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Docteur Bonnemaison - Analyse de Véronique Hervouet

28 août 2011, 20:01

Voir aussi le communiqué de l’Alliance pour les Droits à la Vie, qui analyse l’affaire de Bayonne en termes très clairs :
http://www.adv.org/dossiers/communiques/archive/2011/aout008/article/euthanasie-mortelle-precipitation/

« Euthanasie : mortelle précipitation

Tribune parue dans Le Figaro daté du samedi 20-dimanche 21 août 2011

Tugdual Derville et Docteur Xavier Mirabel *

* Respectivement délégué général et président de l’Alliance pour les droits de la vie, les auteurs réagissent à l’affaire de Bayonne

Le soutien aveugle dont bénéficie le médecin urgentiste de Bayonne, mis en cause dans une affaire d’euthanasie, révèle la menace qui pèse sur les personnes les plus vulnérables.

Quelle que soit notre opinion sur l’euthanasie, décider de son propre chef d’administrer un poison à un patient – fût-il âgé, hospitalisé en urgence et proche de la mort – est indéfendable. Jean Leonetti, auteur de la loi fin de vie de 2005, souligne à juste titre qu’aucun des pays ayant légalisé l’euthanasie ne prévoit pareille pratique. Logiquement les associations d’urgentistes contestent aussi les gestes que leur confrère de Bayonne semble revendiquer sans regret.

Comment faut-il, dans ces conditions, analyser l’avalanche des encouragements adressés au docteur Bonnemaison ? Que révèlent la manifestation devant l’hôpital de Bayonne avec prise de parole de soignants, les pétitions sur internet, les groupes sur Facebook et même, pour le moment, l’abstention judiciaire des familles concernées ? Pourquoi d’autres soignants du même service des urgences sont-ils mis en accusation par leurs collègues pour avoir révélé le décès précipité de plusieurs de leurs patients après le passage du médecin ?

Avec le mouvement des soins palliatifs, nous devons une nouvelle fois constater la grave méconnaissance qui perdure dans le public, mais aussi chez certains professionnels de la santé, au sujet de la fin de vie. Et voilà donc qu’un message se répand : notre société serait prête à fermer les yeux sur la mise à mort d’autrui, à partir du moment où la victime est âgée, inconsciente ou souffrante.

Le critère de la vieillesse est indécent : c’est un principe d’exclusion qui sous-tend l’idée qu’à partir de tel ou tel âge, une personne aurait « fait son temps ». Certaines personnes âgées fragiles que nous accompagnons subissent déjà une forme d’« euthanasie sociale ». Parfois, elles sentent qu’elles « encombrent » leurs propres familles… Comme si leur vie n’avait plus ni valeur, ni dignité !

Le second critère est tout aussi choquant : François de Closets affirme qu’un patient inconscient « n’est plus un être humain » ! A ce compte-là, on pourrait effectivement libérer maints lits d’hôpitaux.

Quant à l’idée que le poison serait une réponse appropriée à la souffrance, elle méconnait la performance des soins antidouleur auxquels chacun a droit.

Fuir devant le vieillissement, la dépendance et la souffrance est une tentation populaire. Comme pour Christine Malèvre en son temps, un premier emballement dédouane aujourd’hui l’auteur d’actes indéfendables. Dans l’émotion d’un instant, la foule épouse les solutions expéditives : elle applaudit la mise à mort qui escamoterait l’agonie. Elle ignore encore qu’il est possible de vivre paisiblement ses derniers instants, accompagné de façon naturelle. On croit ce temps inutile et traumatisant, voire trop couteux.

Désormais, nous partageons une double inquiétude.

Dès aujourd’hui, c’est la confiance en l’hôpital qui est menacée par la vague de soutien dont bénéficie le médecin de Bayonne. Et pour l’avenir, contrairement à ce que nous entendons chez les promoteurs de l’euthanasie, l’affaire de Bayonne préfigure ce qui adviendrait si elle était légalisée. En Belgique et aux Pays-Bas, en marge des procédures officielles qui se veulent rassurantes, l’euthanasie clandestine se développe sans aucun contrôle. Se sentant dédouanés, médecins et proches des patients vulnérables s’affranchissent des contraintes légales qu’ils estiment restrictives. Et certaines personnes âgées quittent même leur pays, de peur d’être euthanasiées.

Pour éviter que ne s’instaure dans notre pays une méfiance entre soignants et soignés, c’est la réaffirmation solennelle de l’interdit de tuer qui est indispensable. La dépendance la plus grande nécessite la plus grande protection.

* Qui animent le site www.sosfindevie.org »