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École de la confiance : la loi passe, la défiance reste, les mobilisations continuent

par Stéphane Ortega

Publie le samedi 15 juin 2019 par Stéphane Ortega - Open-Publishing

Jeudi 13 juin, les élus des deux chambres parlementaires ont voté en commission mixte paritaire une nouvelle version de la « loi pour une école de la confiance ». Expurgée des mesures les plus contestées par le monde enseignant, elle s’ajoute à la panoplie de réformes déjà mise en place dans le secondaire par Jean-Michel Blanquer.

 

Les députés et les sénateurs se sont mis d’accord pour évacuer du texte final plusieurs des mesures qui ont mobilisé professeurs des écoles et parents d’élèves depuis plus de trois mois. Ainsi, l’amendement ajouté lors de l’examen en première lecture à l’Assemblée nationale au mois de février portant sur la création d’établissements publics des savoirs fondamentaux passe à la trappe. Finie la réunion d’une ou plusieurs écoles sous l’autorité d’un collège et de son chef d’établissement. En tout cas dans la loi. Les expérimentations déjà initiées se poursuivront.

Ce n’est pas réellement une surprise. Le Sénat avait déjà supprimé cet amendement et le ministre de l’Éducation nationale avait laissé entendre qu’il ne souhaitait pas s’arc-bouter sur cette question. Pour autant, les modifications apportées par les sénateurs qui avaient remplacé ce dispositif par l’attribution d’une fonction hiérarchique pour les directeurs d’école ont aussi été supprimées. Une grande partie des professeurs des écoles y est hostile, privilégiant un travail d’équipe plus horizontal et une certaine liberté pédagogique. Les autres modifications apportées par la droite sénatoriale, supprimant les allocations familiales en cas d’absences répétées, ou empêchant les femmes voilées parents d’élèves d’accompagner les enfants lors des sorties scolaires, ont aussi été expurgées.

 

La confiance cela ne se décrète pas

 

« C’est parce qu’il y a eu des mobilisations d’enseignants, particulièrement dans le premier degré, que le gouvernement a bougé sur quelques articles », prévient Bernadette Groison de la FSU. Mais, malgré ces reculs, la confiance n’est toujours pas à l’ordre du jour. « La philosophie globale du texte reste entière », explique la secrétaire générale du premier syndicat enseignant, qui rappelle que l’obligation scolaire à trois ans obligera des collectivités territoriales à financer les écoles maternelles privées. Mais c’est aussi la méthode du ministre qui est à la source de la défiance pour Bernadette Groison : «  Jean-Michel Blanquer considère les enseignants plus comme des exécutants que comme des acteurs du système éducatif ».

Sur ce point, l’article 1 en formulant un devoir d’exemplarité pour les personnels de l’Éducation nationale a suscité la désapprobation générale. « Sois prof et tais-toi », ont compris les enseignants qui pour l’occasion ont adapté ce slogan de mai 68 et son visuel en remplaçant le général de Gaulle par Jean-Michel blanquer. La dernière version légèrement réécrite par les sénateurs n’y change rien. « C’est un changement cosmétique, l’esprit de l’article reste le même. C’est une pression supplémentaire mise sur les personnels dans le cadre de leur liberté d’expression », assure un responsable de Sud-éducation. Et sur ce point, les trois mois de mobilisation passés ont été riches en pressions diverses, comme au Collège République à Bobigny où plusieurs syndicalistes font face à des mutations forcées.

 

La grève continue pendant le baccalauréat

 

A quelques semaines des grandes vacances, les mobilisations dans les écoles arrivent à leur terme, avec la fin du parcours parlementaire de la « loi pour une école de la confiance  ». Les dernières étapes législatives ne sont plus qu’une formalité d’ici le vote définitif et la promulgation de la loi courant juillet. Par contre dans le secondaire, le mouvement se poursuit contre la réforme du lycée et du baccalauréat. La plupart des syndicats du second degré à l’exception notable du Se-Unsa appellent à une grève des surveillances d’examens le 17 juin, jour de la première épreuve du baccalauréat. Une première depuis 2003, et même plus longtemps en considérant le grand nombre de syndicats impliqués dans cet appel.

Pour autant, si le nombre de grévistes devrait être significatif dans plusieurs académies, dont celles de Créteil et d’Occitanie, le mouvement risque d’être diversement suivi selon les régions. Un peu comme l’avaient été les tentatives de grèves reconductibles dans le primaire. Du côté des rectorats et du ministère, les autorités mettent les bouchées doubles en convoquant tout ce que l’Éducation nationale compte de personnels non enseignants. Mais même si les perturbations du baccalauréat restaient faibles, les syndicats s’attendent à une nouvelle belle pagaille liée à la réforme à la rentrée.

À ce moment-là, les professeurs découvriront leurs nouveaux emplois du temps. Journées à rallonges et à trous de plusieurs heures attendues. De quoi entamer le peu de confiance qui reste.

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