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En Italie, Berlusconi est menacé par le délitement de sa majorité

par Guillaume Delacroix

Publie le lundi 7 novembre 2011 par Guillaume Delacroix - Open-Publishing

Le FMI a placé l’Italie sous tutelle. Attendus à Rome le 15 novembre, ses experts feront un état des lieux des finances publiques tous les trois mois. Ils seront devancés cette semaine par une mission de contrôle de la Commission européenne.

Les amis de Silvio Berlusconi ont passé leur week-end à faire des comptes d’apothicaire. Plus personne ne sait, à Rome, si le « Cavaliere » dispose encore d’une majorité au Parlement. Deux députés ont quitté son parti, le Peuple de la liberté (PDL), pour rejoindre l’opposition centriste. Quatre menacent d’en faire autant, six autres affirment ne plus vouloir voter les lois... Alors qu’une semaine décisive démarre pour l’Italie, la droite au pouvoir peut compter à la Chambre des députés sur 305 à 315 voix, soit au mieux la moitié des 630 sièges. « Nous n’avons plus la majorité absolue », ont expliqué les dirigeants du PDL à Silvio Berlusconi vendredi soir, dès son retour du sommet du G20. Premier test demain, avec le retour de la loi d’exécution budgétaire devant clôturer les comptes nationaux de l’année 2010, texte repoussé mi-octobre à cause de l’absentéisme sur les bancs de la droite. S’il évite cette fois l’humiliation, le président du conseil n’aura ensuite qu’une dizaine de jours pour respirer. Car la semaine prochaine, les mesures promises à ses partenaires européens pour éviter une contagion de la crise grecque feront l’objet d’un vote de confiance.

« Un acte de trahison »

Deux secrétaires d’Etat font part de leur inquiétude. « Il est clair qu’avec une majorité aussi fragile, cela ne peut pas durer longtemps », a déclaré Guido Crosetto (en charge de la Défense). Pour Vincenzo Scotti (Affaires étrangères), « le problème n’est plus [de dire] oui ou non à Berlusconi, mais d’éviter l’écroulement du système ». Dans un communiqué publié samedi soir, l’intéressé a écarté toute idée de démission : « Je suis désolé de décevoir les nostalgiques de la IreRépublique lors de laquelle les gouvernements duraient en moyenne onze mois. » Et hier, lors d’une intervention dans un congrès de partisans, il a dénoncé les défections essuyées dans son camp, « un acte de trahison envers le pays », selon lui.

Humilié, Silvio Berlusconi l’aura en tout cas été au sommet de Cannes, soulignent les commentateurs de manière quasi unanime. Il a eu beau assurer que son pays allait bien - « Chez nous, les restaurants sont pleins », a-t-il fait valoir -l’Italie a été placée sous tutelle du Fonds monétaire international (FMI). Officiellement à la demande du « Cavaliere », ce que certains interprètent comme un coup politique permettant, sur la scène intérieure, d’invoquer « l’intérêt national » pour endiguer l’hémorragie des parlementaires de droite. Officieusement, le rôle confié au FMI est le résultat de la pression exercée par Nicolas Sarkozy, Angela Merkel et Christine Lagarde, qui s’inquiètent de la non-concrétisation des promesses de réformes, notamment en matière de retraites et de droit du travail. La présidente du FMI n’a d’ailleurs pas manqué de souligner « le manque de crédibilité » de l’Italie qui va ainsi être soumise « au test de la réalité ». Avant l’ouverture de la réunion du G20, elle a même proposé à Rome une ligne de crédit exceptionnelle de 44 milliards d’euros, mais Silvio Berlusconi l’a aimablement repoussée.

Fébrilité des marchés

Concrètement, le numéro deux du FMI, l’américain David Lipton, est attendu sur les bords du Tibre le 15 novembre. Il sera chargé de faire un rapport, tous les trois mois, sur l’assainissement des finances publiques. De son côté, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a décidé d’envoyer dès cette semaine une mission d’évaluation, afin d’avoir une idée de la situation réelle de la troisième économie de la zone euro d’ici à la prochaine réunion de l’Ecofin, programmée pour le 29 novembre. Les marchés, eux, restent très fébriles. Vendredi, le taux auquel l’Italie emprunte à dix ans a fait une pointe à 6,42 %, record absolu depuis le lancement de la monnaie unique. Samedi, un entrepreneur toscan s’est payé une pleine page dans le « Corriere della Sera » pour appeler ses compatriotes à acheter massivement des bons du Trésor et faire ainsi retomber la fièvre.

http://www.lesechos.fr/economie-politique/monde/actu/0201730381828-en-italie-berlusconi-est-menace-par-le-delitement-de-sa-majorite-244928.php