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Comme à Riace (Calabre),faire revivre nos villages grâce à l’immigration

Publie le dimanche 1er mai 2011 par Open-Publishing
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Riace : Un village italien revit grâce à l’intégration des étrangers.

Une aventure réussie, qui dure et qui pourrait inspirer nos communautés villageoises mourantes :

des nouveaux venus, compétents dans les domaines de l’agriculture, du bâtiment, du commerce, et ne demandant qu’à travailler !

Comment se fait-il que les médias en parlent si peu ?

Serait-il plus vendeur de créer des images d’invasions de hordes délinquantes ?


Un havre en Calabre

Des 700 habitants que compte Riace, dans le sud de l’Italie, 230 sont migrants. Venus d’Afrique et du Moyen-Orient, ils ont relancé la vie économique de ce bourg déserté.

DINO DIMEO raconte (extraits) : Des 700 habitants que compte Riace, dans le sud de l’Italie, 230 sont migrants. Venus d’Afrique et du Moyen-Orient, ils ont relancé la vie économique de ce bourg déserté.

Le village de Riace revit. Ses ruelles étaient désertes, ses maisons abandonnées, la petite commune qui surplombe l’aride côte sud de la Calabre sombrait dans le silence et la mort, sous un soleil de plomb. Depuis six ans, les commerces ont réouvert, les écoles se sont remplies, les places se sont animées. Riace revit grâce à des migrants échoués sur les côtes italiennes, fuyant la misère d’Afrique et du Moyen-Orient.

Sur ces collines qui dominent la mer Ionienne, la terre est grise comme du ciment, le soleil violent, hostile. « C’est un peu comme chez moi ici. Je m’y sens bien », dit Mari, une Afghane de 45 ans, brodant, assise sur un muret à l’ombre de l’église. Comme elle, ils sont 230 migrants désormais installés à Riace, qui compte quelque 700 habitants. Iraniens, Palestiniens, Afghans, Somaliens, Erythréens, ils sont arrivés, pour la plupart, par la mer, clandestinement. Ils sont devenus des immigrés, en règle, et ont choisi Riace. « Ils viennent presque tous du camp de Crotone, à une centaine de kilomètres d’ici, explique Tonino, garde municipal. C’est là que les autorités leur délivrent des papiers. »

De l’autre côté de la ruelle, Giacomo, retraité, campé au frais dans l’ombre de sa porte, lance : « Ici, tout le monde cohabite ! Chrétiens, musulmans, Italiens… » Une vie en équilibre qui doit beaucoup à Domenico Lucano, 52 ans, élu maire en 2004 sur le slogan « Un’altra Riace è possibile », « un autre Riace est possible ». Comment ? En aidant les centaines de clandestins qui débarquent sur les côtes sud de l’Italie à s’installer dans le bourg. C’était son projet, « c’est notre solution », dit-il aujourd’hui.

Cette partie de la Calabre n’a pourtant rien d’un paradis. C’est une région sauvage à la beauté esquintée par le chômage et l’incurie politique. Sur des kilomètres de plage, les carcasses de maisons en béton s’alignent, plantées dans le sable, inachevées. Dans ce sud italien qui vit sous l’emprise d’une administration vérolée par la N’drangheta, la mafia locale, on cultive tout sauf l’accueil. En 2009, les habitants de Rosarno, à 50 kilomètres de Riace, se sont mondialement illustrés en lançant une « ratonnade » contre des immigrés venus faire la cueillette des oranges.

Mais Riace semble appartenir à un autre monde. Le bourg perché a vécu l’exode d’après-guerre, puis celui du choc pétrolier. La majorité de ses habitants est partie vivre en Amérique du Sud, aux Etats-Unis, au Canada… Quant aux rares familles restées au pays, elles ont préféré déserter ce piton rocheux pour s’installer sept kilomètres plus bas, à Riace Marina, au bord de la mer.

Le village des hauteurs se meurt en ce mois de juillet 1998, lorsqu’une centaine de Kurdes échouent sur la plage de Riace, là même où en 1972 furent découvertes deux statues grecques en bronze datant du Ve siècle avant J. -C. Domenico Lucano est témoin de l’événement. Il rêve de leur donner asile, comme avait tenté de le faire le village voisin, Badolato. Lorsqu’il est élu, il fait de l’accueil des immigrés sa priorité. Il appuiera son action sur l’association Città Futura qu’il a fondée dès 1999, inspiré par Longo Maï, célèbre communauté alternative française issue du mouvement néorural d’après Mai 68. Città Futura s’est fixée pour mission de développer l’artisanat local et les « liens interculturels ».

Premier défi pour le nouveau maire, fournir un logement aux migrants : « J’ai contacté les propriétaires des maisons abandonnées pour leur demander si je pouvais y loger des immigrés, explique-t-il. Avec leur accord, je les ai réquisitionnées, et on a tout remis en état. » Il faut ensuite aider les migrants à s’installer.

Alfonso Di Stefano, 55 ans, membre de la Rete antirazzista siciliana (« réseau antiraciste sicilien ») est bien rodé à l’assistance aux clandestins. Il conseille souvent Domenico Lucano. « En général, les immigrés et leurs familles restent à Riace deux ou trois mois en attendant de pouvoir se rendre ailleurs en Italie ou en Europe, dit-il. Ils apprennent l’italien, parfois un métier. » Certains travaillent dans les ateliers d’artisanat de Città Futura, puis quittent le bourg au bout de quelques mois. D’autres, à l’inverse, choisissent d’y rester.

Ainsi Issa, un Afghan de 39 ans, arrivé il y a huit ans. « J’ai travaillé dans les filatures dans le nord de l’Italie puis j’ai fait la collecte des olives dans le sud, dit-il. Mais c’est ici que j’ai choisi de rester pour apprendre mon nouveau métier de potier. » Shukri, 23 ans, est somalienne. Elle a quitté Mogadiscio il y a deux ans alors qu’elle était enceinte de sa fille Anna. « Je suis passée par le Kenya, puis en voiture jusqu’en Libye, raconte-t-elle. De là, on a pris une embarcation jusqu’à Lampedusa »,une île au sudde laSicile. Shukri sait qu’elle aurait pu y rester : 500 immigrés clandestins disparaissent en Méditerranée chaque année. Bien intégrée à Riace, elle travaille au restaurant Donna Rosa géré par Città Futura.

La maison de l’association, une bâtisse de deux étages en plein cœur du bourg, baptisée du nom de Giuseppe Puglisi, un prêtre du quartier Brancaccio à Palerme assassiné par la mafia en 1990, ne désemplit pas : curieux, touristes, militants de tous bords. Mona, une Libanaise arrivée en 2006, se démène pour toutes les formalités administratives des migrants, appelle médecins et hôpitaux, alerte le maire quand il faut donner un coup de pouce à une affaire délicate.Et distribue des bons aux familles « pour qu’elles puissent vivre dans le village », précise Mona.

Côté finances, l’association affiche des comptes presque à l’équilibre grâce aux subventions gouvernementales et européennes qui octroient à Riace 20 euros par jour et par réfugié. Grâce aussi à la Banca Etica, qui accorde des facilités, et au « tourisme éthique et solidaire » pour lequel la commune fait campagne : l’association propose à la location saisonnière une vingtaine des gîtes, soit une centaine de lits, ouverts dans des maisons autrefois abandonnées et à présent rénovées. Cet été, Riace affichait complet.

La médiathèque transformée en mosquée

Début août, deux jours avant le ramadan, une délégation menée par Sari et Sameh, deux Palestiniens qui ont fui l’Irak de l’après-Saddam, s’est rendue à la mairie pour demander un lieu où prier. La commune leur a donné les clés de la médiathèque, devenue depuis une minimosquée. La transformation n’a suscité, dans le village, aucune protestation. Et certainement pas l’opposition des 40 natifs de Riace salariés de l’association, travaillant avec les immigrés dans les divers ateliers et dans les chambres d’hôtes. « En générant ces emplois, j’ai permis à 40 familles italiennes de rester ici. Sinon, elles aussi auraient quitté Riace », insiste le maire.

La commune, côté mer et côté montagne, compte 1 780 âmes. Place de la mairie, dans le vieux bourg, une vingtaine de personnes - enfants et adultes - attendent l’autocar qui dessert le bord de mer. Des Palestiniens, des Somaliens. Assis au bar à deux pas, quatre retraités les saluent. Ils appellent les gamins par leur prénom. « Il ne restait plus que des vieux ici. Aujourd’hui, il y a ces enfants », continue Tonino.

Depuis, la réputation de Riace a dépassé les frontières de la péninsule. Wim Wenders y a tourné son court-métrage en 3D Il volo, l’histoire d’un jeune Afghan qui refait sa vie dans la région. Et pour ceux qui continuent d’affluer sur les côtes calabraises, le village est devenu une destination de prédilection. Cet été encore, un yacht battant pavillon turc a débarqué 150 passagers près de Riace Marina. « Je ne sais pas qui a organisé le voyage, s’interroge Domenico Lucano. Je sais juste qu’ils sont arrivés en très bonne santé, frais comme des touristes . A 1 000 euros par tête,c’est la moindre des choses ! »

Il y a deux mois, Lucano a été surpris d’apprendre qu’il figurait sur la liste des candidats potentiels pour recevoir le World Mayor Prize, une distinction qui doit être décernée le 7 décembre. « Je suis devenu un petit phénomène politique. » Qui, dans la région, doit en déranger plus d’un. « Mais j’ai développé des anticorps contre la N’drangheta, poursuit-il. Je n’ai pas peur du crime organisé. Même s’ils ont tué les chiens de mon fils. La politique, aujourd’hui, me paraît bien plus dangereuse. Mais pour l’instant, on me fiche la paix. »

http://www.liberation.fr/monde/01012300892-un-havre-en-calabre

Messages

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    « Quando è nata l’Associazione, la prima cosa, che abbiamo pensato, è stata quella di dar vita ad un villaggio multiculturale, dove fosse facile parlare la stessa lingua, per poter tutti insieme andare avanti.

    Quando abbiamo cominciato, sentivamo il bisogno di forze, energie, che venissero da fuori, che rispolverassero vecchie usanze culturali della nostra terra, le più autentiche e positive, legate all’accoglienza e all’ospitalità. E’ stato un cammino felice, aiutare la gente, che, in cerca di una possibilità di cambiamento, si è trovata a passare di qua, è stato un cammino fruttuso per l’Associazione, che è cresciuta e si è ingrandita grazie a loro.

    Oggi siamo un centro di accoglienza per rifugiati e richedenti asilo, un’alternativa alla logica assistenziale di favore malconcesso dei CPT e, credo, un tentativo di fermare l’espansione dell’odierna società globalizzata, che richiama gli uomini a spostarsi, per le differenze sociali ed economiche, sempre più grandi fra nord e sud.

    Oggi spero di poter parlare la stessa lingua di questi uomini, di poter scambiare con loro qualche parola, che non sia danaro, ma diritto e dignità. »

    Domenico Lucano (le maire de Riace)

    « Riac...cendi il borgo ! » (un jeu de mot pour le nom de la fête du village (il borgo) de Riace :

    accendi= allume

    Riaccendi = rallume