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"La position du gouvernement est intenable"

Publie le mercredi 6 août 2003 par Open-Publishing

in : http://permanent.nouvelobs.com/societe/20030805.OBS4445.html


"La position du gouvernement est intenable"

Gilles Grall
est trésorier de la Fédération des Syndicats du Spectacle

- Vous venez de prendre connaissance de l’avis du Conseil supérieur
de l’emploi. Qu’en ressort-il ?

Durant cette réunion, la Fédération des Syndicats du Spectacle a
vigoureusement dénoncé un "tripatouillage" des textes. Nous pouvons
prouver que le texte présenté au Conseil supérieur de l’emploi ce
mardi est différent du texte signé le 8 juillet. De même, l’avenant
du 8 juillet avait été adopté sans respecter le rôle des partenaires
sociaux. Aujourd’hui encore, des modifications ont été apportées sur
le texte sans aucune consultation des syndicats : le document
présenté à l’avis du Conseil est tout simplement un faux.
La définition de la franchise, la période durant laquelle les
intermittents ne sont pas rémunérés, notamment calculée en fonction
de leurs revenus, a été changée. Or, cette altération va dans le sens
des revendications des intermittents.

Il faut savoir que la CFDT a récemment demandé à l’UNEDIC un rapport
sur les conséquences réelles de l’accord qu’elle a signé le 26 juin.
Au vu du désastre à venir, la CFDT, le MEDEF et le gouvernement n’ont
eu d’autre solution que de faire machine arrière. Simplement, pour ne
pas avoir à nous donner raison, ils ont modifié le texte dans le sens
des intermittents en catimini et dans le mépris des lois le plus
total. Si le président Chirac dénonçait les "patrons-voyous", on est
aujourd’hui face aux "syndicats-voyous".

- La mise en œuvre de l’accord semble donc inéluctable. De quels
recours disposent encore les intermittents ?

Nous sommes convaincus que Jean-Jacques Aillagon va agréer ce texte,
comme il l’avait de toute façon annoncé dès le 27 juin, mais nous
persistons dans la demande de réouverture de vraies négociations.
L’avis du Conseil n’est que consultatif, mais que M. Aillagon le
suive ou non reviendra au même puisque le Conseil est constitué des
mêmes signataires que ceux de l’accord du 26 juin. Le gouvernement ne
prend donc aucun risque. Cependant, nos avocats étudient déjà les
recours juridiques envisageables, bien qu’il soit possible que le
ministre passe en force une fois encore, en faisant adopter le texte
par le conseil d’Etat.

Mais notre meilleur atout reste la mobilisation des professionnels,
puisqu’il n’y a aucune volonté de dialogue du côté du gouvernement.
Nous avons bien entendu M. Raffarin mettre le "dialogue social" au
cœur de son discours. Dans notre cas, il y a bien dialogue, mais il
se résume à des négociations entre le MEDEF et la CFDT.

- Quel regard portez-vous sur les actions du début de l’été ? Face à
un gouvernement qui reste sourd aux demandes de renégociations, va-t-
on vers un essoufflement ou une radicalisation des actions ?

Nous entrons dans un troisième mois de mobilisation. Etant chargé du
contact entre les vingt branches régionales du syndicat, je peux vous
assurer que le mouvement est loin de s’essouffler, au contraire il se
structure. On recense à ce jour 35 organismes de coordination de
notre syndicat en France, dont les actions affectent tous les jours
des manifestations culturelles. En ce qui concerne les actions
passées, je considère qu’elles ont eu une portée significative
puisqu’elles ont construit le rapport de force sans lequel rien ne se
serait passé. Quand à la suite des événements, la rentrée théâtrale
ne peut se dérouler comme si rien ne s’était passé : le combat est
loin d’être terminé. C’est la position du gouvernement qui est
intenable. Il sait que le texte est mauvais puisqu’il le modifie. De
plus, il a affirmé vouloir mettre fin aux abus d’utilisation du
statut intermittent par cet accord ; or le texte stipule que les
nouvelles annexes n’ont "pas vocation à réglementer les conditions de
travail ou de contrôle des abus". Quelle est la raison d’être de cet
accord ? Le gouvernement pense devoir ressusciter l’esprit de Margaret
Thatcher. Mais nous ne sommes pas en Angleterre.