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Combattre Marine Le Pen sur les retraites... un défi à Mélenchon !

par Antoine (Montpellier)

Publie le lundi 30 janvier 2012 par Antoine (Montpellier) - Open-Publishing
13 commentaires

Sujet sensible s’il en est les retraites ont été et restent l’enjeu d’un bras de fer crucial avec les représentants du capital qui veulent la peau du système par répartition. C’est à une attaque en règle que nous assistons depuis la réforme Balladur de 1993 jusqu’aux attaques contre les retraites des fonctionnaires ou les régimes spéciaux, contre l’âge légal à 60 ans ou encore contre la durée de cotisation fixée à 37,5 années. Rien n’y a fait ni le mouvement social de 2003, ni celui des cheminots de 2007 ni celui de 2010 ; nous ne reviendrons pas sur tout ce qui, y compris et même essentiellement, du côté syndical, a réussi à mettre des bâtons dans les roues d’ une mobilisation puissante mais dépourvue d’autonomie pour chercher le meilleur moyen de lever les obstacles, se développer et se porter candidate à infliger une raclée aux terroristes antisociaux de la droite.

Qu’on le veuille ou non, qu’on le regrette (j’en suis) ou pas, c’est sur le terrain électoral que, momentanément et sans exclure une relance des luttes, se trouve déporté ce qu’il faut bien appeler, à défaut d’offensive, la résistance aux démantèlements des droits sociaux dont celui à une retraite décente. Et sur ce terrain-là, comme un fruit mûr tombé des désillusions engendrées par l’échec du mouvement social mais aussi, plus profondément, plus structurellement, serait-on tenté de dire, par le rejet d’un jeu politicien qui voit depuis 1983 la droite et la gauche converger, en alternance, dans le matraquage libéral du monde du travail, eh bien, comme résultante de ces désastreux effets politiques et sociaux cumulés, nous voyons s’affirmer une prétention de l’extrême droite à incarner...la résistance ouvrière et populaire. Rien que ça !

Le sondage grandeur nature de l’élection présidentielle nous donnera une idée de l’ampleur de ce qui, de toute façon, est une menace majeure pour les travailleurs. Tout doit être fait pour "casser" dès maintenant la logique usurpatrice de la colère et de la défiance ouvrières mise en mouvement par Marine Le Pen et son Front National. Pour construire ce positionnement "populaire", celle-ci n’a pas hésité a faire subir une mue profonde au socle de références traditionnel de ce parti : il n’y a désormais, par exemple, pas plus laïque ni plus féministe que Marine Le Pen avec, bien sûr, un ciblage des musulmanes voilées et plus généralement le développement d’une islamophobie qui déborde largement les frontières de l’extrême droite (1).

Il en va de même des retraites : la récente entrevue accordée par Jean-Marie Le Pen à France 3 (2) permet de bien mesurer le changement radical opéré. Le père avoue ne pas comprendre que sa Marine ait laissé tomber son positionnement en faveur de la retraite à 65 ans pour celui d’une retraite à 60 ans...avec ...40 ans de cotisation. Et là on se prend à penser : le FN double donc le PS sur sa...gauche (pas difficile au fond) puisque Hollande est partant pour une retraite à 60 ans avec les 41,5 annuités imposées par la droite, décotes comprises. Mais il y a mieux encore : il se place sur le même terrain que le ... Front de Gauche dont nous avons montré (3) que, favorable à un retour aux 60 ans, il accepte cependant (sans le déclarer à tue-tête !) un alignement bien réel sur les 40 ans de cotisation. 40 ans de cotisation qui, nous le savons bien, font des 60 ans une pure fiction car, à cet âge-là, la majorité des salariés n’auraient pas leur 40 annuités et se verraient donc dans l’obligation, sous peine d’avoir une retraite incomplète, de travailler plus longtemps. Comme la droite et le PS le veulent !

Alors les choses sont simples : nous sommes nombreux, très nombreux à la gauche du PS, à vouloir porter le fer politique contre le FN. Mais il faut pour cela partir de l’idée que ce danger est né, comme on l’a dit plus haut, pour une part essentielle, de la compromission de la gauche dans les attaques contre les salariés et les couches paupérisées. Et que donc il y a rien moins qu’une reconquête par la gauche du monde du travail à entreprendre qui passe par la défense intransigeante des droits sociaux. En matière de retraite cette défense ne peut aucunement entériner l’allongement de la durée de cotisation imposée par Balladur et Fillon qui participe d’un appauvrissement généralisé du salaire "continué" (les retraites telles que les appelle Bernard Friot) du peuple travailleur. Contrer efficacement et la droite, et l’extrême droite...et le social-libéralisme, cela passe certes nécessairement par un retour aux 60 ans mais, pour que ce retour soit bien le signe de ce qu’il y a peu on appelait une mesure de classe, il doit s’accompagner d’un retour aux 37,5 années de cotisation (avec probable abaissement à 35 années comme le propose Gérard Filoche [4]) qui prévalaient avant l’agression balladurienne puis fillonesque.

Il faut donc le dire clairement : Jean-Luc Mélenchon et les dirigeants du Front de Gauche, qui se disent déterminés à être les meilleurs opposants à l’extrême droite, ne peuvent plus se retrouver sur, de fait, les mêmes positions 60 ans/40 annuités que le Front National, qui plus est, en jouant d’un inadmissible faux-fuyant sur ces 40 annuités qui ne figurent dans aucun de leurs documents programmatiques. (5) Il n’est pas possible de faire ce cadeau confusionniste à souhait à cet ennemi des travailleurs : il y a incontestablement de la radicalité (et de la clarté) à mettre en oeuvre pour éviter de jouer "collé de près" avec les socialistes, un "joué collé" (40/41,5) qui est le meilleur aliment pour la montée d’un FHaine en passe de réussir le tour de force de faire oublier cette haine foncière qu’il a pour le travail et de commencer à instiller impunément de la haine dans le peuple contre les immigrés, spécialement arabes et musulmans !

Alors chiche, camarades du Front de Gauche, si on jouait vraiment à gauche sur 37,5 (35) annuités/60 ans/75 % du meilleur salaire, avec la garantie que le FN ne pourra pas suivre et avec l’immense avantage de vous mettre à distance de Hollande parce qu’il le faut bien pour être à gauche toute et ne pas relancer la machine à perdre le peuple au profit de l’extrême droite ? Avec la gratifiante cerise sur le gâteau que cela vous rapprocherait d’une unité avec le NPA qui, lui, est toujours clairement sur 37,5/60/75 ! Vous imaginez, avec dans la foulée quelques autres réajustements, la révolution que cela serait de brandir avec le NPA le drapeau d’une défense intransigeante des retraites ouvrières, de l’interdiction des licenciements comme cela avait été possible en Languedoc-Roussillon aux régionales de 2010, etc. (6) ? Il faudrait revoir les candidatures de Mélenchon et de Poutou ? Ce ne devrait pas être le plus difficile même à 3 mois de l’élection ! A vérifier quand même ! Mais on n’a rien sans rien...

(1) E Badinter, J Baubérot et le retour de la question laïque par temps de forcing islamophobe et "féministe" du lepénisme

(2) Quand Le Pen désapprouve sa fille sur la retraite à 60 ans

(3) Front de Gauche et retraites : Mélenchon est pour les 40 ans de cotisation (vidéos) et Retraites. Hollande, Mélenchon ou le syndrome de la paille et de la poutre dans l’oeil (gauche) de l’autre

(4) 21. Prétendre imposer – sur le papier – 41 ou 42 annuités, le SEUL résultat, puisque la moyenne des salariés ne peut cotiser que 36 ou 35 annuités, c’est 6 ou 7 ans de décote.

22. Comment admettre d’allonger des annuités qui ne seront jamais effectuées et donc baisser les plus petites retraites ? Reculer l’âge de départ en retraite à pour seul effet pratique de baisser le niveau des retraites réintroduisant la misère chez les vieux.

23. Il faut prendre comme référence le nombre d’années réellement cotisées dans la vie réelle et non pas l’allongement aléatoire de l’espérance de vie.

24. Par exemple, si la moyenne réelle des annuités cotisées dans la vie réelle des salariés est de 35 annuités, la référence retenue pour une retraite à taux plein doit être de 35, si elle est de 36 cela doit être 36, si elle monte à 37, cela doit être 37…

50 arguments pour le droit à la retraite à 60 ans sans décote !

(5) Aucune échappatoire n’est possible du côté d’une suppression des décotes proposée par le Front de Gauche. Cette suppression annulerait une surpénalité bien réelle imposée à ceux qui n’auraient pas leurs annuités mais elle ne supprimerait pas la pénalité d’avoir à partir à 60 ns avec une retraite incomplète ou d’avoir à travailler (3, 4 ans,...?) au-delà de 60 ans pour avoir une retraite pleine ! Un front de gauche ne peut tout de même pas viser à faire juste un peu mieux que le FN tout en laissant encore bien mal en point l’accès à la retraite !

(6) Programme, tracts et circulaire de la liste A gauche Maintenant !

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Combattre Marine Le Pen sur les retraites...un défi à Mélenchon !

Clarté à gauche pour (com)battre la droite

Messages

  • Quand tu vois que notre ex camarade Husson qui connaît bien ces questions roule sans honte pour Mélenchon, on est plus dans l’argumentaire mais dans un choix politique.

    Il serait temps que le NPA appelle un chat un chat : nous ne sommes pas dans le même camp que Mélenchon qui est un républicain franchouillard et pas un demi révolutionnaire qu’il faut faire évoluer.

    On continue dans la même erreur : Demain ils vont se rallier au PS ! ( et de cela tout le monde s’en fout) Alors que l’argument devrait être : un politicien qui a soutenu 30 ans de contre révolution sociale ne peut pas avoir notre confiance !

    • Il serait temps que le NPA appelle un chat un chat : nous ne sommes pas dans le même camp que Mélenchon qui est un républicain franchouillard et pas un demi révolutionnaire qu’il faut faire évoluer.

      Juste,

      C’est un social chauvin qui roule pour le capitalisme " à la papa" local, bref un républicain quoi.

    • Oui, je vois l’engagement de Husson avec le FdG. Cela m’attriste aussi.

      Je ne crois pas cependant qu’il faille faire du ciblage de Mélenchon hors pointage précis des limites de son programme : il draine actuellement assez de confiance dans les secteurs populaires pour qu’on tombe dans le panneau de céder à la dénonciation frontale. Elle serait illisible et au bout du compte contre-productive puisque Mélenchon se poserait facilement en victime du sectarisme gauchiste. Il faut renvoyer les gens qui lui font confiance aux contradictions et renoncements du FdG que j’analyse sur les retraites mais il faudrait le faire aussi sur d’autres questions : la laïcité, la dette, les licenciements, etc. Et même ce travail de déconstruction méthodique (enfin, c’est à tenter) du mélenchonisme n’est pas assuré d’être entendu...Les choses sont difficiles mais il faut se coltiner la difficulté. Là non plus, il n’y a pas de raccourcis...

    • Aux européennes nous avions le rapport de force pour demander des comptes au Sénateur maastrichien, mais au nom du "pas d’adversaire de ce côté là" on a attendu que le FDG se démasque ....demain aux régionales.....puis aujourd’hui que le FDG se démasque.... demain au gouvernement...

      Je rappelle qu’aux européennes on a réussi l’exploit d’apparaître comme les méchants anti unitaires au moment même où le PCF pérorait d’un côté "Unité Unité "et de l’autre :

      "Besancenot est un produit médiatique au service de Sarkosy pour diviser et affaiblir la gauche de gouvernement" allant même jusqu’à comparer dans l’Huma ’l’effet LE PEN et l’effet Besancenot" et pour ne pas apparaître sectaire on n’a même pas réagit !

      Conclusion nous apparaissons comme anti unitaire qui ne veulent pas gouverner en prenant le PS comme prétexte

    • Il faut être réaliste.
      Husson, comme la majorité des gens de gauche, est traumatisé par le stalinisme. Il ne se ralliera à une sortie du capitalisme que lorsque celui-ci nous amènera au bord de la barbarie.

      L’important, c’est de constuire l’alternative révolutionnaire, parti et projet d’émancipation, socialiste, pour les temps qui approchent.

  • en réalité il faudrait pour être encore plus révolutionnaire car ce que vous proposez c’est seulement revenir à ce qui a déjà existé non ?
    c’est la retraite à 50 ans avec 85 % du salaire pas en dessous de 2000 euros en fait une réelle répartition des richesses et du travail.
    plus de patrons plus d’actionnaires l’autogestion la réapropriation de l’outil de travail par les travailleurs eux mêmes .
    ça c’est révolutionnaire et très loin de toutes les propositions actuelles .

    là le voilà le vrai défi .

    Pierrot CGT_OM

    • C’est en effet le défi actuel et futur de la classe ouvrière pour répondre à l’affrontement de classe que lui impose la bourgeoisie spéculative et actionnariale. Malgré des dirigeants syndicaux transis et apeurés devant cette crise du capitalisme la prise de conscience se fait jour après jour ,élection Présidentielle ou pas on perçoit déjà ce renouveau de prise de conscience de nos ouvriers à Fralib et ailleurs .Un tsunami se prépare dans les entrailles de cette classe fondamentale pour noyer le capitalisme à jamais .

      Bernard Sarton ,section d’Aubagne

    • On peut toujours être plus révolutionnaire. Pas de problème, vos propositions doivent être mises sur la table et assumées par le mouvement social, s’il le juge bon. Il reste qu’en l’état actuel des choses on peut, de façon transitoire, batailler déjà pour neutraliser les accommodements fillonesques du PS et du FdG sur les retraites : donc proposer un retour aux 37,5 ou un abaissement à 35. Sur une base de 60 ans comme âge égal : si un mouvement pouvait s’amorcer là-dessus, et s’il était capable de gagner en puissance, il n’est pas exclu qu’il réclame mieux et plus. C’est connu, c’est en marchant qu’on avance et qu’on peut espérer aller plus loin !

    • "assumées par le mouvement social, s’il le juge bon"

      le mouvement social aujourd’hui peine à démarrer pour ne pas dire qu’il est plutôt moribond et ce depuis l’echec de la bataille contre la réforme des retraîtes de 2010 face à un autisme du gouvernement mais surtout face à un attentisme des directions syndicales tel la CGT qui n’ont pas voulues entrer dans la grève générale et de part là même ont laisser pourrir la situation .
      Alors si mouvement social il doit y avoir c’est sans la direction d’une intersyndicale de service qui ne cherche qu’à négocier des miettes au patronat .
      il n’est plus temps de négocier il est seulement temps d’exproprier de dégager cette vermine bourgeoise qui parasite notre conscience, nos vies .
      le capitalisme c’est comme un cancer et on ne négocie pas avec le cancer on se bat ou on crève .
      Alors la stratégie c’est la grève générale sans concession , l’expropriation sans compensation , l’autogestion sans patrons .

      pierrot CGT_OM

    • Tout à fait d’accord avec pierrot !

      Le manque de perspectives audacieuses de la part des organisations syndicales et partis de gauche, contribue à détruire ce qui reste de sentiments d’appartenir à la classe des exploités et nourrit le nationalisme.

      Les mouvements les plus radicaux d’aujourd’hui (mis à part les libertaires et quelques groupuscules marxistes) se bornent à préconiser quelques recettes Keynesiennes. Ces recettes n’ont été qu’une parenthèse de l’histoire du capitalisme pour éviter justement qu’il ne s’effondre, et la parenthèse elle est refermée.

  • Je profite de cette remarque au sujet du programme de JL Mélenchon (remarque, avec laquelle je suis d’accord) pour signaler un autre manque de ce programme, il s’agit de la laïcité. Et là aussi, Me Lepen va lui tailler des croupières à moindre frais. Là aussi, il est faiblard et se laisse emporter par le risque (injustifié) de dénonciation de "racisme et islamophobie" par les docteurs de la "bonne pensée" qui ne sont ni plus ni moins que les conseillers de M Hollande (je pense à Terra Nova par exemple). Ce JL mélenchon manque un peu de courage. A noter que l’inscription de la laïcité à la Constitution n’est pas suffisante en soi, si nous n’abrogeons pas le régime spécifique dont bénéficie l’Alsace et la Moselle et si nous n’interdisions pas définitivement tout finacement direct ou indirect des cultes quelqu’ils soient pas les collectivités locales ou territoriales ; il y a du boulot pour qui veut enfin bien faire et clore le débat (je ne parle pas des passes-droits ou autres avantages accordés sous la pression de goupes communautaro-religieux).