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Bolkestein = III-29

Publie le jeudi 3 mars 2005 par Open-Publishing
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Bolkestein = III-29

VUE par la presse étrangère, la révision constitutionnelle votée ce lundi par le Parlement réuni en Congrès est perçue comme un peu ridicule, voire grotesque.

Le Financial Times ironise sur la « rhétorique grandiloquente » de Raffarin déclarant : « Ce rendez-vous avec l’histoire n’est pas un rendez-vous partisan. L’Europe n’est pas de droite. L’Europe n’est pas de gauche. L’Europe est notre futur. Elle est notre destinée. » L’International Herald Tribune souligne qu’au nom du Parti socialiste, Jack Lang est venu à la rescousse de Raffarin, affirmant : « Un non serait une négation de nous-mêmes. La France a besoin de l’Europe et l’Europe a besoin de la France » (1).

Tous soulignent le fossé entre la pompe de Versailles et la réalité de ce qui se passe dans le pays. Bien que « l’UMP au pouvoir et l’opposition socialiste fassent campagne pour le oui (...), les analystes craignent que le mécontentement général visà- vis de la politique gouvernementale fasse basculer le résultat du référendum », souligne le Financial Times. Tandis que le Herald met en rapport l’issue du référendum avec « le climat social, (qui en France) n’a cessé de se tendre dans les dernières semaines ».

Elle est là, la réalité. Travailleurs et jeunes sont conduits chaque jour davantage à la mobilisation directe, face aux coups destructeurs qui les frappent. D’où viennent-ils, ces coups, sinon de l’Union européenne et de sa prétendue Constitution ? Est-il possible de dire le contraire ? En particulier, pour qui est partisan de la victoire du non, qu’y a-t-il de plus urgent à faire que d’aider les travailleurs à relier revendications et vote non ?

La CGT, lors de son dernier CCN, s’est prononcée à 82 % pour le rejet de la « Constitution ». Dans un tract qu’elle signe en commun avec la Confédération européenne des syndicats (CES), elle lance cet appel : « Convergeons le 19 mars prochain à Bruxelles. » Parmi les mots d’ordre mis en avant dans ce tract commun, on trouve celui-ci : « Stop à la directive Bolkestein. » Le tract précise : « Si une entreprise de service d’un pays européen obtient un marché en France, elle pourrait appliquer aux salariés qu’elle emploie, non plus le Code du travail français, mais celui du pays où est installé son siège social. Ce projet pourrait viser tous les services : des commerces aux services publics. Cela représente 70 % de l’économie et des emplois. »

On sait que le taux officiel de 10 % de chômeurs vient d’être franchi dans notre pays, on comprend qu’avec la directive Bolkestein, c’est de la destruction en masse des emplois et du démantèlement du Code du travail qu’il s’agit.

Alors, « stop à la directive Bolkestein », tout à fait ! Mais peut-on ignorer que l’article III-29 du projet de « Constitution » prévoit : « Les restrictions à la libre prestation des services à l’intérieur de l’Union sont interdites » ? Donc, avec la « Constitution » européenne, plus besoin de directive Bolkestein ! Cela veut dire qu’un salarié Polonais peut être employé en France pour un euro l’heure, permettant l’alignement de tous les « salaires » sur cette norme, entraînant tous les travailleurs en France (mais aussi dans tous les autres pays d’Europe, y compris la Pologne) dans une spirale sans fin de surexploitation et de destruction de toutes les garanties collectives !

La CES appelle à voter oui à la « Constitution ». De sa part, donc, l’appel à manifester le 19 mars est un appel à manifester, en réalité, pour l’article III-29, c’est-à-dire pour la directive Bolkestein ! Les partisans du non peuvent-ils mêler leurs voix et leurs banderoles à cette démonstration ? Quel travailleur pourrait comprendre qu’on manifeste en mars « contre la directive Bolkestein » avec ceux qui font tout pour qu’en mai elle soit gravée dans le marbre de la « Constitution » européenne ?

L’enjeu est trop grave. Stop à Bolkestein, défense de nos Codes du travail, conventions collectives et statuts, cela veut dire que, sans perdre un instant, nous nous mobilisons et nous mobilisons autour de nous, pour dire : nous votons non, nous voterons non, nous faisons voter non.

DANIEL GLUCKSTEIN _
INFORMATONS OUVRIERES
(1) Au bureau national du Parti socialiste du 22 février, une certaine Barbara Romagnan « a souhaité que le parti n’organise pas sa campagne autour de la défense des services publics et de l’Europe sociale pour éviter “les lendemains qui déchantent” » (compte rendu officiel établi par le Parti socialiste). Peut-on mieux dire que le oui du Parti socialiste est incompatible avec les services publics ?

Messages

  • Je lance un appel à mes camarades de Force Ouvrière.

    Exigeons de notre direction confédérale qu’elle quitte la CES.
    Exigeons qu’elle appelle à voter NON au référendum.

    Recueillons massivement signatures de militants et prise de position d’instances.
    J’espère que le Parti des Travailleurs nous appuiera dans ce combat.

    Pourrions-nous rester adhérents d’un syndicat qui, par son abstention, se rendrait complice d’un tel forfait contre la classe ouvrière ?

    SERRE

    • Première réponse de la cgt-fo Le 19 mars, trois manifestations se tiendront à Bruxelles, dont une de la Confédération européenne des syndicats. Nous avions l’intention d’y envoyer une délégation Force Ouvrière dans la mesure où les slogans à notre connaissance portaient notamment sur les droits sociaux et le non à la directive Bolkestein. Quelle ne fut pas notre surprise quand nous avons découvert sur le site de la CES l’appel pour le 19 mars ! S’y était rajouté le soutien à la Constitution européenne. Dans ces conditions, nous avons décidé de ne pas y participer. Un tel appel s’apparente à une pétition, qui avait pourtant été repoussée par un comité exécutif. Visiblement, nous n’avons pas dû être les seuls à réagir puisque, depuis, le site ne fait plus mention de cet appel ! Le moins que l’on puisse dire, c’est que tout cela est bien ambigu. À Force Ouvrière nous ne confondons pas les citoyens et les travailleurs, c’est aussi ce qui nous permet d’avoir des analyses approfondies, une liberté de comportement liée à notre indépendance. Et de dire à Bruxelles la même chose qu’à Paris. Nous avons donc précisé nos analyses au camarade John Monks. Dans l’immédiat, la priorité est aux revendications et à la nécessité de la journée interprofessionnelle d’arrêts de travail. Même si la dimension internationale de l’action syndicale est de plus en plus nécessaire, l’action dans les entreprises et administrations est incontournable. C’est en effet sur le terrain que sont les salariés.