Accueil > Ne nous trompons pas de cible

Ne nous trompons pas de cible

Publie le vendredi 1er août 2003 par Open-Publishing

REACTION DE LA FEDERATION CGT DU SPECTACLE A LA
COMMUNICATION DE JJ AILLAGON SUR LES ANNEXES 8 ET 10
LORS DU CONSEIL DES MINISTRES DU 31 JUILLET 2003

A l’occasion du conseil des ministres qui s’est tenu le 31 juillet
2003, Jean-Jacques Aillagon a présenté une communication relative au
régime d’assurance chômage des salariés du spectacle, du cinéma et de
l’audiovisuel. Les appréciations portées par le Ministre de la
Culture et de la Communication à l’occasion du conseil des ministres
appelle de notre part à un certain nombre de commentaires.

En premier lieu, le Ministre de la Culture a estimé que l’accord du
26 juin « pérennise les Annexes 8 et 10 ». Et d’ajouter que « les
aménagements qu’il a reçus le 8 juillet à la demande du Ministre de
la Culture et de la communication ainsi que les éclaircissements
apportés par l’UNEDIC sont de nature à clarifier les conditions
d’application de la réforme.. »

De la sorte, Jean-Jacques Aillagon persiste et signe sans qu’il ne
réponde aucunement aux observations que notre Fédération lui a fait
parvenir dès le 1er juillet 2003. En effet, qui peut démentir que la
réduction de la période de référence pour la recherche des droits et
l’amputation de la durée d’indemnisation ne va pas se traduire par
l’exclusion de milliers de professionnels ? Selon les statistiques
fournies par l’UNEDIC, ce seraient des dizaines de milliers de
professionnels qui seraient exclus de toute indemnisation alors que
la plupart d’entre eux ne perçoit actuellement qu’une indemnité
journalière de l’ordre de 15 ?. Qui peut sérieusement nous contredire
lorsque nous affirmons que le recours abusif à l’intermittence de
l’emploi organisé par certaines entreprises va perdurer ?

Contrairement aux affirmations du Ministre de la Culture, les
aménagements qui ont été apportés dans l’avenant du 8 juillet ne
répondent pas à ces deux questions principales qui sont à la base de
la mobilisation des professionnels dans tout le pays.

Qui plus est, le Ministre fait état d’éclaircissements apportés par
l’UNEDIC sur les conditions d’application de la réforme. Faut-il
rappeler au Ministre les termes de la loi ? Ce sont les textes signés
par les partenaires sociaux et eux seuls qui ont une valeur juridique
dès lors qu’ils reçoivent un agrément ministériel. Toute modification
d’un texte signé renvoie en effet à la réunion de tous les
partenaires sociaux.

Enfin, et sans être exhaustifs, l’affirmation du Ministre selon
laquelle il s’est « attaché à éviter le démantèlement pur et simple
auquel était promis ce régime du fait de ces dérives financières, du
doublement des allocataires depuis 10 ans et des abus constatés. »
est fausse. Elle laisserait à penser qu’il fallait absolument
conclure avant ou durant l’été. Or, tel n’est pas le cas. Pour s’en
convaincre, il est indiqué dans le protocole d’accord sur le régime
d’assurance chômage du 20 décembre dernier que « les partenaires
sociaux ouvriront une négociation sur les Annexes 8 et 10 au cours du
premier semestre 2003 ». Il n’y avait donc aucune raison de conclure
dans la précipitation, et ce d’autant plus qu’une loi avait été
adoptée à l’unanimité par l’Assemblée Nationale le 21 février 2002
qui « prorogeait les Annexes 8 et 10 en vigueur dans l’attente d’un
accord des partenaires sociaux assorti d’un agrément ministériel ».

Le Ministre de la Culture parle d’avancées pour les intermittents et
qualifie ce protocole d’acquis essentiel. De qui se moque-t-on ? Faut-
il rappeler que nous n’avons cessé, dès le 27 juin au matin, de
demander aux pouvoirs publics une expertise sur les conséquences de
ces textes ? Nous l’attendons toujours. Cela n’empêche pourtant pas
le gouvernement de confirmer qu’il agréera ce texte qui, faut-il le
rappeler, a été signé côté salariés par des organisations très
largement minoritaires.

Au-delà de ce protocole d’accord scélérat, le gouvernement a annoncé
trois priorités à savoir la lutte contre les abus, la mise en place
tant au niveau régional que national d’instances régulières de
dialogue et de concertation sur l’emploi dans le spectacle vivant, et
la refondation des politiques publiques en faveur du spectacle vivant
et de la musique.

Ces trois priorités - mais aussi d’autres - font partie, depuis de
nombreuses années, de nos revendications. Concernant les abus, il
n’est pas inutile de rappeler que des mesures avaient été arrêtées
par l’ensemble des partenaires sociaux et le gouvernement en avril
1997. Celles-ci n’ont pas été mises en ouvre malgré toutes nos
démarches. S’agissant des contrôles de l’inspection du travail, nous
sommes dubitatifs au regard des restrictions des crédits dont
disposera en 2004 le Ministère des Affaires Sociales. S’agissant du
dialogue, de la concertation et de la refondation des politiques
publiques en faveur du spectacle vivant et de la musique (pourquoi en
exclure le cinéma et l’audiovisuel ?), le Ministre de la Culture
annonce des Assises Nationales dès l’automne avec les artistes, les
professionnels et les collectivités publiques. Aurait-il l’intention
d’en exclure les organisations syndicales représentatives ?

Jean-Jacques Aillagon annonce que ces Assises pourraient déboucher
sur une loi d’orientation sur le spectacle vivant. Dont acte. Mais
pourquoi pas une loi d’orientation pour la culture comme nous le
revendiquons depuis de nombreuses années ?

Par ailleurs, nous observons que le Ministre de la Culture s’est
adressé à ce sujet, par courrier le 29 juillet, à 500 artistes. Il a
cru utile d’affirmer qu’il avait été « choqué, parfois, par
l’utilisation que certains ont pu faire de ce mouvement, en
amplifiant sciemment et très exagérément les angoisses de chacun ».

A qui fera-t-on croire que la responsabilité de la crise que nous
connaissons incomberait « à certains » (selon certains médias à la
CGT spectacle) alors que nous n’avons cessé, depuis début le mois de
janvier, d’alerter le Ministre de la Culture et de lui demander
l’ouverture d’une concertation préalable aux discussions
interprofessionnelles ?

Qui peut nier que c’est le Président du MEDEF qui a dicté les
échéances avant l’été ? Qui peut contester que l’accord du 26 (de
même que l’avenant du 8 juillet d’ailleurs) avait été ficelé entre le
MEDEF et la CFDT avant sa signature ?

Nul ne s’y trompe parmi les professionnels comme en attestent les
actions multiformes dans toute la France et toutes les pétitions qui
regroupent l’ensemble des corps professionnels concernés.

Monsieur Aillagon, nous ne sommes pas dupes.
Nous n’avons pas oublié les propos réitérés de Monsieur Seillières.
Nous n’admettrons pas que la politique sociale et culturelle de ce
pays soit dictée par le MEDEF.

Vous avez décidé de faire passer en force le protocole du 26. Vous
portez l’entière responsabilité de la crise que nous connaissons.
Fidèles à nos conceptions syndicales et à l’intérêt des
professionnels du spectacle vivant et enregistré mais aussi du
public, nous ne cèderons pas.

Si le gouvernement donne l’agrément, nous porterons cette affaire
devant les tribunaux compétents.

Paris, le 31 juillet 2003