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Des associations mettent en cause le projet de carte d’identité électronique

Publie le vendredi 27 mai 2005 par Open-Publishing

Plusieurs organisations dont la Ligue des droits de l’homme (LDH) ont dénoncé jeudi le projet gouvernemental de nouvelle carte d’identité équipée d’une puce électronique, estimant qu’il recelait de très graves dangers pour les libertés et reposait sur un état d’esprit de "suspicion généralisée".

Lors d’une conférence de presse, à laquelle participaient la LDH, le Syndicat de la magistrature, celui des avocats de France ou encore l’Association française des juristes démocrates, ces organisations ont demandé que le projet soit "reconsidéré pour être limité à ce qui soit strictement nécessaire". Elles demandent son retrait en l’état.

Le président de la LDH, Michel Tubiana, s’élève par ailleurs contre une "pseudo-concertation" en cours -alors que le texte est pratiquement bouclé- menée sur le projet via un site Web (www.foruminternet.org) qui, dit-il, "n’est lui-même pas en cause".

Au coeur du débat, le projet INES (identité nationale électronique sécurisée) non encore rendu public, est actuellement examiné par la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) et le Conseil d’Etat avant sa présentation en Conseil des ministres.

Selon des déclarations du ministre de l’Intérieur Dominique de Villepin, il est envisagé de rendre la nouvelle pièce d’identité obligatoire, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Selon une copie non définitive du projet qu’a obtenue la LDH, cette carte d’identité réputée infalsifiable serait équipée d’une puce électronique, lisible sans contact, et contiendrait des éléments d’identification biométriques personnels tels que les empreintes digitales et photographies numérisées qui seraient conservés par ailleurs dans un fichier central.

Son utilité serait polyvalente. Elle permettrait non seulement de prouver son identité auprès des autorités mais aussi d’effectuer des démarches administratives ou commerciales via Internet grâce à une fonction de signature électronique. Elle pourrait même contenir un portefeuille électronique.

L’objectif d’un tel instrument serait bien évidemment de lutter contre la fraude et la falsification des pièces d’identité. Or, soulignent la LDH et les organisations inquiètes de ce projet dans un document commun rendu public jeudi et intitulé "INES de la suspicion au traçage généralisé", le ministère de l’Intérieur lui-même est incapable d’évaluer l’ampleur de la falsification. "Sans avoir démontré la réalité du problème, il propose de recourir à une solution coûteuse à la fois financièrement et en termes de libertés publiques", selon les signataires.

Ces organisations démentent que la nouvelle pièce d’identité, compétence des Etats, soit une exigence européenne. Et ils contestent le fait que la fraude à l’identité soit privilégiée par les terroristes en rappelant que "dans la quasi-totalité des attentats les plus violents, leurs auteurs ont utilisé leurs propres identités".

En fait, soulignent les organisations signataires, "la carte d’identité électronique participera avant tout au renforcement et à la multiplication des contrôles d’identité" et sa généralisation "répond à la volonté de (les) banaliser".

Quant à la constitution d’un fichier central de la population, grand est le risque de détournement "par un Etat qui perdrait ses repères démocratiques".

Pour la LDH et les autres organisations, la "véritable nature" d’INES est celle "d’un projet à usage policier, qui relègue chacun au statut de suspect". Pour elles, "les mêmes arguments qui justifient aujourd’hui le recours à l’empreinte digitale et à la photographie justifieront demain l’enregistrement de l’iris, de la rétine, voire de l’ADN". PARIS (AP)