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L’invité de la semaine Pierre Audin du Palais de la découverte

Publie le jeudi 20 mai 2010 par Open-Publishing

L’invité de la semaine.
Pierre Audin, M. Cluzel devait concevoir le Grand Palais des arts 
et des sciences, il a fait un hors-sujet

médiateur scientifique du Palais de la découverte, membre du syndicat Sud.
Jean-Paul Cluzel a rendu sa copie. Le président de la République lui avait donné mission de concevoir le Grand Palais des arts et des sciences. Il a fait un superbe hors-sujet de 143 pages. On attendait une réflexion sur ce qui produit les arts et les sciences, ce qui fait que des hommes et des femmes sont devenus des créateurs, 
en peinture, en sculpture, en littérature, en musique, en mathématiques, 
en physique, en chimie, en biologie, 
pour ne prendre que quelques exemples. Tout seul, M. Cluzel aurait 
eu du mal à traiter cette question. 
Il valait mieux s’entourer d’experts. Hélas, la constitution de quelques groupes de travail ne lui a servi qu’à donner le change. Au lieu d’un projet culturel grandiose, auquel artistes et scientifiques auraient pu adhérer, n’émerge que la volonté d’exécuter les Galeries nationales et le Palais de la découverte, pour faire la place aux investisseurs privés  : le Grand Palais est près des Champs-Élysées, le prix 
du mètre carré est très cher et beaucoup de firmes multinationales cherchent à placer leur argent, peut-être même à le blanchir. Les Galeries nationales seront absorbées par l’établissement public du Grand Palais, le Palais de la découverte se verra amputé de son hall d’entrée, 
ce qui le coupera en deux. 
Pour commencer. Pourtant, arts 
et sciences ont fait bon ménage. L’objectif des Arts et Métiers était bien de former des ingénieurs. Plus globalement, 
la science nourrit les artistes (le cubisme est né en même temps que la théorie 
de la relativité  ; l’Oulipo est un lieu 
de rencontre privilégié entre littérature 
et mathématiques) et les arts interrogent la science (pensez aux machines 
de Léonard de Vinci ou de Jules Verne). Lancer le projet d’un musée qui serait 
le lieu de rencontre de tous les arts, 
y compris les sciences, ce n’est pas l’objectif que peut se donner 
un gouvernement au service de 
la Bourse. Le plan d’austérité a du bon  : M. Cluzel ne trouvera pas les 236 millions d’euros dont il a besoin pour mener 
ses petits projets.

http://www.humanite.fr/article2765908,2765908

L’invité de la semaine
Pierre Audin. Vous n’avez pas compris  ? 
Venez nous en parler au Palais de la découverte

Médiateur scientifique du Palais de la découverte, membre du syndicat Sud

Pour la semaine de la science en Algérie, entre autres expériences, nous faisions construire un ballon de foot de cinq mètres de diamètre. C’est très grand et vous êtes vite confrontés à des problèmes de rigidité de plus en plus graves au fur et à mesure que le squelette du ballon se construit. Pour éviter la casse, les hexagones et les pentagones étaient renforcés par des diagonales. Symboliquement, l’étoile de David cohabitait avec l’étoile à cinq branches du drapeau algérien (des drapeaux, en Algérie, il y en a presque autant que de ballons).

On ne peut pas expliquer à des guêpes pourquoi leur nid montre aussi des pentagones, mais au public oui. C’est moins facile ici, sans image ni formule. Essayons. Prenez un ballon de baudruche. Gonflez-le et dessinez dessus avec un feutre. Seule contrainte  : les traits doivent former un dessin d’un seul tenant. Là où deux traits se rencontrent, c’est ce qu’on appelle un sommet. Une zone délimitée par des traits, c’est une face. Entre deux sommets, un trait s’appelle une arête. Si sur le ballon vous avez dessiné un « Y » il n’y a qu’une face, trois arêtes et quatre sommets. Si vous avez dessiné un « A » il y a deux faces, cinq arêtes et cinq sommets. Mais votre dessin ne peut pas être « YA » car il ne serait pas d’un seul tenant.

Essayez de dessiner pour ne faire apparaître que des faces hexagonales, entourées de six arêtes. Vous n’y arriverez pas mieux que les guêpes ou les fabricants de ballons de foot. Arrêtez votre dessin, comptez les faces, comptez aussi les sommets. Ajoutez les résultats. Enlevez 2, vous obtenez le nombre d’arêtes. Vous n’avez pas compris  ? Vous ne voyez pas le rapport avec le ballon de foot  ? Venez nous en parler au Palais de la découverte. En maths, c’est comme en politique  : mieux vaut discuter que de diffuser un tract. Ainsi le mot « cercle » a été ajouté dans mon papier de mercredi comme si le mot « diamètre » ne pouvait concerner qu’un cercle  : à Bab Ezzouar, le ballon était coincé sous le plafond, de cinq mètres de haut.

http://www.humanite.fr/article2766140,2766140

L’invité de la semaine
Pierre Audin, Vous jouez avec un ballon 
et vous ne l’avez jamais regardé….

médiateur scientifique du Palais de la découverte, membre du syndicat SUD.

Fin mai, le Salon de la culture et des jeux mathématiques se tiendra à Paris  : la place Saint-Sulpice sera livrée à des passionnés de maths, prêts à partager leur passion avec les élèves, les passants ou les habitués. Fin octobre, les profs de maths fêteront les cent ans de leur association, entre eux mais aussi avec le public. Enseignants, animateurs, médiateurs scientifiques, bénévoles et professionnels se mettent en quatre pour expliquer la richesse de leur discipline, son utilité pour la société et pour chacun.

La médiation scientifique, c’est un métier, c’est mon métier. Pas facile, car pour beaucoup les maths se limitent à un savoir scolaire, découpé en sept tranches à ingurgiter de la sixième à la terminale. Et ça passe mal. Pas facile non plus d’être prof de maths actuellement. 
Non, je ne parle pas de sécurité ou de burqa, mais de cette inspectrice qui rend visite à un prof de banlieue et lui reproche de faire des maths dans son cours. Comment découvrir les maths dans ces conditions  ? Au Palais de la découverte, on en voit tous les jours, 
des élèves de banlieue ou d’ailleurs.

Des fois, on se déplace, par exemple, il y a deux mois, à Alger. Là, tous les enfants naissent pour ainsi dire avec un ballon dans les pieds. Avec des étudiants formés sur le tas, on leur en a fait construire un cercle de 5 mètres de diamètre. Avec des tiges de bois de 1 m, de 1,62 m et de 1,73 m. Pourquoi ces longueurs  ? Pour construire des hexagones et des pentagones. Pourquoi  ? Il n’y a pas que des hexagones  ? Non. Vous jouez avec un ballon toute la journée et vous ne l’avez jamais regardé  : il y a des pentagones, douze pentagones, forcément. 
Défilés de jeunes à longueur de journée, avides de savoir et de comprendre. 
Les étudiants ont poursuivi ces animations pendant un mois, de ville 
en ville. Entre ceux qui veulent partager ce qu’ils ont compris et ceux qui veulent comprendre, la vulgarisation des maths a de l’avenir, n’en déplaise à ceux qui étouffent la société pour gaver 
le CAC 40.

http://www.humanite.fr/article2766059,2766059

L’invité de la semaine
Pierre Audin. Et le vainqueur est…

MEMBRE DU SYNDICAT SUD. MÉDIATEUR SCIENTIFIQUE DU PALAIS DE LA DÉCOUVERTE

Le 29 janvier, le Palais de la découverte recevait de la Société française de physique le prix Jean Perrin. Le nom de Jean Perrin est lié à la création de deux institutions de la République, le CNRS et le Palais de la découverte. Le CNRS, né en 1939, a eu une enfance compliquée par la Seconde Guerre mondiale, mais la Libération a permis de finaliser le travail du Front populaire. Le Palais de la découverte était au départ un pavillon d’une exposition universelle, pas à Shanghai mais à Paris, pas en 2010 mais en 1937. En six mois, il a accueilli plus de deux millions de visiteurs, ce qui a poussé Jean Perrin à plaider pour son maintien, dans ses locaux et dans ses missions.

Prix Nobel, Jean Perrin voulait montrer au public la science en train de se faire. Son désir était de susciter des vocations, de ne pas rater la possibilité qu’un enfant du peuple, venant au Palais de la découverte et découvrant la science à cette occasion, devienne un scientifique à son tour et participe à l’avancement de la science. Les années ont passé, les missions sont restées, avec une lecture plus moderne de « la science en train de se faire ». D’une part, le Palais de la découverte permet aux visiteurs de voir des manipulations que des scientifiques apportent de leur laboratoire. D’autre part, les visiteurs assistent à de nombreuses séances où un humain fait des expériences devant eux, ou les fait participer aux expériences. Le contact direct du visiteur avec cet humain qui répond aux questions posées et à celles que le visiteur ne sait pas poser, c’est la force du Palais de la découverte depuis l’origine. Missions remplies avec un demi-million de visiteurs annuels, beaucoup de scientifiques disant que la visite du Palais de la découverte a joué un rôle dans leur vocation.

Tristes victoires pour le Palais, qui a perdu son indépendance dans la fusion avec la Cité des sciences depuis le 1er janvier, et que M. Cluzel voudrait dépecer. Le vainqueur est… l’obscurantisme.

http://www.humanite.fr/2010-05-11_Idees-Tribune-libre-Histoire_Pierre-Audin-Et-le-vainqueur-est

L’invité de la semaine
Pierre Audin. Vous n’avez pas compris  ? 
Venez nous en parler au Palais de la découverte

Médiateur scientifique du Palais de la découverte, membre du syndicat Sud

Pour la semaine de la science en Algérie, entre autres expériences, nous faisions construire un ballon de foot de cinq mètres de diamètre. C’est très grand et vous êtes vite confrontés à des problèmes de rigidité de plus en plus graves au fur et à mesure que le squelette du ballon se construit. Pour éviter la casse, les hexagones et les pentagones étaient renforcés par des diagonales. Symboliquement, l’étoile de David cohabitait avec l’étoile à cinq branches du drapeau algérien (des drapeaux, en Algérie, il y en a presque autant que de ballons).

On ne peut pas expliquer à des guêpes pourquoi leur nid montre aussi des pentagones, mais au public oui. C’est moins facile ici, sans image ni formule. Essayons. Prenez un ballon de baudruche. Gonflez-le et dessinez dessus avec un feutre. Seule contrainte  : les traits doivent former un dessin d’un seul tenant. Là où deux traits se rencontrent, c’est ce qu’on appelle un sommet. Une zone délimitée par des traits, c’est une face. Entre deux sommets, un trait s’appelle une arête. Si sur le ballon vous avez dessiné un « Y » il n’y a qu’une face, trois arêtes et quatre sommets. Si vous avez dessiné un « A » il y a deux faces, cinq arêtes et cinq sommets. Mais votre dessin ne peut pas être « YA » car il ne serait pas d’un seul tenant.

Essayez de dessiner pour ne faire apparaître que des faces hexagonales, entourées de six arêtes. Vous n’y arriverez pas mieux que les guêpes ou les fabricants de ballons de foot. Arrêtez votre dessin, comptez les faces, comptez aussi les sommets. Ajoutez les résultats. Enlevez 2, vous obtenez le nombre d’arêtes. Vous n’avez pas compris  ? Vous ne voyez pas le rapport avec le ballon de foot  ? Venez nous en parler au Palais de la découverte. En maths, c’est comme en politique  : mieux vaut discuter que de diffuser un tract. Ainsi le mot « cercle » a été ajouté dans mon papier de mercredi comme si le mot « diamètre » ne pouvait concerner qu’un cercle  : à Bab Ezzouar, le ballon était coincé sous le plafond, de cinq mètres de haut.

http://www.humanite.fr/article2766140,2766140