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Ne laissons pas le monopole de la personne au néolibéralisme et à sa définition marchande.

Publie le samedi 22 octobre 2005 par Open-Publishing
15 commentaires

L’individu, enjeu de la gauche

de Philippe Corcuff, Jaques Ion, François de Singly sociologues

L’intelligence du réel apparaît en crise dans la gauche française. Dans son réfrigérateur conceptuel, on trouve surtout des formules creuses à tonalité technocratique sur “la nécessaire conciliation de l’économique et du social”, avec ça et là des restes rances d’économisme keynésiano-marxiste. La fin de l’hégémonie marxiste en son sein aurait pu ouvrir une ère intellectuelle de diversification salutaire de ses références. Ce n’est pas ce qui s’est passé : une régression anti-intellectualiste a pris le pas. Les trois pôles constitués jadis par le goût de l’élaboration théorique, par le souci de l’enquête sociale et par l’éducation populaire se sont affaissés. Des médias de plus en plus standardisés et une expertise dotée d’œillères énarchiques triomphent à leur place.

La sociologie, apparue en même temps que l’idéal démocratique et que la société des individus, depuis toujours confrontée à la question sociale, peut proposer quelques repères pour alimenter un renouveau du débat, notamment concernant les processus d’individualisation. Car l’individu se présente encore bien souvent comme un ovni, mal-aimé et incompris à gauche. Ceux qui, sociaux-libéraux, admettent le cours néolibéral, en l’agrémentant de quelques édredons sociaux à la marge, font de l’individualisme un “mal nécessaire” lié à la puissance du marché. Quant à ceux qui récusent le néolibéralisme, ils réduisent fréquemment l’individualisme à un sous-produit de la marchandisation à combattre. Il n’y a guère d’individualistes heureux à gauche.

Pourtant, l’individualisme marchand ne constitue qu’une des composantes de ce phénomène social complexe qu’on nomme “individualisme contemporain”. Sociologiquement, cet individualisme est le produit d’une pluralité de logiques sociales en interaction : avancées de la marchandisation, certes, mais aussi figure politique de l’individualisme démocratique, dynamique juridique des droits individuels ou transformations de la famille et de l’intimité. Contre le nostalgique “c’était mieux avant”, nous pensons que l’individualisme est à l’origine d’acquis émancipateurs : développement d’une autonomie à distance des dépendances héritées, protection des “jardins secrets” de nos intériorités personnelles, mouvement de libération des femmes et nouveaux droits des enfants bousculant les cadres de la famille patriarcale, amorce de reconnaissance des modes de vie homosexuels, progression des marges de choix individuelles dans le cours de nos existences quotidiennes (dans la vie sentimentale, familiale, les loisirs, les repères moraux, etc.), formes plus souples et décentralisées de coordination de l’action collective, etc. Ce qui ne veut pas dire que les dynamiques individualisatrices ne génèrent pas également du mal-être identitaire.

Mais le rôle tout-puissant donné au marché dans l’idéologie néolibérale peut être critiqué au nom même de l’individu, d’un autre individu que l’individu marchand. Par exemple, c’est au nom des droits individuels et de l’équilibre des pouvoirs que les visées hégémoniques du marché sont susceptibles d’être mises en cause dans la tradition du libéralisme politique (à distinguer du libéralisme économique) ; ou dans une logique proche de la défense de l’autonomie personnelle contre les empiétements d’un pouvoir exclusif dans une inspiration libertaire ; ou au nom de la créativité individuelle écrasée par l’enfermement dans une vision pauvrement commerciale de l’individu comme chez Marx ; ou encore dans la perspective d’une articulation entre les exigences d’égalité sociale et les aspirations à la dignité personnelle propre au socialisme individualiste de Jaurès.

Ne laissons pas le monopole de l’individu au néolibéralisme. On peut même avancer que, en interaction avec la contradiction capital-travail, il y a une véritable contradiction de l’individualité au cœur du néocapitalisme : à travers les nouveaux dispositifs productifs et de consommation de masse, le capitalisme nouveau excite les désirs d’individualité, mais il ne peut y répondre que de manière tronquée et frustrante par l’imposition d’une définition marchande de la personne.

La question de l’association de la justice sociale et de l’individualité nous semble alors un chantier majeur pour la gauche. À l’intersection de ces deux dimensions, on trouve un des principaux lieux des écorchures ordinaires des sociétés modernes : les souffrances psychologiques associées à l’inégal accès aux ressources de valorisation de soi. Dans une orientation sociale et individualiste, une nouvelle gauche, échappant à l’attraction du néolibéralisme, aurait à promouvoir des mesures de redistribution des ressources (économiques, culturelles, politiques, etc.), entre classes, genres et générations, comme au profit des minorités discriminées, ainsi que des mesures favorisant la reconnaissance personnelle. Dans un équilibre nécessairement instable, cette gauche à venir devrait prendre garde à privilégier, parmi les mesures favorisant l’égalité, celles se conciliant le plus avec l’autonomie des individus, et inversement, parmi les mesures à prendre pour accroître la dignité personnelle, celles n’augmentant pas les inégalités.

L’individualisme n’interroge pas seulement les orientations programmatiques de la gauche mais aussi ses modes d’organisation. Or, il ne faudrait pas croire, toujours dans une tonalité nostalgique, que l’affaiblissement des groupements verticaux qui, entre associations, syndicats et partis, tissaient un ensemble hiérarchisé, permettant une “remontée” vers la scène politique nationale des revendications issues des mouvements sociaux, signifie “la fin de la politique”. L’émergence et la réinvention en cours, sous l’aiguillon notamment de l’expression des singularités individuelles, de rapports plus diversifiés à l’engagement collectif, nous invitent à envisager d’une autre manière les relations entre des revendications localisées et leur traduction dans la sphère politique. Si les partis et les institutions de la démocratie représentative ont encore un rôle à jouer, ils ne peuvent plus prétendre à exercer une fonction tutélaire.

La gauche saura-t-elle se renouveler intellectuellement et pratiquement, en échappant un moment à la tyrannie des rythmes électoraux de la politique professionnalisée ? La gauche institutionnelle apparaît dans cette perspective bien mal en point, mais elle constitue encore un référent important de notre vie politique. La gauche altermondialiste naissante a su préserver davantage de liens avec la réflexion comme avec le terrain de l’action sociale. Mais elle est également menacée de l’intérieur par certaines tendances régressives, en particulier une rhétorique gauchiste l’enfermant dans un “tout collectif” suranné et dans une dénonciation simpliste du néolibéralisme et des médias appréhendés comme des “complots” maléfiques. Pourtant soudent simultanément de nos sociétés d’individus des désirs de justice sociale et de reconnaissance individuelle...

* Dernier ouvrage paru : Politiques de l’individualisme - Entre sociologie et philosophie (Textuel, coll. “La Discorde”).

http://www.liberation.fr/page.php?Article=331992

Messages

  • ... Bon ! Je m’y colle !...
    Deux ou trois choses sur la forme et le fond.

    1. Même si cette vision est très intéressante et importante, comment voulez-vous qu’avec un langage aussi abscons, un grand nombre accroche au message ?
    2. Chacun sait au fond de soi que les plus grandes vérités doivent se décliner simplement.
    3. C’est la seule façon de rassembler un plus grand nombre à son discours et à sa cause.
    4. Je crois qu’il faut rester neutre et objectif :
     Le néo-libéralisme nous montre qu’en matière de stratégie, la démarche individuelle est plus efficace qu’une stratégie de groupe.
     Vouloir "rassembler" la gauche autour d’une stratégie commune ne garantie pas de son efficacité et sa réussite.
    5. Comme tu le dis, actuellement, le néo-libéralisme, pour se mettre en place, est victime de ses propres contradictions.
    6. A l’heure où la communication est devenue mondialisée et instantanée, où les stratégies de lutte et de modèles sociaux doivent être transposables et transportables (comme l’est le capitalisme), pour mobiliser chaque individu, il faut, à la rigueur, un message universel donc accessible.
    Si ce message se décline en terme de "tous contre ce modèle de Société néo-libérale, etc.." ou encore "Tous vers une Société idéale, équitable, etc.", le temps d’arriver aux oreilles de chacun, il aura été mille fois manipulé, noyé, etc.

    Appeler cette mobiisation "la gauche" ? Ce terme devenu trop co-noté à mon goût, car il fait déjà parti de l’ancienne société dont nous voulons sortir.
    Il faut maintenant plutôt parler de "Résistance".

    geabel

    • Je n’ai jamais conçu autrement la bataille pour une autre société comme une bataille libérante avant tout pour les individus. Une bataille qui permette plus de liberté et plus de controle sur son propre destin pour chacun et chacune, sans que cette liberté et ce pouvoir soient construits sur des servitudes et des subordinations assénées à d’autres.

      Cette bataille possede et possedra toujours ses contradictions qui peuvent des fois opposer l’objectif au chemin quand nous n’y prenons pas garde. Ce qui imposerait des processus de libération qui tiennent en laisse des despotismes collectifs de transition ecrasants les individus, tout autant qu’une guerre aux despotismes autoritaires du passé (dont le capitalisme est un fleuron tout autant que les sociétés nomenclaturisées).

      L’idée même de démocratie, si elle est supérieure aux autres systèmes (sauf ceux qui seraient à inventer qui iraient encore + loin en ce sens) est quelque part une tyranie par rapport aux libertés indviduelles, même en developpant une démocratie economique (les travailleurs controlant démocratiquement les entreprises), même avec toutes les garanties possibles et imaginables sur les libertés (des individus et des minorités).

      Alors evidemment, pas d’idées absolues et de solutions idéales dans tout celà...

      Mais quelques pistes peut-être , comme travailler sans cesse pour que le chemin comme l’objectif protegent le + possibles les libertés de l’individu, les pouvoirs de l’individu sur son propre sort.
      A tout instant nos batailles ne doivent pas désincarner les individus, nos batailles doivent toujours permettre des libertés supérieures aux exploités que celles que leur accordent le monde néo-liberal.

      Le neo-liberalisme et la chûte des systèmes bureaucratiques qui mimaient en même temps les sociétés pré-capitalistes imperiales et le capitalisme dans leurs travers les plus sordides, nous obligent encore plus fortement à réflechir là dessus.

      Mais, on peut, et probablement on doit, rappeler que le néo-liberalisme est d’une discretion de violette sur l’extreme despotisme régnant dans le fonctionement intime des entreprises.
      Les entreprises du monde liberal sont des systèmes bureaucratiques autoritaires ne tolerant rien à l’interieur d’elles-mêmes qui ressemble de près ou de loin aux libertés d’expression des individus subordonnés par le salariat, qui ressemble à des controles démocratiques sur l’orientation de l’entreprise...

      Quand tu rentres dans une entreprise, tu déposes à l’entrée toutes tes libertés et surtout tu n’es plus un citoyen, tu as loué ton renoncement à l’être dans les couloirs de la boite qui t’a embauché.

      As-tu le droit d’entrer et de sortir librement ? Non tu seras puni si tu le fais
      As-tu la liberté de parole, de réunions, de la presse ? Non....
      As-tu un droit démocratique quelconque sur l’orientation de l’entreprise ? non, rien.

      le neo-liberalisme ne traite que très mal ces questions et cache mal ses résultats concrets : des pratiques despotiques de domination sur les individus en interne amenant à l’exteriorisation de ces pratiques vers l’exterieur de l’entreprise, corruption, achats de moyens de propagande, chantages, extorsions de fonds aux systèmes democratiques, des fois meurtres, très grands meurtres, immenses meurtres quand la logique d’accaparement l’impose, destructions accelérées de la nature guerres,... etc etc etc....
      Les libertés et la démocratie ne sont, dans les pratiques du liberalisme, que des rencontres hasardeuses de voyageurs pour les plus cyniques, ou bien des comodités de lutte, des leviers propices pour les capitalistes quand celà est necessaire, répudiés sans l’ombre d’une hesitation quand les interets l’exigent.

      Une partie de la gauche intellectuelle a été fortement séduite par le liberalisme, en entrant dans une situation où une partie des individus qui constituaient ces strates intellectuelles obtenait une grande liberté individuelle, un pouvoir accru sur leur destin personnel par le fric et leurs activités non construites directement sur des subordinations, des disciplines imposées de l’exterieur, etc...

      Une partie du divorce avec les "elites" vient de celà : une petite frange dans un recoin de l’oeil du cyclone, libre dans sa vie, libre par son fric qui finit par avoir une vision du monde fortement déformée par sa place personnelle ( très differente de la nombreuse corporation et tout aussi honorable des-salariés-livreurs-de-pizza-aux risques-de-leur-vie-et-aux-salaires-de-misere....).

      Cette vision conduit ces élites à penser les batailles de solidarité comme des supplements d’âmes, et elles ne peuvent absolument pas comprendre que ces batailles puissent les impliquer serieusement dans leurs chairs. Ils ne peuvent comprendre le reactions populaires que comme des problemes psychologiques car ils ne peuvent ressentir les effets de la subordination sur les libertés réelles et matérielles des salariés normeaux, de l’écrasante majorité de la population.

      Il n’est nullement en question là dans mon propos de m’attaquer d’une façon ou d’une autre aux libertés de ces couches très minoritaires et particulières mais comprendre comment elles en sont venu à ne plus comprendre trop ce qui se passait dans la société, leur propre sort dominant leurs regards.

      "Allons, ce ne doit pas être si dur que celà !...." L’âpreté d’un discours révolutionnaire leur parait, dés qu’il se rapproche et n’est plus lointainement exotique, comme dépassé et outrancier, archaïque et dangereux, car leur sort personnel ne leur dit rien de tout celà, ils ne ressentent rien de tout celà. Pour eux tout va bien...Autistes de leurs congeneres..., ils ne peuvent comprendre les chemins qui ameneraient des libertés de même niveau pour l’immense majorité de la population que celles dont ils bénéficient... et avoir de singulières difficultés même à comprendre, que notre livreur de pizza, bac + 5, précaire, puisse être un foreumeur distingué sur le net, un danseur de claquettes le soir...

      Même leur pré carré devient de plus en plus étroit, il y a les grands chefs journalistes qui ramassent et sont libres pendant que des journalistes livreurs de pizza mal payés et précaires rejoignent la cohorte du salariat subordonné.

      Un des paradoxes à l’oeuvre c’est la formidable poussée du niveau d’instruction des populations des pays industrialisés, leurs acces de plus en plus aisés à ce qui étaient des prés-carrés reservés avant des "intellectuels"....Les métiers necessitent de plus en plus des flux très importants d’échanges, un travail de plus en plus intellectuel.
      La place des intellectuels au sens traditionnel du terme tend à disparaitre....Du moins une très grande partie du prestige qui lui est attaché est en train de s’enfuir à très grande vitesse. les BHL font + rigoler maintenant plutôt qu’incarner une autorité morale quelconque qu’ils semblent exiger, de plus en plus en trepignant, de la société.
      Leurs espaces deviennent formidablement réduits, superficiels et peu sérieux face au formidable essor intellectuel et populaire de la population, visible sur le net par exemple.

      D’ailleurs un des paradoxes les plus notables de ces derniers temps a été les torrents de mépris, voir de haine, déversés par les derniers petits marquis contre le "peuple" ce dernier mot étant craché comme la pire des injures, coincée entre les bottes de Mussolini, et les SA de l’enfantement du nazisme... Les attaques sur le peuple stupide et méchant (je raccourcie outrageusement) cachent mal que c’est sur le terrain de l’intelligence, du raisonnement, de la démocratie et de l’humanité que nos "intellectuels" liberaux ont eu les joues fessées, le net.

      Là, les estrades étaient plus basses, les chairs moins hautes, le son revenant dans tous les sens et pas en un seul flux unidirectionnel....

      Vive les libertés !

      Copas

  • Me suis toujours dit que si les gens ne comprenaient pas ce que je disais, ce n’est pas parce qu’ils étaient des crétins, mais parce que je m’étais mal exprimé. Si je parle à quelqu’un, c’est pour qu’il me comprenne. Et c’est à moi de faire l’effort d’aller vers lui. Les crétins, de toute façon, je ne leur adresse même pas la parole !
    Là, chers sociologues, ou bien c’est moi qui suis un crétin et ce n’est pas à moi que vous parliez. Ou bien vous vous exprimez comme des truffes.
    Je n’ai rien compris à votre discours. Il est vrai que quand je lis des choses comme "La fin de l’hégémonie marxiste en son sein aurait pu ouvrir une ère intellectuelle de diversification salutaire de ses références", j’ai le cerveau qui part courir les ruisseaux. j’adore les ruisseaux.
    Allez, chers camarades sociologues, soyez gentils, reformulez votre propos, s’il vous plaît.
    Le Yéti

  • Toc, toc, euh…je peux enter pour exprimer ce que j’ai compris ?

    J’imagine qu’il faille être trois Concuff, Ion et DE Singly (avec la particule) pour pondre ce carcan, et je suis presque seul à me débattre pour l’ouvrir.

    L’hégémonie marxiste ne s’est pas imposée en son sein, c’est la vie elle-même qui l’a imposée, et ceux qui veulent ou pensent surnaturellement en finir ou essayer de l’enterrer seront déçus, ils ne font que l’amplifier sous d’autres formes tel que son véritable découvreur Monsieur MARX lui-même nous l’a légué.

    Ceux qui nous disent que l’individualisme « néo-libéraliste » peut être un exemple pour un certain individualisme de « gôche »(oui je sais on use et abuse de ce terme) et qu’il faille s’y référer, sont loin de moi.

    L’individualisme TOUT COURT il n’y en qu’un, celui que nous vivons, je le connais. Il m’isole, il m’écarte, je n’ai connu que lui, je n’en veux pas. Je préfère ESSAYER le collectif chaud.

    Je veux comprendre le livreur-de-pizza-bac+5 ou pas, comme « la gueule noire »presque disparu, comme le métallo qui disparaît, l’éboueur dans ma rue, « le fonctionnaire privilégié », l’ingénieur qui construit, le docteur qui soigne, les « retraités » de tous, l’ouvrier que suis, ma CLASSE laborieuse dont je suis celle qui travaille et produit.

    Voyez-vous dans ce collectif là, même si certains ne se reconnaissent pas, mais qui avec le temps s’y reconnaîtront, est la seule richesse que je puisse collectivement partager.

    La philosophie, de ce j’en comprends, j’en jouis intellectuellement (n’allez pas croire…), c’est agréable, c’est profond, c’est bon.
    Comme la musique, on aime, on a des sensations.

    Et les grands discours encodés excusez-moi je ne peux pas me procurer le décodeur.

    Ce que je comprends mieux c’est dans la rue qu’on me le dit, et dans la rue je me sens mieux, je ne déprime pas.

    Je n’ai rien apporté, je sais, je passe et je reviens, j’espère et c’est mon faible, trouver un compte rendu clair qui me permette de comprendre. De ce j’ai dis c’est sûr je suis peut-être à côté, qu’on me le dise, mais ce compte rendu, je le répète me permettra de mieux réfléchir et de l’expliquer à mon tour à ceux qui dans la rue n’ont pas eu la chance de l’avoir lu.

    Chaleureusement,

    Esteban

    • Gaebel,

      Ne sois pas désolé, tu as parlé de forme : CLAC ! tu as ciblé !

      Sinçèrement et sans jeu de mots, ton grand esprit te permets d’user de formeS. Ne parle pas de stratégie.

      Reste dans les formes, tu as la chance d’y naviguer, fait moi comprendre.

      Descend à mon niveau, je veux te comprendre.

      Esteban

    • Esteban,

      Le collectif n’a pas apporté que du bien. Il a pu apporté aussi de terribles oppressions.
      Je suis d’accord avec toi sur les excès de l’individualisme qui sont quêtes vaines (les exces de ...) et finalement déprimantes quand tous les bébés y sont mis.

      Mais toutefois je répete et c’est ma position : Le collectif est pour moi valable que quand il n’enferme pas les individus, quand il ne s’attaque pas à leurs libertés, quand il permet aux hommes et aux femmes de choisir leur destin, d’avoir le + possible pouvoir sur le maximum d’élements de leur vie.

      Que des formes collectives et démocratiques d’organisation permettent le + possible d’aller vers celà, de porter en leur sein celà, me semble la démarche adaptée.

      Mais les batailles pour les droits de l’homme et de la femme, les libertés individuelles, contre la peine de mort, pour le droit de vote, etc, essayent de placer de + en + d’élements inviolables de la personne humaine comme règles de fonctionement de la société.

      J’appuie et j’approuve.

      Pour ce qui est du néo-liberalisme et de la question de l’individualisme...

      Le néo-liberalisme, que j’appellerai plutôt mouvement neo-con(servatisme), essaye de se positionner comme un mouvement liberateur des individus.

      Sa grande et son immense faille vient qu’il est d’une discression de violette sur la concurence dans son modèle entre des individus et des organisations (les entreprises capitalistes) aux fonctionements totalitaires et despotiques (pas de libertés dans les entreprises, essayez un peu d’aller distribuer un tract dedans, etc).

      Oui l’entreprise capitaliste est totalitaire dans ses fonctionements internes, oui elle empêche le travailleur d’être un citoyen plein et entier quand celui-ci franchit sa porte...

      Mettre l’égalité entre ces lieux de despotisme et les individus est une farce du neo-liberalisme.
      Les entreprises capitalistes étant les principaux lieux de pouvoir et de richesses dans le monde, un monde sous l’empire de cette domination ne peut respecter les individus.

      L’individualisme là dedans n’a que très peu de place.

      Le neo-liberalisme doit donc être décrit pour ce qu’il est : Le faux-nez d’un système autoritaire et a-democratique comme dirait Jennar (je ne suis pas completement persuadé qu’une partie des neo-cons ne soit pas anti-démocratiques explicitement en sus, j’y reviendrai un jour...).
      Donc totalement irrespectueux des individus et par là-même peu favorable à l’individualisme dans ses propriétés nevralgiques (entreprises, banques, polices, armées, prisons, etc).

      Voilà pour les néos-cons !
      On ne peut parler de leur positionement sur l’individu et l’individualisme sans regarder comment ça se passe concretement et le fait qu’ils se taisent sur la violence anti-democratique des entreprises.
      La bouffonerie du néo-liberalisme est donc extreme quand il parle des libertés et de la valeur de l’individualisme dans le monde réel.

      Autre chose, (j’espère que pour mon Yeti, j’arrive à m’exprimer de façon comprehensible, je ne trouve pas toujours mes mots)
      Les "intellectuels", les "élites", la gauche, le liberalisme, le TCE, le peuple et Katrina....

      Notre système, en même temps qu’il mettait une rouste de grande ampleur aux travailleurs ces derniers 20 ans (on commence tout juste à relever la tête), a laissé prosperer de petites couches sociales ("les petits marquis") avec de relatives libertés individuelles consequentes...

      Faiblesse des espérances de la classe ouvrière et relative prospérité de ces petits marquis ne faisant pas toujours partie des hierarchies autoritaires des entreprises, ont amené ces braves gens à penser que ce système n’était au fond pas si mauvais que celà.

      Et c’était vrai pour eux, leur sort tout à fait particulier.

      Une grande liberté d’existence, des moyens confortables d’existence sans que la filiation soit très transparente entre l’exploitation des autres et leur prospérité, des libertés de parole et de vie, du tout bon quoi !

      Mais cette couche sociale, très particulière, que j’ai assimilé un peu trop vite à des intellectuels, est en voie d’amaigrissement et de re-structuration interne, qui l’a hierarchise et lui instille de plus en plus les bons fonctionements du despotisme d’entreprise.

      Encore....
      Les intellectuels n’existent plus comme couche sociale tout à fait particulière avec ces traits particuliers (le monopôle de l’expression intellectuelle, l’autorité morale attachée, etc) dans notre monde.

      Un des aspects particuliers de la crise des "élites" vient de la non-reconnaissance de + en + forte des populations pour toutes formes d’autorité morale de ceux qui se réclament encore de ces vieux fonctionements.

      "Ils sont cons ou quoi ?" tend à être le discours en filigramme de la partie de ces "élites" qui se réclament de cette vieille autorité morale quand la population, la majorité sociale du pays ne suit plus tous les méandres de leur nombril.

      L’exageration bouffie de leur propre place leur fait penser que si les populations s’écartent de leurs tortuausités c’est qu’elles s’écartent de l’intelligence et de la connaissance....

      Nous savons ce qu’il en est. C’est sur le terrain de la connaissance, de l’intelligence que les élites auto-proclamées, du moins pour leurs déclinaisons intellectualistes, ont été roustées. J’en suis triste pour eux.

      Ces strates très particulières se disant volontiers de gauche sont très peu convaincantes dans leur attachement au respect des individus et de la démocratie. Du moins il me semble qu’elles le sont beaucoup moins que des petits groupes qu’on retrouve partout dans le monde et qui essayent de faire du net des lieux de construction de libertés et de processus démocratiques (par exemple des Wikis), sans se gargariser de mots emblematiques de "gauche", de la couleur des mots.

      L’individu et le changement de société.
      Mon choix est de forces de gauche qui tant dans le processus et le combat, que dans la société future à construire, les fonctionements soient toujours + garants des libertés individuelles et de la protection des individus que ne peut le faire le liberalisme.

      A chaque instant, la gauche doit montrer, dans ses fonctionements internes, ses pratiques, et ses objectifs que les individus sont + respectés là qu’ailleurs.

      Ca passe par des procedures démocratiques internes aux forces de gauches, procedures qui empechent la subordination des individus à des collectifs controlés despotiquement, ça oblige également à ne pas se trouver dans des batailles douteuses , egalement de proposer un système où les individus soient plus libres que dans le système capitaliste. Mais pas moins libre.

      Mais qu’on ne s’y trompe pas, nous sommes une espèce sociale et ça ne peut être changé sous peine de malaise et de déprime des individus. Ca sera bien au travers de la force des collectifs que s’expriment les libertés individuels et de l’individualisme.

      Copas...

  • Toujours le même refrain, l’individualisme... Mais c’est un philosophe contemporain comme Bernard Stiegler (et non pas quelque keynesiano-marxisme "rance") qui soutient que ce sont les processus d’individuation même qui sont sociaux. La singularisation de l’individu, sa construction personnelle s’opère par et dans des schèmas émotionnels et intellectuels "donnés" par la "culture" (au sens très large du terme). Selon lui la colonisation par l’idéologie de tous les aspects de la vie, techniquement aujourd’hui "suréquipée" avec le multimédia, depuis la plus petite enfance (tv, "jeux" vidéo, manga...), serait parvenu à un tel point qu’elle menacerait ces processus d’individuation même, caractérisant ce qu’il n’hésite pas à décrire comme une "décadence des démocraties industrielles" (cf. Mécréance et discrédit 1. La décadence des démocraties industrielles. 2004. Ed. galilée). Vanter les vertus de pauvre zombie entièrement programmé par les "industries culturelles", dont la publicité célèbre la "liberté" de "choisir" entre telle ou telle marchandise-mode de vie rigoureusement interchangeable, voilà qui ne nous change guère du discours permanent et ininterrompu du Marketing, et sa version pseudo-politique le soi-disant "libéralisme". C’est bien plutôt de la destruction des individualités par l’ "indivdualisme contemporain" qu’il faudrait réfléchir. Quant à la critique du despotisme bureaucratique (qui lui aussi envahit chaque jour davantage un petit peu plus le moindre geste de la vie quotidienne) de la marchandise et de l’Etat, qui pourrait être sous-jacente à ce discours apologétique de l’"individualisme de gauche", force est de constater qui l’est absent. Comment s’en étonner quand on sait que les auteurs évoluent comme des poissons dans l’eau dans les multiples et lourds appareils étatico-bureaucratiques (presse, médias, universités, partis politiques bureaucratiques, commissions téodules...).
    Ces discours sont la version "alter" de l’apologétique du marketing contemporain.

    • "lndividualisme", "nécessité d’individuation" je trouve que c’est un raccourci aussi manipulateur que ceux qui parlent de liberté avec le libéralisme, pourquoi ne pas parler de spiritualité avec les spiritueux....
      ce que je veux dire est que je trouve tout ça très compliqué , que je suis très fortement attaché au respect de l’INDIVIDUALITE de chacun, pour moi il ne peut y avoir de relation qu’avec quelqu’un d’autonome, de responsable et d’individualisé, solide dans ses baskets,et c’est pour moi une base de coopération... mais que je n’ai aucun respect pour l’ INDIVIDUALISME qui n’est que compétition sans aucun rapport à la compétence,un chacun pour soi en toute libéralité... je commencerai à y préter attention quand on m’aura expliqué la différence entre le "meilleur" et le "moins mauvais"

      µarc

  • Corcuff est la pour relever le niveau c’est sa raison d’etre,partout ou il intervient c’est pour
    montrer qu’il est au dessus de la mélée,il fait partie de ses demystificateurs professionnels que
    n’aimait pas BOURDIEU.
    Et puis effectivement il débale une petite rethorique jargonneuse destinée à impressionner l’habitué de Bella ciao en général un Militant, plus intéressé par les stratégies électorales et les gesticulations agit-prop.
    Mais Corcuff ,derriere ces vieilles lunes que sont les débats sur la conciliation entre l’individualité
    et le collectif ,cherche plutot à liquider l’héritage marxiste qui survit dans la mouvance altermondialiste.
    Au prétexte de réorienter les mouvements de contestation ,Corcuff cherche d’avantage à les vider de leur substance réélement alternative.
    Corcuff pontifie comme Négri ,bientot il débitera ses ponts-aux anes sur les plateaux TV comme Sollers ou Cohn Bendit.