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C’est déjà Bolkestein

Publie le mercredi 18 mai 2005 par Open-Publishing
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Depuis la disparition d’Air Littoral l’aéroport d’Agen n’avait plus de liaison aérienne avec Paris.

Les édiles de la patrie du pruneau, conformément aux dispositions de l’Union Européenne ont donc lancé un appel d’offre européen (1), car la ligne Agen-Paris étant une OSP ( une ligne soumise à obligations de service public), cette procédure est obligatoire.

Il faut savoir, qu’à ce titre, la ligne bénéficie d’une subvention annuelle de 2,5 millions d’Euros pour 3 rotations par jour, avec un avion de plus de 30 places...payée par le contribuable français...bien sur.

C’est là que commence le royaume d’Ubu.

C’est, en effet, une compagnie portugaise AEROCONDOR qui décroche la timbale...normal, parait il, c’est la moins chère. Déjà qu’une compagnie portugaise exploite une ligne intérieure française, c’est pour le moins curieux...mais c’est pas tout.

AEROCONDOR a la particularité de ne pas disposer d’avion de plus de 30 sièges, ni du personnel qualifié pour l’exploiter...étonnant qu’elle ait pu, dans ces conditions, avoir le marché...quà cela ne tienne.

AEROCONDOR se dirige vers une compagnie danoise DAT pour lui chercher un avion...la solution trouvée, par DAT pour être moins cher, c’est de s’associer avec un pilote d’Air Lithuania pour la création d’une compagnie qu’ils appelleront DOT (Danu Oro Transportas) qui débutera, immédiatement ses opérations avec un ATR 42-300 (prêté par DAT) qui adopte une immatriculation Lituanienne, le LY-DOT.

C’est d’ailleurs l’avion qui a pointé son nez à Agen.

Résultat, vous l’aurez compris, nos amis portugais qui ont obtenu un marché sur Agen alors qu’ils n’ont pas d’ATR 42, demandent à la DAT de leur assurer la prestation. La sous-traitance, ça ne rapporte pas grand-chose, alors on y envoie la filiale pas chère de Lituanie, la fameuse DOT.

C’est donc sur la base d’un contrat de travail lituanien que débute la ligne Agen-Paris, en dehors des contrats du personnel navigant commercial, qui, selon nos informations, sont de droit portugais.

C’est sans doute la raison pour laquelle la DGAC (2) qualifiait l’événement « d’historique », surtout quand on sait que l’histoire devrait se poursuivre à la sauce portugaise, si toutefois AEROCONDOR devait avoir un jour les moyens d’acheter un ATR à DAT, cette fois, puisque les bénéfices restent au Danemark, la Lituanie n’étant utilisée que pour limiter les frais.

Ce qu’il y a d’historique, c’est surtout que la DGAC a reconnu qu’il était impossible de lutter à armes égales avec les offres de services des moins-disants. Pour ce qui est de la technique, la différence saute aux yeux dès le manuel d’exploitation : les compagnies françaises sont OPS1 (3) alors que les compagnies lituaniennes ne sont que JAR OPS (3) .

Pour ce qui concerne le volet social, elles ne sont pas contraintes de payer les mêmes charges que les autres, une chanson connue puisqu’elle est chantée dans toutes les branches de l’économie, les « actionnaires » ayant décidé que les marges futures viendraient de la compression des coûts, et non de celle des dividendes.

Finalement, en attribuant ce marché à une entreprise qui ne peut l’assumer (AEROCONDOR) faute de moyens techniques et humains, mais qui l’obtient sur la base de chiffres théoriques qu’elle ne maîtrise pas (elle n’a jamais vu un ATR) on force l’arrivée de la seule solution possible, car c’est la seule qui soit économiquement viable : un moins-disant socio-économique permettant de préserver les marges de tous les intervenants, en faisant payer aux salariés lituaniens les économies réalisées à tous les étages.

En gros, la DGAC va donner de l’argent public à des gens qui ne peuvent pas - en pratique - réaliser l’exploitation qui découle de l’attribution du marché qui leur a été confié.

Il s’agit donc d’un détournement de fonds publics, au moins de leur vocation principale, car ce sont des fonds qui étaient à l’origine destinés à des entreprises européennes "qui savent faire", alors que dans ce cas précis ils sont donnés à une compagnie qui ne dispose pas des moyens d’assurer dans de bonnes conditions les prestations objet du contrat. Et cette situation - qui est sans précédent - est d’une gravité extrême, y compris pour la sécurité des vols.

Certes nous ne voudrions pas, à l’instar de Fabius, subir les foudres du Parti Socialiste, qui ne tarderait pas à nous traiter de racistes, si nous laissions entendre que la sécurité de l’exploitation, ne serait pas assurée sous prétexte que l’avion et l’équipage sont lituaniens.

Et pourtant...13 jours après le début de la ligne, l’avion lituanien d’AEROCONDOR, a cassé un moteur au décollage d’Orly, et faisant alors fi de toutes les règles de sécurité et de déontologie aéronautique, l’avion a poursuivi sa route...soit 1heure et 20 minutes de vol, en condition givrantes, avec un seul moteur opératif. Le remplacement du moteur a nécessité 5 jours...pendant lesquels la ligne a été interrompue...Ca c’est le service public à la mode de l’Union Européenne.

Il serait peut être temps de réagir, car si tout le monde se moque de la ligne Agen Paris, cette liaison annonce clairement que le pire est devant nous. Les récents appels d’offres lancés par les autres aéroports régionaux pourraient bien finir de la même manière.

Le TCE ne fera que renforcer la tendance.

(source le SNPL et le site radio cockpit)

(1) Appel d’offre du 28/02/04 journal officiel n° C53/9 de l’UE

(2) Direction Générale de l’Aviation Civile

(3) Normes aéronautiques appliquées dans l’UE