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Paris : vingt morts, des dizaines de milliers de vies en sursis

Publie le vendredi 15 avril 2005 par Open-Publishing
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Brûlés vifs. Comme trois squatters de Bagnolet cet hiver.

Au moins autant sont morts de froid cet hiver, mais on s’y est habitué pas de une des journaux pour eux.

Dans mon collectif, une copine s’est fait opérer des yeux à cause de l’état de son hôtel, les murs qui suintent, la saleté les petites bêtes.

Une autre à cinquante ans ne peut plus bouger de son lit à cause de l’arthrose : de l’eau coule des murs en permanence.

Des vies ordinaires, dont on ne parlera que si elles se terminent violemment.

Quelle espérance de vie pour les mal-logés, au fait ?

Je n’irai pas à la manif.Fatiguée des vagues d’indignation et de leur reflux tout aussi soudain.

fatiguée qu’il faille que les mal-logés crèvent pour ne plus se faire jeter à la figure le manque de logements sociaux.

Pas envie d’y croiser les élus verts qui ont promis des logements rapides à trois familles de mon collectif et n’ont rien fait depuis.Pas envie de me retenir de leur cracher à la gueule, parce qu’il faut respecter les morts, parce qu’après tout si ce drame peut les pousser à bouger, il ne faut pas les rejeter. Pas envie de voir les bobos de gauche sortir de leurs lofts décorés façon squat (le maire fait ce qu’il peut, mais le méchant borloo) pour exprimer leur tristesse aux mamans avec leur bébé sur le dos qui donnent tellement de charme aux quartiers

J’étais sur un toit hier, celui de l’opac avec d’autres mal-logés, au parti radical la semaine d’avant ; on sera ailleurs la semaine prochaine .

J’imagine que ces prochaines semaines, le souvenir des morts fera qu’on sera un peu moins mal reçus dans les bâtiments qu’on envahit, j’imagine même que les ordures de la mairie de gauche vont laisser ouvrir un peu plus de squats.

Bah oui, les cadavres ne sont même pas encore refroidis, qu’on y pense à tout ça.sans honte, parce qu’on n’a pas de sang sur les mains.

Il n’y a qu’une seule cause à la mort de ces gens : la mairie préfère engraisser les marchands de sommeil, parce qu’une personne qui a passé un an d’hôtels en hôtel acceptera de partir n’importe ou , même en zone huit de cartes orange.

Au fait au bout de plusieurs années de lutte est-ce que j’espère encore obtenir un logement social ?

Est-ce que mes camarades du collectif, souvent plus âgés que moi qui y passent deux après midi par semaine y croient ?

Je ne sais pas, je sais juste les petits bonheurs de la lutte, foutre en l’air l’emploi du temps de jean-yves Mano, faire verdir de rage le président de la Siemp, réussir à ouvrir un bâtiment vide que les fascistes de voisins protégeaient depuis sept ans, arracher 500 euros en deux heures aux radins du service social, être d’un coup un collectif qui fait peur, plutôt que d’anonymes misérables qui font de temps en temps pleurer les chaumières.

Nadia, collectif mal-logés en colère.

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