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Politique d’immigration : la continuité dans le changement ?

par Le MRAP

Publie le lundi 23 juillet 2012 par Le MRAP - Open-Publishing

Pour le MRAP, il convenait de prendre quelque recul pour mieux évaluer
la politique du nouveau gouvernement en matière d’ immigration.

Le MRAP prend acte de quelques mesures positives, relevant parfois
plus de l’intention que de l’action, et ne voit pour l’heure, pas de
rupture décisive avec les politiques antérieures.

Parmi les intentions positives, le Ministre de l’Intérieur a annoncé
par voie de circulaire en date du 6 juillet 2012, vouloir mettre fin à
la mise en rétention d’enfants avec leurs parents -véritable déni
d’humanité.

C’est le moins que l’on pouvait attendre, dans la mesure où cette mise
en rétention est contraire à la Directive "Retour" du 16 décembre
2008, de l’Union Européenne ainsi qu’à l’arrêt POPOV en date du 19
janvier 2012 de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

En décidant d’assigner les familles concernées à résidence, le
gouvernement instaure une rétention sans murs dont les conditions
seront draconiennes car strictement encadrées, avec un périmètre de
circulation et l’obligation périodique de se présenter au commissariat
ou à la gendarmerie. Et, si d’aventure, la famille n’en respectait pas
les conditions ou ne se présentait pas à l’embarquement, elle pourrait
alors être placée en rétention.

De plus, une véritable discrimination territoriale est instaurée
puisque Mayotte reste en dehors du champ d’application de la
circulaire alors qu’ en 2011, 5389 enfants y ont été placés au centre
de rétention dans des conditions jugées inhumaines et dégradantes
(jugement du Tribunal administratif de Mayotte du 20 février 2012)

Positive, certes, l’annonce de création d’une carte de séjour de trois
ans, tant la carte d’un an quasi généralisée introduisait d’absurdités
administratives ou d’incertitudes pour ceux qui en subissaient le
couperet annuel.

Faute de précisions concernant les conditions d’attribution de ces
cartes, le Mrap restera vigilant.

Le Mrap estime essentielle l’harmonisation annoncée des critères de
délivrance des titres, jusque là soumis à l’arbitraire le plus absolu.
Mais les craintes demeurent lorsque Manuel Valls précise " le droit au
séjour doit être rendu plus simple, plus lisible" ajoutant vite " ce
qui ne veut pas dire moins exigeant". S’il s’agit de rivaliser avec
les exigences du gouvernement précédent, on peut alors s’inquiéter
légitimement.

Améliorer les conditions dégradantes d’attente des demandeurs de
titres de séjour en préfecture est une priorité absolue. Mais, s’il
s’agit de délivrer les mêmes refus de séjour, on ne saurait conclure à
un changement de politique.

Manuel VALLS annonce également ne plus vouloir de politique du chiffre
et donc vouloir rompre avec celle des quotas. Le Mrap attend la
circulaire annoncée pour juger la traduction concrète de cette
intention.

En matière de nationalité, la volonté d’élargir les naturalisations
que le précèdent gouvernement avait considérablement diminuées, marque
aussi une avancée qui reste à concrétiser. En outre, le MRAP attend du
gouvernement un retour intégral au droit du sol sur le seul fondement
de la naissance en France.

Le Mrap estime inadmissible que Manuel VALLS reprenne l’un des thèmes
favoris de la droite en liant chômage et immigration lorsqu’il déclare
 : "aujourd’hui, la situation économique ne permet pas d’accueillir et
de régulariser autant que certains le voudraient".

En refusant la régularisation "de tous les sans-papiers", et le
principe de la libre circulation des travailleurs migrants, préconisée
par de nombreux chercheurs et spécialistes, le gouvernement se prive
d’apports indispensables aux défis d’un nécessaire co-développement.