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Répression : Bilan de 15 jours en Turquie

par Maxime Azadi

Publie le samedi 16 juin 2012 par Maxime Azadi - Open-Publishing

Alors que le gouvernement turc annonce que la langue kurde sera désormais enseignée à l’école publique comme matière optionnelle, une mesure "insultante" et "humiliante" pour les kurdes, la répression sans merci visant tous les opposants se poursuit.

Il ne passe pas un jour sans arrestations massives. Le régime AKP vise tous les opposants, notamment les kurdes qui refusent de se soumettre à la politique néo-fasciste du gouvernement.

Manœuvre insultant du gouvernement sur la langue kurde

Au moment où la répression prend de l’ampleur sans précédent depuis la création de la République turque, le gouvernement AKP tente encore une fois de tromper les kurdes avec des « mesures artificielles » qui ne résolvent aucun problème.

Le gouvernement Recep Tayyip Erdogan qui a déjà perdu toute crédibilité annonce que le kurde pourra être choisi comme matière optionnelle à l’école publique, au même titre que les langues étrangères : anglais, allemand ou français, à partir de 5eme année, alors que cette mesure n’a jamais été parmi les revendications du peuple kurde dont la population est estimée à plus de 20 millions en Turquie.

« La langue maternelle d’un peuple ne pourra jamais être proposée en cours d’optionnel dans les écoles », a dénoncé Selahattin Demirtas, le co-président du principal parti kurde BDP. « La langue kurde devrait être optionnelle pour les turcs à l’ouest de la Turquie afin de mettre fin à la politique d’assimilation forcée » qui dure depuis la création de l’État turc, a-t-il dit.

« Mais si vous voulez satisfaire les revendications du peuple kurde, sa langue maternelle doit être enseignée dès l’école maternelle jusqu’à l’université », au même titre que la langue turque, a-t-il ajouté, affirmant que les kurdes ne sont pas des étrangers.

Il s’agit d’un nouveau manœuvre du gouvernement pour manipuler l’opinion publique, tout en continuant la politique de turquificassion et renforçant la répression sauvage qui a transformé le pays en une prison à ciel ouvert.

Plus de 330 personnes arrêtées en 15 jours

Au moins 333 personnes ont été arrêtées au cours de la première moitié du mois de juin par la police du régime répressif pour des motifs politiques, selon un bilan de l’ActuKurde. Près de la totalité de ces personnes sont kurdes. Six maires kurdes de la province de Van et les responsables locaux du parti kurde BDP ont été arrêtés le 7 juin et dix d’entre eux dont trois maires ont été envoyés en prison.

35 maires en prison

Selon le BDP, plus de 190 élus kurdes dont 35 maires sur 98 et six députés sur 35 sont déjà en prison, ce qui fait la Turquie la plus grande prison du monde pour les élus, tout comme pour les journalistes, les étudiants, les avocats, mais aussi pour les enfants, les femmes activistes et les défenseurs des droits humains. Dans certaines villes comme Sirnak, il ne reste presque plus d’élus !

122 autres étudiants arrêtés

Parmi les personnes arrêtées entre le 1er et 15 juin figurent également 122 étudiants, contre 127 au cours du mois de mai, 116 en avril et 100 en mars, toujours selon le bilan de l’ActuKurde. Près de la moitié des étudiants arrêtés ont été placés en détention.

En outre, les étudiants continuent à faire l’objet de lourdes condamnations. Treize étudiants de l’université de Selcuk de Konya ont été condamnés le 13 juin à une peine totale de 92 ans de prison par un tribunal d’Adana pour propagande du PKK. 29 autres étudiants avaient été condamnés à une peine totale de 346 ans de prisons dans le seul mois d’avril.

240 ans de prison pour sept enfants

Comme les étudiants, les enfants kurdes sont aussi la cible du régime. Le parquet de Mersin a réclamé le 14 juin une peine totale de 240 ans contre sept enfants kurdes, arrêtés début mai, sous l’accusation d’« appartenance à une organisation illégale (PKK) » et de « propagande » en faveur de cette organisation. L’accusation du parquet s’est appuyée uniquement sur les témoignages secrets, les images des caméras de surveillance, les partages sur Facebook et la participation à une manifestation du 1er mai.

Le 16 mai, le parquet de Mersin avait demandé 40 ans de prison contre un autre adolescent kurde, âgé de 17 ans, sous le coup de huit chefs d’accusation pour avoir participé à des manifestations « illégales ». Parmi les « preuves » figurait le partage d’une chanson kurde sur Facebook.

Selon l’Association des droits de l’Homme (IHD), les prisons turques comptaient 2.309 enfants à la fin de l’année 2011. 90,94 % des ces enfants sont des détenus préventifs, soit 2.100 enfants, avait dénoncé l’association dans son rapport 2011 intitulé « l’institutionnalisation de l’État policier »