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"I cento passi " film sur la vie de Giuseppe Impastato

30 septembre 2008, 17:25, par Roberto Ferrario

Et oui... cet film çà me "rappelle" plein des chose de l’Italie, que je vécue dans ces année que nous on appelle "Les année de plomb" et de la lutte, encore actuelle, contre la mafia au service du pouvoir démocrate-chrétien dans le passe et berlusconien-social-démocrate maintenant ...

Je vous "propose" un article que je publie le 9 mai 2008, et un article, ok de la presse du pouvoir..., mais "intéressant"...

Ciao
Dr Furioso


http://bellaciao.org/fr/spip.php?article65917

9 mai 1978 : PEPPINO IMPASTATO et sa lutte contre la mafia (videos)

de Roberto Ferrario

L’histoire de "Les Cent pas"

Années 60. Peppino Impastato, jeune garçon issu d’une famille étroitement liée à la mafia, vit à Cinisi, une bourgade sicilienne. Sa maison se situe à cent pas de la demeure de Tano Badalamenti, le parrain local. Son père espère faire de lui un personnage influent de la pègre. Mais en grandissant, Peppino devient un adolescent rebelle et idéaliste. Bientôt attiré par le communisme, il s’emploie à lutter ouvertement contre les pratiques de la mafia, mettant ainsi sa vie en péril...

En 1965, il fonde le journal "L’idea Socialista" et adhère au PSIUP "Parti socialiste Italien de l’unité prolétaire". Â partir de 1968, il dirige les activités des groupes de la Nuova Sinistra ("Nouvelle Gauche"). Il dirige également la lutte des paysans expropriés lors de la construction de la 3e piste de l’aéroport de Palerme (sur le territoire de Cinisi). Il milite également en faveur des ouvriers et des chômeurs.

En 1975 il forme le groupe Musica e cultura qui organise des manifestations culturelles : musique, théâtre, débats, etc. En 1976, il crée Radio Aut, une radio indépendante et auto-financée. Le programme le plus suivi était Onda pazza (traduisible par "Ondes en folie") émission satirique dans laquelle il tournait en dérision politiques et mafieux. Sur ces ondes, il dénonce les délits et les affaires des mafieux de Cinisi et Terrasini, en particulier du "parrain" local Gaetano Badalamenti. Ce dernier avait un rôle de tout premier ordre dans les trafics internationaux de drogue (grâce à sa main mise sur l’aéroport tout proche). Malgré tout, Peppino et ses amis étaient considérés comme les vrais empêcheurs de tourner en rond par les autorités de la ville...

En 1978, il est candidat sur la liste de "Democrazia Proletaria" aux élections municipales. Il fut assassiné dans la nuit du 8 au 9 mai 1978, pendant la campagne électorale. Il a été attaché sur une voie ferrée et une une charge de TNT a été placée sous son corps. Deux jours plus tard, les électeurs de Cinisi l’élisent quand même.

Mise en scène : Marco Tullio Giordana
Acteurs : Luigi Lo Cascio, Paolo Briguglia, Lucia Sardo, Luigi Maria Burruano, Tony Sperandeo, Ninni Bruschetta
Production : Titti Film - RAI Cinema Spa
Distribution : Bac Film

Souvenons-nous de Peppino Impastato, 30 ans après sa disparition

de Francesco Barilli "Ecomancina"

Le 9 mai 1978, l’Italie est secouée par un des évènements les plus dramatiques de son histoire. Le corps de Monsieur Aldo Moro (personnage pour le moins central de la vie politique italienne, à l’époque président de la Démocratie Chrétienne) est retrouvé à Rome, via Caetani, tué par les Brigades Rouges, après 55 jours de détention.

Face à une nouvelle aussi éclatante, tout autre évènement passe au second plan. Et c’est ainsi que bien peu s’aperçurent de la mort d’un jeune de trente ans dont les malheureux restes furent trouvés, dans la nuit du 8 au 9 mai, déchirés par une charge de T.N.T. déposée sur la voie ferrée entre Palerme et Trapani.

Ce jeune, c’était Giuseppe "Peppino" Impastato, né à Cinisi, le 5 janvier 1948, figure "dérangeante" du panorama politique de Cinisi (province de Palerme), engagé, depuis des années, en première ligne de la lutte contre les abus et les spéculations à caractère mafieux qui empoisonnaient la vie de son village.

Dans un premier temps, les enquêtes allèrent dans le sens d’un attentat terroriste raté ou d’un suicide "exhibitionniste". Ce n’est que grâce au fort engagement de son frère Giovanni et de sa mère Félicia, de ses camarades de Radio Aut et du Centre Sicilien de Documentation (qui prit d’ailleurs, par la suite, le nom de Peppino Impastato) que l’on parvint lentement et avec beaucoup trop d’années de retard à la vérité.

Peppino fut tué par la mafia qui trouvait désormais intolérables les attaques du jeune homme contre l’organisation (qui,justement ces années-là, cherchait à développer ses activités de trafic en les adaptant à une réalité qui se transformait, en Sicile aussi, avec l’abandon d’un modèle économique strictement rural) et qui probablement trouvait inacceptable que Peppino puisse être élu au Conseil Municipal de Cinisi aux toutes prochaines élections (le 14 mai, Peppino fut élu symboliquement avec 264 voix d’avance et le parti "Démocratie Prolétaire", sur la liste duquel il s’était présenté, obtint 6% des voix à Cinisi).

Salvo Vitale (un des plus fidèles amis de Peppino, en plus d’être son camarade dans les expériences de lutte à travers la communication, de la diffusion de tracts aux "meetings", de la constitution du "Cercle musique et culture" au journal "L’idée") a écrit sur le site de radio Aut " Le fait que l’on n’ait pas retrouvé la moindre miette de sa tête fait penser qu’ils lui ont même enfoncé un bâton de dynamite dans la bouche, pour dire qu’il avait trop parlé".

Je n’ai pas été instruit à "lire" les signes mafieux mais je pense que d’autres facteurs que celui évoqué, à juste titre, par Savo déterminèrent la brutalité particulière de l’assassinat de Peppino. Pour les "étrangers", la mise en scène servait sûrement à porter sur une fausse piste, celle des hypothèses mentionnées ci-dessus d’attentat/ suicide. Pour ceux qui surent comprendre dés le début l’origine mafieuse de l’assassinat ce geste devait être aussi une incitation au silence, mais encore plus un avertissement : Peppino devait être non seulement tué, non seulement brutalisé, mais aussi effacé de la surface de la terre. Il fallait aller jusqu’à effacer les traces mêmes de son existence physique. Heureusement, cela ne se passa pas ainsi et cet article, lui aussi, veut contribuer à maintenir en vie sa mémoire.

La figure de Peppino Impastato

Engagé en première ligne, ai-je dit plus haut ; mais il faut préciser que l’engagement de Peppino était une chose totalement nouvelle pour l’époque en ce qu’il savait conjuguer sa dimension personnelle et la dimension politique.

Il était physiquement menu mais doué d’une énorme énergie et d’une incroyable vivacité intellectuelle ; un conflit émotif complexe entra probablement en jeu dans sa formation idéologique : sa rébellion était à la fois politique, générationnelle et familiale. Son père Luigi (figure douloureuse, tracée avec un grand art par Marco Tullio Giordana dans le film "I cento passi" ; impliqué dans le milieu mafieux de Cinisi, il chercha, à sa façon, tant qu’il fut en vie,à protéger son fils des mesures de rétorsion mafieuses) avait été l’ami de Gaetano Badalamenti et une des sœurs de Luigi avait épousé Cesare Manzella,le boss tué en 1963 ; et, de façon plus générale, toute la famille Impastato avait dans son propre ADN de lourdes influences mafieuses.

Mais l’histoire de Peppino en est d’au tant plus importante : c’est l’histoire d’un homme qui a su défier la mafia, en commençant par celle qui se trouvait dans sa propre maison.

La rupture idéologique avec son père advint alors que Peppino était encore un tout jeune homme et dés 1968, il participa activement aux initiatives de la gauche alternative de l’époque. Il adhéra à la lutte des paysans qui s’étaient fait exproprier de leurs terres pour la construction de la troisième piste de l’aéroport, constitua le groupe "Musique et Culture" (1975) et, en 1976, fonda "Radio Aut" (expérience intéressante de radio libre, assez courante à l’époque, où se conjuguaient l’exigence de rupture culturelle et la recherche d’un mode nouveau - pour l’époque - de véhiculer l’engagement politique). Puis l’activité avec "Lotta Continua" et, comme on l’a dit, avec "Démocratie Prolétaire".

Pour en revenir à Radio Aut, un des programmes qui eut le plus de succès (et qui "ennuyait" le plus les cercles mafieux de Cinisi) était "Onda pazza" (onde folle), une sorte de flash hebdomadaire d’information, satirique, où Peppino et ses amis plongeaient la réalité de Cinisi dans une atmosphère qui frôlait l’absurde mais où les noms et les faits étaient bien reconnaissables, pour qui les connaissait ;Gaetano Badalamenti devenait ainsi "Tano assis" et le maire Gero di Stefano devenait Geronimo Stefanini, grand chef de "Mafiopoli" (Cinisi, évidemment). Un des plus beaux et des plus forts moments de "I Cento Passi" met en scène Peppino qui, pour décocher ses flêches sur les "puissants" de Cinisi, adapte librement des passages de l’Enfer de Dante, tandis que le cinéaste nous montre les différentes réactions du public d’"Onda pazza" : d’un côté, les gens amusés qui s’entassent dans les bars autour d’une petite radio, de l’autre côté les boss du village, écoutant avec la même attention mais dans un esprit bien différent, préoccupés par cette voix qu’il faut arrêter...

En consultant le site de Radio Aut, j’ai découvert que la parodie inspirée de l’Enfer de Dante avait été retransmise le 3 mars 1978. A partir de ce jour et jusqu’à sa mort, les émissions de "Onda pazza" furent une impressionnante progression de Peppino qui démolissait d’un éclat de rire (comme le voulait un vieux slogan, jadis patrimoine historique de la gauche) spéculateurs, administrateurs et personnages haut placés de Cinisi, sans épargner personne, avec pour seule arme, l’ironie lucide (une "arme" que Peppino fut le premier à utiliser contre la mafia).

La figure de Peppino Impastato apparaît aujourd’hui d’une incroyable actualité, 30 ans aprés sa mort. Dans une période où tout était "politique", Peppino savait conjuguer l’engagement politico-social et une tension morale vers la construction d’un "monde nouveau", d’un "homme nouveau", d’une "nouvelle manière" de vivre et d’envisager l’engagement. Et, en cela, ses valeurs (à la fois politiques et transcendant la politique) me semblent pouvoir être rapprochées de celles de l’actuel "Mouvement" et l’on peut considérer sa figure comme celle d’un précurseur de certaines formes de lutte et de protestation.

Les enquêtes

Comme on l’a déjà dit plus haut, les enquêtes sur la mort de Peppino furent au début perverties par la tentative évidente de ne pas vouloir reconnaître l’origine mafieuse de l’assassinat. En 1984, grâce au travail du juge d’instruction Rocco Chinnici (tué en juillet 1983), le juge Antonio Caponnetto reconnut l’origine mafieuse de l’assassinat mais ne réussit pas à vérifier la culpabilité des exécuteurs ou des mandataires, attribuant l’acte à des inconnus.

En 1994, le Centre Impastato demanda et obtint la réouverture de l’enquête. Cette demande fut soutenue non seulement par une pétition populaire mais aussi par un exposé de la mère et du frère de Peppino, Felicia Bartolotto et Giovanni Impastato (où ils demandent que l’on enquête également sur l’attitude des carabiniers immédiatement après les faits).

C’est une histoire typiquement italienne celle du procès Impastato, faite de silences coupables et d’orientations vers de fausses pistes, mais c’est au moins une histoire où la famille et les amis de la victime ont pu obtenir satisfaction : le 11 avril 2002, le boss mafieux Gaetano Badalamenti a été condamné à la détention à perpétuité, en tant que mandataire de l’assassinat. Auparavant avait été condamné Vito Palazzolo (disparu en 2002), lui aussi comme mandataire. Et à l’occasion de ces sentences, la famille Impastato a également reçu la reconnaissance tardive du fait que les premières enquêtes avaient été perverties. Le juge assesseur Angelo Pellino écrivit en effet, dans la sentence de condamnation de Vito Palazzolo, que sur les enquêtes "pèse l’intolérable soupçon d’une orientation systématique vers de fausses pistes ou, en tout cas, d’une façon de les mener (ces enquêtes) pervertie par une déconcertante accumulation d’omissions, de négligences, de retards associés à des choix d’enquête préconçus qui en auraient altéré la direction et le développement".

Mais s’il est vrai que les années ont apporté quelques satisfactions tardives, il est vrai aussi que de nouvelles amertumes n’ont pas épargné la famille Impastato. Comme lorsque l’Administration Communale de Isnello (province de Palerme)fit enlever la plaque commémorative de la place dédiée à Peppino, apposée en 1998 (cette fois-là, plusieurs intellectuels italiens s’étaient manifestés pour protester ainsi que diverses personnes appartenant à des familles de victime de la mafia ; j’en cite quelques uns dans le désordre : Rita Borsellino, Marta Fiore Borsellino, Nando Dalla Chiesa, Pina Maisano Grassi, Dario Fo et Franca Rame, Andrea Camilleri, Gillo Pontecorvo, Ettore Scola... et je m’excuse auprés de tous ceux, nombreux, que j’ai oublié de citer). Ou encore, quand, lors du récent procès à charge de Badalamenti et Palazzolo pour l’assassinat de Peppino, le collège de la défense dépoussiéra à nouveau la théorie de l’attentat terroriste comme cause de la mort...


L’Italie des années de plomb

1968

L’Italie est confrontée à une intense effervescence sociale. Le miracle économique que connaît le pays depuis la fin de la guerre a avivé les tensions et les frustrations du monde ouvrier. Les événements du début de l’été, initiés dans les universités, se propagent rapidement dans l’ensemble de la société. Les conquêtes sociales sont nombreuses : augmentation des salaires, réduction du temps de travail. De cette agitation, mal canalisée par les syndicats, naissent une multitude de groupuscules gauchistes qui, en rupture avec le PCI, prônent une lutte armée insurrectionnelle. Parmi eux, le Colletivo Politico Metropolitano (CPM).

Décembre 1969

Une bombe explose à Milan, faisant seize victimes. La responsabilité de l’attentat est imputée à un mouvement d’extrême-droite entendant contrer l’infléchissement à gauche de la politique italienne, amorcé l’année précédente. Cette "stratégie de la tension" vise à instaurer la terreur afin de renforcer l’électorat des partis de l’ordre et, à terme, favoriser le déclenchement d’un putsch militaire, comme en Amérique latine.

Septembre 1970

Les Brigades rouges (Brigate Rosse) revendiquent leur premier attentat : l’incendie d’une voiture à Milan. L’organisation clandestine est en fait une résurgence du CPM. Renato Curcio, Mara Cagol et Mario Moretti sont les membres les plus célèbres du "noyau historique".

1973

Création des Noyaux armés prolétariens, qui recrutent leurs membres dans les prisons et mèneront des actions conjointes avec les Brigades rouges. Création d’Autonomie ouvrière, qui fédère de nombreux groupes libertaires et marxistes. Toni Negri en est le principal théoricien.

1974

Les Brigades rouges essaiment dans tout le nord de l’Italie. Outre Milan, l’organisation revendique désormais des colonnes à Padoue, Porto Maghera, Turin et Gênes.

Juin 1976

Les Brigades rouges abattent le juge Francesco Coco, qui dirige le premier procès contre les terroristes. Pour la première fois, les Brigades rouges pratiquent l’assassinat politique. Jusque là, elles s’en tenaient à l’intimidation, parfois violente, des magistrats et des grands patrons. La même année est créée Première ligne (Prima Linea), autre groupe terroriste dont l’action sera souvent confondue avec celle des Brigades rouges.

16 mars 1978

Enlèvement d’Aldo Moro, le dirigeant de la démocratie-chrétienne italienne, alors que celui-ci est sur le point de conclure une alliance de gouvernement, le "compromis historique", avec les communistes. Les brigadistes l’exécutent deux mois plus tard, après un simulacre de procès. L’affaire ne sera jamais réellement élucidée : on évoque l’implication de la mafia, de l’extrême-droite, voire une manipulation des services secrets italiens.

24 janvier 1979

L’assassinat de Guido Rossa, syndicaliste "coupable" d’avoir dénoncé un militant gauchiste, déclenche une vague de protestation virulente dans les milieux ouvriers, qui ne se reconnaissent plus dans les actions des Brigades rouges.

Printemps 1979

L’Etat italien adopte une série de mesures d’exception pour lutter contre le terrorisme : prolongation de la garde à vue, peines de prison à vie contre les auteurs d’enlèvements et réductions de peine pour les repentis. Ces mesures débouchent sur le démantèlement complet du réseau Prima Linea ainsi que d’Autonomie ouvrière, tenant d’une ligne moins dure et qui n’a jamais pratiqué l’assassinat politique. C’est parce qu’elle récuse la nature de ces lois, et qu’elle refuse, par conséquent, toute extradition, que la France sera une terre d’exil pour quelques centaines d’activistes au moment des grands procès du début des années 1980.

Août 1980

Un attentat, perpétré par l’extrême-droite italienne, fait 84 morts dans la gare de Bologne.

Avril 1981

Mario Moretti, le dernier chef historique des Brigades rouges encore en liberté, est arrêté.

1982

Les arrestations se multiplient dans les milieux terroristes italiens : les brigadistes commettent environ 400 attentats cette année-là, mais 500 de leurs membres et sympathisants sont interpellés. Affaibli militairement, le mouvement clandestin connaît également un appauvrissement idéologique, consécutif à des scissions répétées. Le Br-Guerilla du prolétariat métropolitain n’existera que quelques mois ; le Br-Parti communiste combattant entend mener une guerre insurrectionnelle permanente et se constituer en bras armé du prolétariat ; le Br-Union des communistes combattants tente d’organiser le prolétariat et de l’amener à engager lui-même la révolution. Les Brigades rouges, isolées et sans véritable soutien populaire, continuent pourtant leur action durant toutes les années 1980.

1983

Ouverture des grands procès : plus de 4000 activistes de gauche appartenant à des "associations subversives" ou "bandes armées" sont condamnés pour des "faits liés à des tentatives de subversion de l’ordre constitutionnel". Les "années de plomb" auront fait près de 2 000 blessés et 380 morts, parmi lesquels 128 ont été victimes de l’extrême-gauche.

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