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L’Eau, usages et mésusages…

Publie le mardi 12 octobre 2010 par Open-Publishing
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de Michel MENGNEAU

L’eau appartient à tous ! Si certains font fi de cette déclaration, elle est pourtant une réalité. Mais il y en a cependant qui s’approprient ce bien commun de l’Humanité sous divers prétextes. Ce qui pose alors la question : quels sont les utilisations, les consommations, qui sont les usages mercantiles ou abusifs hors le respect et le partage que l’on doit à la collectivité ? Ceux que l’on classera dans les mésusages.

On pense tout de suite à des usages personnels, comme le fait de prendre des bains répétés dans la même journée, la piscine individuelle, le lavage répétitif de la voiture, l’arrosage de la pelouse, etc. Cette liste n’étant pas exhaustive ce qui nous amène à penser à des utilisations plus générales mais néanmoins tendancieuses quand à leur justification, l’arrosage de golf est l’un des exemples, mais surtout, c’est l’arrosage agricole qui en premier vient à l’esprit pouvant être individuel ou collectif.

Que l’on ne se méprenne pas, il ne s’agit pas de rejeter le fait d’arroser des plantes nourricières pour mieux les faire pousser, du moins d’en assurer la pousse de façon non aléatoire, mais de savoir ce que l’on doit arroser pour survenir aux besoins réels de nos populations. On entend par là : les besoins de proximité !

Ce n’est pas d’aujourd’hui que l’on irrigue. Les sumériens au IV avant J.C. avaient déjà utilisé ce moyen pour améliorer leur production d’épeautre en Mésopotamie. Mais c’est aussi l’irrigation qui favorisera la fin de leur civilisation puisque la salinité de l’eau rendra les terres incultes, comme quoi, lorsque l’on force la nature à mauvais escient le retour de bâton est inéluctable. On a donc depuis longtemps irrigué quelques céréales, mais se furent et se sont surtout les cultures maraîchères en Europe, jusqu’à ce qu’arrive le grand boom du maïs, que l’on connaissait toutefois chez nous depuis le XVIème siècle. Ce fut la généralisation de l’ensilage donné aux bêtes de viande et aux vaches laitières qui, dans les années soixante-dix, sera l’un des déclencheurs de l’explosion de la culture de cette plante. Plante qui demande naturellement beaucoup d’eau puisque 40mm tout les dix jours est une moyenne en fonction du terrain, assurant l’exploitant d’avoir d’excellents rendements. Cette demande sera aussi favorisée puisqu’à la même époque on verra l’arrivée de l’enrouleur (le Typhon de Di Palma) facilitant le travail de l’agriculteur. L’arrosage se faisait avant par couverture totale quadrillage de tuyauterie alimentant de petits asperseurs), ou avec quelques pivots que l’on pouvait voir en Beauce, mais surtout dans les Landes. Alors beaucoup d’agriculteurs se mirent aussi au maïs, maïs grain n’ayant pas de bétail et de surcroit dans des zones peu propices comme les plaines calcaires, peu importe, puisque l’on prétendait qu’avec la mondialisation on allait faire disparaître la faim dans le monde en ayant des rendements importants du à l’irrigation. Immense erreur !

Ce fut donc l’inverse, pour en arriver en 2010 aux environs d’un milliard d’habitants de la planète souffrant de la faim. Et l’on doit ceci principalement à l’agriculture subventionnée, l’agrobusiness en bonne part européen. Cela vient du fait que l’on expédie des céréales vers les pays non développés, céréales qui sont vendues en dessous du prix de celles produites localement. Par conséquence, les cultivateurs de ces pays là ne peuvent plus vivre ne vendant pas leurs récoltes. C’est d’ailleurs parmi ces agriculteurs qu’il y a le plus de gens souffrant de la faim. Alors ces malheureux migrent vers les villes où ils ne trouvent pas de travail. Puis en désespoir de cause, partent vers l’Europe. L’Europe qui illico les expulse sans ménagement, alors qu’elle est en partie responsable de leurs misères et souffrances…

Malgré tout, foin des avis des experts, des conseillés, des techniciens, des technocrates, nous avons les solutions pour sortir de l’agrobusiness de façon simple. Le bon sens paysan qui s’étiolait sous le formatage de la pression économique nous souffle cependant qu’il serait grand temps de relocaliser l’agriculture. De l’agriculture de proximité, c’est la solution incontournable, oublions la bourse au cadran de Chicago qui règle le cours des céréales. Produisons en fonction de nos besoins. Ce ne sera pas universel puisque l’on ne pourra pas par exemple produire du café dans le Marais Poitevin, mais le maximum de regards tournés vers la proximité et ces spécificités redonnant un vrai sens à l’agriculture paysanne va nous sortir de l’agriculture hyper productiviste avec tout les désagréments qu’elle comporte ; dont surtout le principal qui est une trop grande quantité sans qualité, voire plus précisément, tout ce qui sort du naturel par trop d’apports industriels polluants et nuisibles à la santé.

Il est évident que ces conditions vont faire augmenter de façon conséquente le coût des produits agricoles, d’autant que l’on supprimera aussi les subventions, mais en essayant de créer un prix plancher régulateur afin que les fluctuations de l’offre et la demande ne soient plus l’incertitude des revenus agricoles.

Subventions inutilisées que l’on pourra donner aux pays en difficultés afin d’aider une agriculture locale stabilisant ainsi les populations. Et puis, dans nos sociétés de pays développés, il faudra sortir du consumérisme à tous grain et redonner la place principale à l’alimentation. Il est évident qu’en consommant moins de téléphones portables on pourra s’offrir des produits agricoles plus onéreux, mais payés à leur juste valeur. D’ailleurs, le bien vivre est, sans doute, plus dans la convivialité d’une bonne table que dans la communication individualiste d’un téléphone portable sonnant de façon intempestive.

En outre, avec une agriculture paysanne non productiviste on pourra envisager d’autres cultures que le maïs, on pense de suite au sorgo beaucoup moins demandeur en eau et pourtant un excellent produit nutritionnel pour le bétail, sans oublier la luzerne qui a fait ses preuves depuis longtemps. Il s’agit donc bien d’un problème de volonté sociétale sortant l’agriculteur du carcan tissé par l’industrie agrobusiness capitaliste. Malheureusement, chez beaucoup d’agriculteurs englués intellectuellement dans le système, l’esprit colonisé par la pensée unique, le raisonnement est tout autre et le productivisme reste le moteur de leurs façons de faire.

Alors ça continue ! La dernière phobie des agriculteurs du sud Vendée se sont des réserves d’eau avec bâches plastiques, implantées en plein milieu de plaine, et remplies en période hivernale sous prétexte qu’il y a un surplus d’eau. Ce qui est déjà une totale méconnaissance de l’hydrogéologie puisque ce qui sera prélevé en hiver dans les nappes manquera inéluctablement en période sèche. C’est même aussi une erreur monumentale de vouloir par ce moyen limiter aussi les crues qui sont absolument nécessaires à l’équilibre écologique, au maintient de la biodiversité de nos territoires.

Le pire sans conteste, c’est que ces réserves sont en grande partie construites avec des financements publics. Prenons l’exemple de la future bassine d’Auzay, 215 000m3 sur 4hectares (bassine étant leur surnom), qui va voir le jour au sud de Fontenay-le-Comte. Le coût total sera de 715 000€. Financement réparti comme suit, agence de l’eau 258.000€, conseil général : 193.000€, à la charge du demandeur : 264.000€. Force est de constater que la part public est d’environ les deux tiers car les subventions de l’agence de bassin viennent du prélèvement de 5,5% que l’on lit sur nos factures. Mais le comble, c’est que ces sommes faramineuses ne concernent que quatre familles d’agriculteurs, seuls utilisateurs de la bassine.

D’ailleurs on peut se livrer à un petit calcul encore plus significatif. Il y a dix bassines dépendantes du syndicat mixte du Marais Poitevin, bassin Vendée-Sèvre-Autize, pour un volume total de 3,3 millions de m3. On estime que l’irrigation en utilisera 80% ce qui fera une consommation de 2,6 millions de m3 annuellement pour irriguer le maïs d’une cinquantaine d’agriculteurs. Pendant le même temps un habitant du département de Vendée consommera environ 45m3 (ce sont les statistiques), comme la Vendée compte environ 600 000 habitants, la consommation totale des Vendéens sera approximativement de 27 million de m3. Ce qui veut dire qu’une cinquantaine d’agriculteur consommera presque 10% de la consommation de 600 000 personnes…Il y a quand même un problème !

Tout ceci est encore plus aberrant lorsque l’on sait que dans toute cette partie du territoire, sud-Vendée, sud-Deux-Sèvres, Charente-Maritime, l’accent est mis sur la production de céréales afin de faire de la Palice un port céréalier remplaçant le bois exotique qui ne sera plus importé. Donc, on force sur la mondialisation des transferts de céréales au détriment de la relocalisation. Ceci pour une poignée de céréaliers qui ne sont déjà pas les défavorisés du monde agricole.

Aidons nos agriculteurs à comprendre qu’ils font fausse route, qu’une autre agriculture est possible, car en détruisant les ressources de la nature ils affament aussi d’autres populations…

Pour mieux comprendre ces problèmes nous proposons la projection, le 15 octobre à 20heures 30 en la Salle communale de Sainte-Christine sise près de Benet (85490), du film : « Pour quelques grains d’or », suivit d’un débat.

http://le-ragondin-furieux.blo4ever.com

Messages

  • D’accord avec tout cela, en effet, le cycle naturel de l’eau ne devrait pas être interrompu, mais on voit constamment des sources se tarir sans intervention humaine et sans que l’eau ait réellement disparu elle change de direction. Mais les problèmes de la répartition de l’eau et son état de pureté après utilisation me semblent aussi très importants : de toute manière quelle que soit son usage, on la retrouve toujours si elle ne s’infiltre pas directement dans les cours d’eau ou dans les nappes phréatiques, elle tombe sous forme de pluie après évaporation : quelle que soit l’être, l’animal ou le végétal qui s’en servent elle ne se perdra jamais.
    Les organismes vivants ne gardent qu’une infime partie de l’eau qu’ils consomment.