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Claude Guéant : au service de la Scientologie ?

Publie le dimanche 21 février 2010 par Open-Publishing
9 commentaires

par Antoine et François

Arnaud Palisson, ancien lieutenant des Renseignements Généraux, était chargé de la surveillance des sectes. Déplacé par Claude Guéant (désormais n°2 de l’Elysée) et Nicolas Sarkozy (aujourd’hui n°1), il s’est exilé au Canada. Fakir – et Là-bas Si J’y Suis – l’ont retrouvé pour vous…

Le journal Fakir est un journal papier, en vente chez tous les bons kiosquiers ou sur abonnement. Il ne peut réaliser des enquêtes, des reportages, que parce qu’il est acheté.

Arnaud Palisson : J’ai commencé à travailler sur les sectes en 1995, quand je suis arrivé à la direction des Renseignements Généraux de la préfecture de police. Puis j’ai été muté à la direction centrale des renseignements généraux au Ministère de l’Intérieur en 1998.
J’ai commencé dans la foulée avec une thèse, un doctorat sur la scientologie.

Fakir : Quel travail avez-vous effectué durant ces années ?

A.P. : J’étais analyste et aussi agent de renseignements. J’allais récupérer de l’information par une gestion des sources humaines.
Pendant ces premières années, suite aux rapports parlementaires de 1995, il y a eu quand même un électrochoc dans la communauté politique et une certaine volonté d’agir sur le phénomène sectaire. En revanche, avec le changement de couleur du gouvernement, en 2002, on a clairement viré casaque.

« Les avocats de la Scientologie réclamaient ma tête »

Fakir : Avec la réélection de Jacques Chirac comme président de le République et l’arrivée de Nicolas Sarkozy comme ministre de l’Intérieur, il y a eu un changement d’ambiance vis-à-vis de la section des RG qui se chargeait des dérives sectaires ?

A.P. : Bien sûr. Mais il a fallu attendre un peu pour qu’on s’aperçoive qu’une optique très neutre se mette en place de la part du gouvernement.

Fakir : Vous dites « neutre », c’est-à-dire que vous n’êtes plus ni pour ni contre les sectes ?

A.P. : Officiellement, on est ni pour ni contre. Mais officieusement, on s’aperçoit quand même qu’on tape plutôt sur ceux qui sont contre.

Fakir : Et c’était qui ? Qui s’est fait taper à ce moment là ?

A.P. : Bah, écoutez… Moi, je me suis fait un peu taper dessus avec la publication de ma thèse et de mon livre.

Fakir : Pourtant votre thèse a eu une excellente note…

A.P. : J’ai eu une mention très favorable avec les félicitations du jury. Je l’ai publiée ensuite en intégralité sur Internet, ce qui n’a pas plu du tout. Le cabinet du ministre de l’Intérieur a reçu des appels des avocats de la scientologie, qui ont demandé à ce que je la retire du net sous peine d’être viré du groupe Cultes et Sectes.

« Vous enlevez votre thèse, ou vous déguerpissez »

Fakir : Et donc vous avez ôtée votre thèse d’Internet ?

A.G. : Je ne l‘ai pas enlevée, je l’ai laissée et donc j’ai été mis dans un autre groupe.

Fakir : On vous a viré de la section lutte contre les dérives sectaires des Renseignements Généraux ?

A.P. : Oui.

Fakir : Comment votre éviction s’est-elle déroulée ?

A.P. : La personne qui a géré le dossier concernant mon éviction du groupe « Cultes et Sectes » était Claude Guéant, directeur de cabinet du ministre de l’Intérieur à l’époque. Il a reçu des coups de téléphone des avocats de la Scientologie, qui demandaient ma tête. Je n’ai jamais été consulté et, aux alentours de mars-avril 2003, on m’a dit : vous enlevez votre thèse ou vous déguerpissez.

Fakir : Et on vous a pas caché que c’était les avocats de la scientologie qui avaient fait pression ?

A.P. : Non non, on me l’a dit.

« Sarkozy, c’est l’Américain. Il ne veut rien faire pour leur déplaire. »

Fakir : Quand vous voyez, quelques mois plus tard, Nicolas Sarkozy dire qu’il « n’arrive pas à se faire une idée très précise du statut de l’Église de la scientologie ». Ou encore dans son livre La République, les religions, l’espérance se déclarer « favorable à la reconnaissance des nouveaux mouvements spirituels », ou encore la réception de Tom Cruise au ministère de l’Économie : ça vous inspire quoi ?

A.P. : Sarkozy, c’est l’Américain, il ne veut rien faire pour déplaire aux Etats-Unis. Leur approche en terme de secte est radicalement différente de la nôtre. Le Département d’État américain a rendu des rapports dans lesquels il soulignait « le climat de persécutions » de la France à l’encontre des nouveaux mouvements religieux. Cela faisait partie des choses qui fâchaient et il a décidé de lever le pied sur ce sujet.

Elysée : un silence à 7,5 millions d’euros

Afin d’obtenir le point de vue de Claude Guéant, Fakir – et Là-bas Si J’y Suis – ont appelé l’Elysée, rappelé, re-rappelé, envoyé un courriel, renvoyé un autre courriel, rere-rappelé. Jusqu’à ce mur du silence :

Une chargée de com’ : Bureau de Franck Louvrier, bonjour.

Fakir : Oui, bonjour, excusez moi de vous déranger, cela fait plusieurs fois que je vous appelle pour avoir des informations sur Claude Guéant, Nicolas Sarkozy et la Scientologie.

La chargée de com’ : Oui, j’ai lu votre mail.

Fakir : Je voulais savoir si il y avait une réponse ou non car ça fait environ un mois que j’attends…

La chargée de com’ : Attendez, je me renseigne… Non, je n’ai pas eu de réponse. Le papier est toujours sur son bureau.

Fakir : Vous êtes pourtant 51 personnes au service de communication de l’Elysée pour un coût annuel de 7,5 millions d’euros. J’ai du mal à comprendre comment c’est possible ?

La chargée de com’ : Hum…

Silence.
Long silence.

Fakir : Le but du service de communication n’est-il pas d’empêcher la communication plutôt que de la diffuser ?

La chargée de com’ : Ecoutez… je suis vraiment désolé… donc voilà…

Silence.
Long silence.

(exclusivité édition électronique)

http://www.fakirpresse.info/articles/333/claude-gueant-au-service-de-la-scientologie.html

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