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> Multitudes, l’Europe, la lutte de classes, les polémiques... de quoi s’agit-il ?

6 mai 2005, 20:04

Il y a sans doute plusieurs aspects à distinguer avant de comprendre comment ils sont liés :

1) l’évolution idéologique de la revue Multitudes,

 d’une part depuis la disparition de Futur antérieur (il suffit de comparer la teneur des articles respectifs, sur des thèmes vosins : la filiation marxienne a disparu), d’autre part l’évolution de la revue confrontée à la clarification autour des thèses d’Empire, sous la critique de même filiation (critique d’ailleurs non homogène, sur le revenu universel par ex. si l’on compare celle des marxistes tels de la mouvance LCF ou de Harribey, les thèses essouflées de Krisis sur la marchandise -Jappe, Kurz- ou la critique fondamentale de R. Simon dans Théorie du communisme)

 cette évolution plus récente, à l’occasion d’une part de la crise des mouvements de chômeurs et de la formalisation du démocratisme radical français (alternativistes) et particulièrement avec le référundum, dans la continuité de son articulation aux partis depuis 1995-2002.

Au demeurant les termes mêmes de définition des orientations de la Revue ont changé il y a peu (voir la présentation du site) : le hold-up est achevé.

2) la question de l’Europe (cf le numéro spécial de l’an dernier avec l’interview Cohn-Bendit par Y. Moulier-Boutang, qui me semble sur ce sujet générer ou révéler la fracture au sein de Multitudes), ou le post-fédéralisme présente une séduction qui se transforme vite, par un saut politique précipité, cette fuite en avant dans ce OUI au référundum : il est donc normal que des fidèles de la revue soient réellement déchirés (à prendre avec ou sans ironie), car les problématiques de fond ne sont pas abordées, et sans doute pas abordables dans les conditions de cette campagne, rabattue sur un choix binaire où chacun est sommé de choisir son camp, le OUI et le NON étant transformés en ce qu’ils ne sont pas, ne peuvent être (en termes de "choix de classes" : voter NON implique moins un choix de classe car cela n’y suffit pas, que voter OUI, ce que traduit la formule rapide : "on ne peut pas être de gauche et voter OUI", c’est ce qu’a parfaitement compris Monsieur Fabius...).

3) Que cela se traduise dans la forme des polémiques ici présentes n’est certes pas étonnant -finalement ça ne change pas des oppositions classiquement partisanes et identitaires, mais dans un contexte nouveau, celui de la restructuration en réseau de l’alternativisme radical -, mais au-delà de l’effet immédiat (lequel en termes de choix de vote par les lecteurs ?), on ne constate pas que les questions de fond (évoquées en 1. et 2.) soient abordées avec la sérénité et le type d’argumentation qui correspond à ces enjeux.

4) La crise est par conséquent d’abord celle qui traverse la revue, sa rédaction et la diaspora de ses auteurs et lecteurs. Elle est majeure parce que révélatrice de problématiques de fond, avec leurs aspects théoriques, du point de vue de la philosophie politique en France dans l’héritage croisé d’Althusser et de Deleuze, comme de l’ensemble de l’idéologie de la post-modernité chevauchée allégrement en bradant la postérité des ruptures marxiennes sur fond de déficit de leur remise en perspective. De ce point de vue, il n’y a que les personnes concernées qui peuvent tirer leurs conclusions dans le rapport à Multitudes, pour des raisons de forme ou de fond... sous réserve à mon sens de creuser des aspects idéologiques aujourd’hui masqués.

Plus concrètement, un enjeu théorico-pratique est la définition des luttes de classes quand elles sont menées par ceux qui n’ont pas de travail (ou parallèlement, pas de papiers). De ce point de vue, il ne faut pas se voiler la face, les choses ne sont pas plus claires au sein du camp du NON -malgré une certain enthousiasme unitaire lié à la campagne, l’impression d’une dynamique sans doute chargée d’illusions- qu’au sein de la diaspora Multitudes en plus généralement de l’intellitgensia française héritière de la période 1968-1995.

J’avais essayées d’aborder certaines de ces questions sur la liste Multitudes-Info, mais on me disait : "vos positions ne nous intéresse pas", ce qui se traduisait par le silence, pour ne pas dire la censure sous divers prétextes, la violence des propos, par ex. du type de celle qui monte quand on se heurte à un mur idéologique digne de défunts Comités centraux. Mais voilà qui renvoie sans doute aux contradictions de la forme Revue, quand elle prétend ratisser large avec une vue aussi étroite... qu’un parti politique ?

Patlotch  ?¿ ? ¿ ?¿ ? ¿ ?¿ ?¿ ?