, inspirateur de la solution finale hitlérienne, tout un peuple, les Suisses qu’il avait classés dans ce texte bourrin et débile, dans le camp des tous-des-grands-méchants-antisémites… Cet extrait, d’abord relayé sur le site du calamiteux, mais non moins usurpateur philosophe BHL, portait dans son ventre plein de haine, le germe d’un buzz internet potentiel. Yann, parfois pas plus malin qu’un sosie de Cloclo, a donc diffusé ce morceau de livre, sachant que cela créerait un « scandale » contrôlé, décidé, engendrant un bordel médiatique favorisant la vente de ce sans-doute navet.

Bref, l’extrait était alors signalé par quelques corbeaux virtuels - choquée par la xénophobie flagrante qui se dégageait du texte - et illico, le compte de Yann Moix était suspendu, supprimé, désactivé. C’est alors que le buzz foiré a envoyé l’auteur dans les cordes. Lamentable, vexé, il s’est alors écrié qu’il était «  le premier écrivain au monde » à avoir connu la censure Facebook ! Eh ben voyons… Très vite, il est soutenu par ses potos de Canal +, ces pseudo-impertinents au service du vide, ainsi que quelques neuneus de la presse… Et un ministre de la Culture assourdissant. Légère secousse… inutile, puisque Facebook rétablissait son compte en début de semaine.

À titre personnel, j’ai été supprimé douze fois de Facebook de façon définitive depuis août 2008 (la 12e suppression étant survenue le 10 février 2010 en soirée), m’obligeant à recréer un compte à chaque fois. Et je ne suis pas le seul dans ce cas-là. Des dizaines, des centaines de scribouillards sont ainsi virés sans préavis de ce réseau dit « social ».

La raison de ces suppressions ? Les signalements anonymes d’utilisateurs de Facebook. Ce principe de dénonciation anonyme façon IIIe Reich, régime de Vichy, de Roumanie, de RDA, du Chili de Pinochet et lois sécuritaires pseudo-anti-terroristes est en fait un principe détaillé dans la charte d’adhésion au réseau Facebook selon les termes et la procédure qui suivent :

Que se passe-t-il lorsque je signale un utilisateur ?

Sur Facebook, tous les rapports d’abus sont confidentiels. L’utilisateur que vous signalez ignore que vous êtes à l’origine de cette action. Facebook examine ces rapports et détermine si le contenu incriminé doit ou non rester en ligne, conformément aux Conditions d’utilisation. Dans certains cas, la prise de mesures plus sévères s’impose. Par exemple, les utilisateurs qui enfreignent nos Conditions d’utilisation à plusieurs reprises peuvent se voir exclus définitivement du site.

Cependant, tous les contenus signalés ne sont pas forcément retirés. Un administrateur de Facebook examine chaque rapport afin de décider de la réponse appropriée. Lorsqu’aucune infraction de nos Conditions d’utilisation ne s’est produite, il n’y a pas lieu de prendre de mesure supplémentaire.

Tout est dit. Qui s’inscrit à ce réseau, s’expose au signalement. Yann Moix aurait dû le savoir, et surtout, plutôt que de rester assis sur son bidet en or, il aurait pu se renseigner et se soucier d’une réalité que bien plus d’écrivains et penseurs qu’il n’imagine ont subi depuis la création de Facebook, mais aussi de celle de toutes les plateformes de blogs, et réseaux sociaux de tous ordres.

Si l’on retire les mentions légales (interdiction des propos racistes, de l’apologie de la pédophilie, etc.), ces entreprises commerciales qui font des solitudes, des besoins de rencontre et de sexe de chaque être humain doté d’une connexion internet et d’un ordinateur, un fond de commerce très juteux, sont aussi des censeurs et des « contrôleurs  » de ce qui est artistiquement acceptable. On autorise l’exposition de photos festives et presque dénudées d’une adolescente, mais on interdit un texte qui emploie un style, qui dénonce, qui exprime.


Et c’est pour cette raison que je ne lâche jamais. Je continuerai à m’inscrire, à l’infini, fort maintenant de milliers de contacts (surpassant largement les quelques 3000 « amis » dont Moix se targue), je compte démontrer, et ce, de façon littéraire, que ces dits réseaux sociaux, ne sont que des plaques tournantes de la censure mutualisée, participative, engendrée volontairement par une vindicte d’abrutis citoyens. Je compte encore et encore sévir là où l’on donne la parole à la majorité acceptable et où l’on fait taire ceux qui veulent mettre le doigt sur une réalité inacceptable : les entreprises Facebook, Myspace, Blogspirit, Google, Twitter, et des dizaines d’autres ne sont que des réseaux de contrôle privés aux mains des puissants et leurs pauvres cruches de citoyens râleurs, mais soumis.

J’en viens à la pénible réalité de notre époque où la « pire saloperie » (comme dirait le vieil imposteur Séguéla) que l’homme ait inventée, Internet, sert de plateforme d’expérimentation pour un contrôle global de la population.

Car systématiquement mes comptes Facebook (12 au total), Myspace (avec près de 12 000 contacts provisoirement rayés de la carte), blogs (supprimés sans justification, mais sur la base de textes de fiction) ont été effacés de la carte internet sur dénonciations, ou le contrôle débilitant de modérateurs, sur des textes purement littéraires, d’expression libre, insoumise et défiant la merde établie qu’ils appellent l’ordre…

Si certains auteurs gigantesques tels que Lautréamont, Sade ou Artaud avaient vécu ici, maintenant, auraient-ils bénéficié d’un meilleur sort ? Non… Ils auraient été virés de la même manière, aussi abruptement par des crétins payés à lisser le monde pour le compte de puissants gavés jusqu’au dégueulis, de fric, d’arrogance et de pouvoir. Et peut-être plus vite encore. Pour adhérer au moule et être certain de s’y couler, il faut du conformisme.

Pour exemple je citerai deux extraits qui auraient provoqué une suppression de compte par les neuneus modérateurs de Facebook. Le premier est un texte d’Antonin Artaud qui chiait sur la bienséance bourgeoise des commandeurs des réseaux dits « sociaux » de l’époque (à vous de découvrir les équivalents Facebook d’une époque pré-internet) et le second est celui d’une femme, du 17/18ème siècle, et qui chia courageusement sur le monde, ses puissants et tous leurs sbires, Charlotte-Elisabeth de Bavière (1652 – 1722).

Andy Verol
Site personnel
Profil Facebook (tant qu’il existe...)



À la recherche de la fécalité d’Antonin Artaud, 1948

(Source Le silence qui parle)


Là où ça sent la merde
ça sent l’être.
L’homme aurait très bien pu ne pas chier,
ne pas ouvrir la poche anale,
mais il a choisi de chier
comme il aurait choisi de vivre

au lieu de consentir à vivre mort.

C’est que pour ne pas faire caca,
il lui aurait fallu consentir
à ne pas être,
mais il n’a pas pu se résoudre à perdre
l’être,
c’est-à-dire à mourir vivant.

Il y a dans l’être

quelque chose de particulièrement tentant pour l’homme
et ce quelque chose est justement
LE CACA.
(Ici rugissements.)

Pour exister, il suffit de se laisser aller à être,
mais pour vivre,
il faut être quelqu’un,
pour être quelqu’un,

il faut avoir un os,
ne pas avoir peur de montrer l’os,
et de perdre la viande en passant.

L’homme a toujours mieux aimé la viande
que la terre des os.
C’est qu’il n’y avait que de la terre et du bois d’os,
et il lui a fallu gagner sa viande,
il n’y avait que du fer et du feu

et pas de merde,
et l’homme a eu peur de perdre la merde
ou plutôt il a désiré la merde
et, pour cela, sacrifié le sang.

Pour avoir de la merde,
c’est-à-dire de la viande,
là où il n’y avait que du sang
et de la ferraille d’ossements

et où il n’y avait pas à gagner d’être,
mais où il n’y avait qu’à perdre la vie.

o reche modo
to edire
di za
tau dari
do padera coco

Là, l’homme s’est retiré et il a fui.

Alors, les bêtes l’ont mangé.

Ce ne fut pas un viol,
il s’est prêté à l’obscène repas.

Il y a trouvé du goût,
il a appris lui-même
à faire la bête
et à manger le rat

délicatement.

Et d’où vient cette abjection de saleté ?

De ce que le monde n’est pas encore constitué,
ou de ce que l’homme n’a qu’une petite idée du monde
et qu’il veut éternellement la garder ?

Cela vient de ce que l’homme,
un beau jour,

a arrêté
l’idée du monde.

Deux routes s’offraient à lui :
celle de l’infini dehors,
celle de l’infini dedans.

Et il a choisi l’infime dedans.
Là où il n’y a qu’à presser
le rat,

la langue,
l’anus
ou le gland.

Et dieu, dieu lui-même a pressé le mouvement.

Dieu est-il un être ?
S’il en est un c’est de la merde.
S’il n’en est pas un
il n’est pas.

Or il n’est pas,

mais comme le vide qui avance avec toutes ses formes,
dont la représentation la plus parfaite
est la marche incalculable d’un groupe de morpions.

“Vous êtes fou, monsieur Artaud, et la messe ?”

Je renie le baptême et la messe.
Il n’y a pas d’acte humain

qui, sur le plan érotique interne,
soit plus pernicieux que la descente du soi-disant Jésus-Christ
sur les autels.

On ne me croira pas
et je vois d’ici les haussements d’épaules du public
mais le nommé christ n’est autre que celui
qui en face du morpion dieu
a consenti à vivre sans corps,

lors qu’une armée d’hommes
descendue d’une croix,
où dieu croyait l’avoir depuis longtemps clouée,
s’est révoltée,
et, bardée de fer,
de sang,
de feu, et d’ossements,
avance, invectivant l’Invisible
afin d’y finir le JUGEMENT DE DIEU.


Lettre scatologique de Elisabeth-Charlotte de Bavière :

(Source Frères Goncourt)


De Fontainebleau, le 9 d’octobre 1694


VOUS ÊTES BIEN HEUREUSE d’aller chier quand vous voulez ; chiez donc tout votre chien de soûl. Nous n’en sommes pas de même ici, où je suis obligée de garder mon étron pour le soir ; il n’y a point de frottoir aux maisons du côté de la forêt. J’ai le malheur d’en habiter une, et par conséquent le chagrin d’aller chier dehors, ce qui me fâche, parce que j’aime chier à mon aise, et je ne chie pas à mon aise quand mon cul ne porte sur rien. Item, tout le monde nous voit chier ; il y passe des hommes, des femmes, des filles, des garçons, des abbés et des Suisses. Vous voyez par là que nul plaisir sans peine, et que, si on ne chiait point, je serais à Fontainebleau comme le poisson dans l’eau.

IL EST TRÈS CHAGRINANT que mes plaisirs soient traversés par des étrons. Je voudrais que celui qui a le premier inventé de chier ne pût chier, lui et toute sa race, qu’à coups de bâton ! Comment, mordi !, qu’il faille qu’on ne puisse vivre sans chier ? Soyez à table avec la meilleure compagnie du monde ; qu’il vous prenne envie de chier, il faut aller chier. Soyez avec une jolie fille ou femme qui vous plaise ; qu’il vous prenne envie de chier, il faut aller chier ou crever. Ah ! maudit chier ! Je ne sache point de plus vilaine chose que de chier. Voyez passer une jolie personne, bien mignonne, bien propre ; vous vous récriez : « Ah ! que cela serait joli si cela ne chiait pas ! »

JE LE PARDONNE à des crocheteurs, à des soldats aux gardes, à des porteurs de chaise et à des gens de ce calibre-là. Mais les empereurs chient, les impératrices chient, les rois chient, les reines chient, le pape chie, les cardinaux chient, les princes chient, les archevêques et les évêques chient, les généraux d’ordre chient, les curés et les vicaires chient. Avouez donc que le monde est rempli de vilaines gens ! Car enfin, on chie en l’air, on chie sur la terre, on chie dans la mer. Tout l’univers est rempli de chieurs, et les rues de Fontainebleau de merde, principalement de la merde de Suisse, car ils font des étrons gros comme vous, Madame.


SI VOUS CROYEZ BAISER une belle petite bouche avec des dents bien blanches, vous baisez un moulin à merde. Tous les mets les plus délicieux, les biscuits, les pâtés, les tourtes, les farcis, les jambons, les perdrix, les faisans, etc., le tout n’est que pour faire de la merde mâchée, etc.

http://www.actualitte.com/dossiers/804-facebook-Yann-Moix-Antonin-Artaud.htm#f