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Le CADTM s’inquiète de la manœuvre contre l’effacement de la dette initiée par quatre "petits" pays riches au FMI

Publie le mardi 19 juillet 2005 par Open-Publishing

Le CADTM s’inquiète de la manœuvre contre l’effacement de la dette initiée par quatre "petits" pays riches au FMI.

Après l’effacement de la dette détenue par 18 pays pauvres envers la Banque mondiale, la Banque africaine de développement (BAD) et le Fonds monétaire international (FMI), annoncé le 11 juin par les dirigeants du G8, le CADTM s’inquiète de la manœuvre initiée par les représentants au FMI de la Belgique, de la Suisse, de la Norvège et des Pays-Bas.

Dès le 22 juin, le représentant de la Belgique au FMI, Willy Kiekens, a lancé l’idée d’un mécanisme permettant de ne pas effacer de manière irrévocable la totalité de la dette des 18 pays envers le FMI.

Il s’agirait plutôt de continuer à exiger les remboursements, et si le pays concerné applique des politiques économiques "adéquates", c’est-à-dire entérinées par les experts ultralibéraux du FMI, le Fonds reversera les sommes remboursées au pays endetté.

Une semaine plus tard, les représentants de la Belgique, de la Suisse, de la Norvège et des Pays-Bas ont déposé un mémorandum demandant le maintien de conditionnalités fortes en échange de l’effacement de la dette, puisque, selon eux, "la conditionnalité est un trait essentiel pour l’usage effectif des ressources libérées par la réduction de la dette".

La fronde menée par la Belgique, la Suisse, la Norvège et les Pays-Bas n’est pas un combat perdu d’avance, puisqu’à eux quatre, chacun à la tête d’une dizaine de pays, ils détiennent 16,32 % des droits de vote. C’est suffisant pour bloquer le FMI.

En effet, les décisions importantes engageant l’avenir du FMI nécessitent 85 % des droits de vote. D’ordinaire, cela permet aux Etats-Unis d’empêcher toute évolution qu’ils n’approuvent pas. Cette fois-ci, de "petits" pays s’en emparent. Mais il est regrettable que ce soit pour bloquer un effacement de dette, si insuffisant et inadapté soit-il.

Pourquoi, par exemple, ces pays n’ont-ils pas pris la peine de s’unir pour bloquer la nomination provocatrice de Paul Wolfowitz à la tête de la Banque mondiale en mars 2005 ? Le CADTM tient à rappeler que les 18 pays sélectionnés ont atteint le point d’achèvement de l’initiative PPTE (Pays pauvres très endettés), qui impose de longues années de réformes économiques dans un sens néolibéral. C’est déjà beaucoup trop.

Seules les populations des pays concernés et leurs représentants démocratiquement désignés sont habilités à contrôler l’utilisation des sommes libérées. Le CADTM affirme que le FMI et la Banque mondiale peuvent parfaitement assumer une annulation totale de leurs créances sur les pays pauvres. En fait, les réserves en or du FMI et les fonds propres de la Banque mondiale dépassent 75 milliards de dollars.

Dans leurs livres de compte, la dette des 18 pays concernés s’élève à 40 milliards de dollars, mais sa valeur réelle est 3,2 milliards de dollars, si l’on se réfère aux Etats-Unis qui lui appliquent une décote de 92 %. Au lieu d’effacer la dette sur plusieurs dizaines d’années, comme prévu aujourd’hui, ces deux institutions sont tout à fait en mesure de régler cette question dès cette année, en appliquant la même décote de 92 % et en passant ces dettes par "perte et profit".

Elles pourraient même effacer définitivement cette année la totalité des dettes qu’elles réclament à l’ensemble des pays à faible revenu (dont Haïti et le Bangladesh, non concernés aujourd’hui). Dans le même temps, ces institutions doivent évidemment renoncer à imposer la poursuite des politiques néolibérales.

Damien Millet, président du CADTM France,
france@cadtm.org,
00 33 (0)6 60 54 27 13
Eric Toussaint, président du CADTM Belgique,
cadtm@skynet.be,
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