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Mylène et sa famille ont logé dans un deux pièces au milieu des cafards et des rats.

Publie le jeudi 1er septembre 2005 par Open-Publishing

Quatre années à sept dans un taudis lillois

de Stéphanie MAURICE

C’est une petite maison pleine de vie, d’une propreté méticuleuse, avec les cinq enfants qui jouent et se chamaillent, leur père qui rentre du boulot les mains encore blanches de son nouveau métier de plaquiste, les amis qui boivent l’apéro... Au milieu de cette joie se tient Mylène. Aux épaules larges, au sourire accueillant. A l’énoncé de son ancienne adresse, murée et classée insalubre, dans le quartier de Fives, à Lille, son visage se voile. « Ah, vous êtes passé au taudis. » La famille y a vécu quatre ans, à sept pour 450 euros de loyer par mois ­ payé par l’allocation logement ­ pour un salon, une cuisine et une chambre. Pour des cafards, des rats, un plafond qui s’écroule, un escalier où manquent les quatre premières marches.

« On avait toujours peur d’atterrir chez le voisin à cause du plancher. La tuyauterie des radiateurs était foutue, on ouvrait la porte du four pour se chauffer. Et l’humidité partout. Je lavais deux ou trois fois par jour, j’avais l’impression que je ne faisais rien », se souvient Mylène. Avec les souvenirs, les larmes montent. « On en a bavé. Mais on ne pouvait pas se laisser aller, avec les gamins. C’était un combat journalier. »

La plus grande angoisse n’était pas l’accident ou l’incendie, mais la sonnette. « J’avais peur d’avoir les services sociaux à la porte, qu’ils me reprennent les gosses. » Avant de loger dans l’insalubre, elle et son compagnon n’avaient aucun toit. En 2000, ils ont dû accepter la séparation, elle dans un foyer, lui dormant à droite à gauche, les trois enfants (3 ans, 2 ans et un mois à l’époque) placés dans une pouponnière à Roubaix. « Ça a duré trois mois, c’était la misère. » Il fallait trouver un appartement à tout prix, pour vivre ensemble. Seules ressources, les allocs. La proie idéale pour les marchands de sommeil. C’est ainsi qu’ils ont atterri dans le « taudis » de Fives.

Le salut est venu par hasard ; il n’était pas question d’alerter qui que ce soit. « C’est une visite d’une personne du Pact, qui avait un logement à proposer à l’ancien locataire. J’ai osé lui demander si elle n’avait pas quelque chose pour moi. » Le CAL-Pact est un bailleur HLM qui travaille pour le relogement des plus pauvres, souvent dans un habitat réhabilité, en offrant un accompagnement social. La lutte contre l’insalubrité est l’une de ses priorités.

Il a soutenu Mylène pendant les deux ans nécessaires au règlement du dossier : passage du service d’hygiène au taudis, interdiction d’habiter prononcée, suspension de l’allocation logement touchée directement par le propriétaire, procès gagné et la famille enfin relogée, en juin 2004. Les clés d’une vie nouvelle. Mylène va reprendre une formation, son compagnon travaille dans une entreprise de réinsertion. « Le plus agréable, ç’a été de franchir la porte de ma nouvelle maison. Le premier jour, on s’est tous battus pour monter en premier dans la baignoire. Les premiers mois je me suis carrément cloîtrée. C’était trop bon. »

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