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Madrid mène campagne contre le référendum

Publie le samedi 22 janvier 2011 par Open-Publishing
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Par A Hamid

Lundi, le couple royal espagnol offrait la traditionnelle réception aux membres du corps diplomatique, venus lui présenter leurs vœux à l’occasion de la nouvelle année. Une poignée de mains très protocolaire mais « chaleureuse du roi et de la reine avec leurs invités, suivie parfois d’échanges de quelques courts propos courtois, conformes aux usages diplomatiques.

La vedette du jour au palais royal

Il arrive souvent en pareille circonstance qu’un diplomate ravit la « vedette » à ses collègues lorsque le roi Juan Carlos lui garde la main un peu plus longuement. Ce fut le cas, cette fois, avec l’ambassadeur de Tunisie, très courtisé, dont tout le monde pouvait deviner le sujet de conversation.

Le personnage du jour autour duquel se formait un petit cercle d’« amis » voulant s’enquérir sur la situation qui prévaut dans son pays, ce n’était pourtant pas lui, mais le nouvel ambassadeur du Maroc. Un « diplomate » d’un autre genre objet de regards discrets, voire de chuchotements, dans cette immense salle de réception du palais de la Zarzuela, parce qu’il n’avait aucun trait commun avec celui qui l’avait précédé à ce poste, Omar Azziman, ancien ministre de la Justice dont tout le monde reconnaissait la valeur de diplomate de carrière. Il s’agit du transfuge du Front Polisario, Ahmed Souilem, que le roi Mohammed VI a choisi pour représenter le Maroc en Espagne, voilà plus d’une année déjà, et qui venait à peine de rejoindre son nouveau poste.

Le nouvel ambassadeur « marocain »

Le « Marocain » n’avait pas besoin de se faire rappeler, à travers l’invitation que lui a adressée le protocole royal espagnol, que le port de la redingote ou du costume traditionnel est obligatoire dans cette cérémonie.

« Voilà la mariée ! », annonce un photographe à voix basse, accompagnée d’un petit coup de coude à son confrère, en désignant Ahmed Souilem, portant le costume traditionnel marocain, burnous, chach stambul et babouches de Marrakech.

Une scène qui comporte une dose de comique qui se déroulait sous le regard mi-curieux mi-amusé des diplomates et l’inévitable « commérage » de certains confrères. Indigné par ce spectacle, un autre journaliste qui connut l’ex-diplomate sahraoui quand il « arborait » fièrement la gandoura des Regueibat dans les camps de réfugiés de Tindouf », eut cette méchante réflexion :

« Une marionnette. Il aurait dû être aux côtés de ses confrères à Mahassat ! »

Le roi Mohammed VI avait mis plus d’un an avant d’autoriser Souilem à regagner son nouveau poste à Madrid. Les autorités espagnoles, elles, avaient ressenti un certain malaise à la suite de ce « choix du roi » qui n’est pas fortuit. Le transfuge du Front Polisario est là pour une seule mission :
plaider le plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental. Pour le reste des dossiers qui empoisonnent régulièrement les relations entre Madrid et Rabat (coopération, drogue, immigration, Ceuta et Melilla…), il laisse le chargé d’affaires de l’ambassade marocaine, un diplomate de carrière, s’en occuper.

Lui, sa mission c’est de conduire avec l’aide de la diplomatie espagnole une campagne de propagande pour la promotion du plan marocain. Madrid n’a pas attendu pour cela son arrivée à Madrid, pour commencer ce travail, bien avant l’ouverture du cinquième round des négociations informelles entre le Maroc et le Front Polisario, vendredi à Manhassat, près de New York, sous l’égide des Nations unies.

Négociations à Mahhassat

Des « sources » proches de l’ONU, comme par le passé, se sont voulues optimistes, sans raisons apparentes, disant que l’envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross, reste « confiant » que les deux parties impliquées dans le conflit sahraoui finiront par créer un « climat favorable » susceptible de permettre de dépasser les « grandes difficultés qui paralysent leur dialogue ».

Aucune flexibilité des positions en présence n’est enregistrée puisque, selon les rares nouvelles qui filtraient de cette rencontre à huis clos, Rabat veut toujours imposer son plan d’autonomie comme unique base de négociations alors que le Front Polisario insiste sur le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et le respect de la légalité internationale.

Sur la tenue d’un référendum.

La partie se joue pourtant ailleurs qu’à Manassat. Autour de cette formule-clé, le gouvernement espagnol a sorti cette semaine le grand jeu, en appui bien sûr aux thèses marocaines. La chef de la diplomatie espagnole, Mme Trinidad Jimenez, a fait du porte-à-porte pour que le groupe des « Amis du Sahara occidental »,

tous les pays occidentaux membres du Conseil de sécurité, en dehors de la Russie, pour tenter d’imposer le plan marocain. C’était l’un des objectifs prioritaires de sa visite, la semaine dernière, à Moscou où les autorités russes ont vite compris le jeu auquel se livre le gouvernement socialiste espagnol, à la veille du rendez-vous de Manhassat.

Jimenez : la « douche froide » à Moscou

Avant même qu’elle ne mette sur la table le plan marocain, son collègue russe, Serguei Lavrov, lui demande si le gouvernement espagnol a changé ou non de position sur la question du Sahara occidental. La chef de la diplomatie russe lui rappelle d’emblée que Moscou, pour sa part, n’a pas changé la sienne sur ce conflit et reste toujours attachée à une solution « mutuellement acceptable » par les parties impliquées dans ce conflit, le Maroc et le Front Polisario, « dans le respect du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination » et « conformément aux résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU », autrement dit, la tenue d’un référendum libre. Prise de court, Trinidad Jimenez qui vient d’ordonner l’expulsion de deux « espions russes » d’Espagne, prend une véritable douche froide. Devant les journalistes elle tente de minimiser cet « échec » en soutenant qu’au cours de ses entretiens avec M. Lavrov, « il n’a pas été spécialement question du référendum », dans l’ancienne colonie espagnole mais plutôt des « difficultés et du blocage des négociations autour du problème du Sahara occidental en raison des divergences dans les positions du Maroc et du Front Polisario ».

De retour à Madrid, elle insiste dans une interview à la radio Cadena Cope sur les « difficultés d’un référendum au Sahara occidental ». Après avoir reconnu qu’« il existe, certes, une résolution des Nations unies », comme le lui avait rappelé indirectement M. Lavrov, qui prévoit l’organisation d’un référendum dans l’ancienne colonie espagnole, cette membre du lobby pro-marocain affirme que « même le Front Polisario admet que la tenue d’une telle consultation populaire est plus complexe, aujourd’hui, qu’elle ne l’était il y a 15 ans, en raison des divergences de vues sur les critères d’identification des électeurs ».

Elle laisse entendre donc que le référendum n’est pas la seule technique d’exercice du droit à l’autodétermination au Sahara occidental, et rappelle que son gouvernement s’emploie « activement » dans l’espoir de rapprocher les positions en présence en vue d’un accord entre le Maroc et le Front Polisario » qui serait, a-t-elle conclu, « la meilleure solution ». Toujours sur la base du plan marocain.

« Moi, si j’étais Sahraoui… »

La veille, le ministre espagnol de la présidence, Ramón Jauregui, une autre figure du même lobby, soutenait devant la presse que le plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental présente plus d’avantages que le modèle d’autonomie en Catalogne.

Il osera même « donner un conseil aux Sahraouis » en les invitant à « accepter cette solution qui vaut mieux que la souffrance de trois décennies dans le désert ». M. Jauregui a déjà été vivement critiqué par les partis d’opposition et la société civile pour avoir tenu ces mêmes propos au lendemain de la prise d’assaut brutal du camp de Gdeim Izik, le 8 novembre 2010.

Pour les responsables sahraouis, le vrai blocage des négociations de Manhassat est bien sûr français mais aussi espagnol.

Le délégué du Front Polisario à New York, Ahmed Boukhari, a averti que « le gouvernement espagnol cherche à renforcer la position du Maroc par ce genre de déclarations », donc à faire pression sur Manhassat.

« Le mieux pour le gouvernement espagnol est de savoir parfois observer une certaine retenue », dira-t-il, ce qui conduira le Parti socialiste espagnol à adresser une invitation au Front Polisario pour une « réunion de haut niveau », le mois prochain. Des explications en perspectives.

A. Hamid

Le Temps d’Algérie, 22/01/2011

Messages

  • L’actuel ambassadeur du Maroc en Espagne si je ne me trompes est un des fondateurs du Polisario ? Dorénavant tout le monde sait bien que si le régime algérien sombre le polisario disparaitra aussitôt, puisque c’est une création des militaires algériens pour contrer le Maroc qui lui ne lâche rien et dispose d’un front uni à l’intérieur sur cette affaire qui ne semble pas faiblir ou douter depuis ! Le referendum autrefois accepter par tous s’est révélé en fait irréalisable !!!