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Mortalité infantile en hausse en France

2 novembre 2010, 09:48, par Roberto Ferrario

La mortalité infantile a augmenté en France en 2009

Selon les derniers chiffres de l’Insee, présentés hier à Paris, la mortalité infantile a, en 2009, augmenté en France pour la première fois depuis trente ans, passant de 3,6 à 3,7 décès pour 1 000 naissances vivantes. Un phénomène qui reste à analyser

Que révèle l’étude de l’Insee ?
Jusqu’ici, les progrès de la médecine périnatale ou encore les mesures de prévention de la mort subite du nourrisson avaient fait régulièrement chuter le nombre de décès d’enfants de moins d’un an. Mais le phénomène s’est grippé en 2005.

« La remontée constatée en 2009 est très légère, admet Xavier Niel, chef de la division Enquêtes et études démographiques de l’Insee. Mais la stagnation enregistrée ces dernières années n’est pas normale, alors même que la mortalité infantile continue de baisser chez nos voisins. En théorie, nous avons encore une marge de progression. »

La France est ainsi passée du 5e au 14e rang européen en la matière. La détérioration de la situation concerne surtout les premiers jours. « Les décès survenant au cours de la première semaine de vie augmentent, eux, depuis trois ou quatre ans, poursuit Xavier Niel. Nous sommes passés de 1,5 décès pour 1 000 naissances vivantes en 2005 à 1,7 en 2009. »

Quelles sont les explications avancées ?
Les données démographiques habituelles ne suffisent pas à expliquer le phénomène. D’après les chiffres du ministère de la santé, le nombre de prématurés n’a pas augmenté ces dernières années. La nationalité ne joue pas non plus.

« Traditionnellement, la mortalité infantile est plus forte chez les femmes étrangères, explique Xavier Niel. Mais on constate aussi une stagnation chez les femmes françaises nées en France. » Les conditions sociales ne sont pas plus pertinentes. « La mortalité globale avant un an augmente chez les cadres et les enseignants », assure ainsi le chercheur.

À l’Inserm, les analyses les plus précises des causes de décès des enfants de moins d’un an datent de 2005. Les plus récentes – qui sont globales et encore provisoires – remontent à 2008.

« Nous n’avons pas de données permettant d’expliquer les évolutions récentes, reconnaît Anne Tursz, pédiatre et directrice de recherches à l’Inserm. Cela dit, la mortalité infantile à moins d’un an est l’une des plus difficiles à expliquer. Chaque année, on dénombre 17 à 20 % de décès sans cause définie. »

Pour tenter d’y voir plus clair, « il faudra réaliser des études complémentaires, notamment sur l’offre de soins, les pratiques d’accouchement ou les conduites à risque des mères », affirme Xavier Niel

Quelle est la situation dans les départements d’outre-mer (DOM) ?
Le taux de mortalité infantile y est aujourd’hui deux fois et demie plus élevé qu’en métropole. En 2009, on recensait, en moyenne en métropole, 3,7 décès d’enfants de moins d’un an pour mille naissances vivantes. La même année, on atteignait 8,1 décès pour mille à la Réunion, 9,4 décès pour mille à la Martinique, 9,5 pour mille en Guadeloupe et en Guyane.

Sur les dix dernières années, la situation s’est dégradée de façon sensible dans la majorité des DOM. En 1999, le taux de mortalité était de 6,1 pour mille à la Réunion, 6,7 pour mille à la Martinique et 7,4 pour mille en Guadeloupe. Il n’y a qu’en Guyane (10,4 pour mille en 1999) que les chiffres ont légèrement reculé.

« Pour moi, le principal problème concerne la surveillance insuffisante des femmes durant leur grossesse. Cela explique le décès, durant les tout premiers jours de vie, d’un certain nombre d’enfants souffrant de pathologies non dépistées durant la grossesse », indique le docteur Ghislain Patient, chef du service de gynécologie-obstétrique du centre hospitalier Andrée-Rosemon à Cayenne.

Un constat partagé par Laurence Bosquillon, sage-femme et coordinatrice du réseau Perinat Guyane. « En métropole, les femmes enceintes bénéficient en moyenne de sept consultations de suivi durant leur grossesse, explique-t-elle. Ici, la moyenne est de quatre consultations mais beaucoup de femmes n’ont qu’une ou deux consultations, voire aucune. »

Selon Laurence Bosquillon, de nombreux décès sont aussi liés à des pathologies telles que la dengue, le paludisme ou « des gastro-entérites sévères et pour lesquelles le recours aux soins est trop tardif ».

Une autre explication concerne, dans certaines zones, un accès insuffisant à l’eau potable. « Cela peut se révéler dangereux pour le bébé quand la maman alterne l’allaitement au sein et les biberons », indique Laurence Bosquillon.

Pierre BIENVAULT et Emmanuelle RÉJU

http://www.la-croix.com/La-mortalite-infantile-a-augmente-en-France-en-2009/article/2443881/4076