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Bolkestein : le scénario catastrophe pour le cinéma et les intermittents

Publie le jeudi 8 juin 2006 par Open-Publishing

Bolkestein : le scénario catastrophe (libre belgique )

La libéralisation des services laisse planer le doute sur l’avenir du cinéma européen, avertit la ministre Laanan. Les professionnels appellent le Parlement à la rescousse.

Voilà le mixeur polonais. Après le plombier débarqué de Varsovie et qui, en quelque temps, s’est imposé comme étendard des pourfendeurs de l’Europe libérale, l’heure du mixeur cinématographique a-t-elle sonné ? Peut-être. « Faire un film, c’est autre chose que de parler en terme d’intérêt sec, relève le cinéaste Stéphane Liberski. Et si on doit, du jour au lendemain, se mettre à travailler avec des mixeurs polonais, ce serait évidemment beaucoup plus compliqué pour le réalisateur. »

Ils sont là -cinéaste, réalisateur, producteur- alignés autour de la ministre en charge de la Culture et de l’Audiovisuel de la Communauté française (PS). Et ils s’inquiètent. Ils s’inquiètent des conséquences du vote de la directive sur la libéralisation des services en Europe (ou directive « Bolkestein »). « C’est confus, il faut clarifier les choses », tempête Fadila Laanan. C’est que, dans la version avalisée le 29 mai par les ministres de l’Economie (rappel, Belgique et Lituanie se sont abstenues de voter), la mention « cinéma » fait place à « services cinématographiques » à l’heure d’énumérer les services qui ne seront pas soumis aux lois du marché.

« Quelle forme de cinéma ? »

« Il y a anguille sous roche », pense la ministre belge qui a interrogé son alter ego autrichien lors d’une réunion en marge du Festival de Cannes sur « cette définition plus restrictive et ambiguë ». Celui-ci, qui pilote l’Europe de la Culture jusqu’en juillet, s’est montré incapable de dire qui était à l’origine de la modification. « On se demande si il y a une volonté de la part de la Commission européenne et de la présidence autrichienne de ne pas exclure tout le secteur du cinéma du champ de la directive », poursuit Fadila Laanan.

La directive « Bolkestein » vise à faciliter l’établissement d’une entreprise partout dans l’Union et la libre prestation dans un autre pays que le sien ; la philosophie étant d’éliminer les obstacles superflus qui découragent les opérateurs. « Sous le coup de cette nouvelle réglementation, les aides d’Etat au secteur cinématographique pourraient être sérieusement affectées », note Laanan. A Cannes, cette année, plusieurs productions belges ont bénéficié des euros de la Communauté française. Des films comme « La raison du plus fort » (592 000 euros), « Congorama » (198 000 euros) ou « Komma » (282 000 euros) ont été subsidiés. « Il faut savoir quelle forme de cinéma nous voulons, plaide Luc Jabon, président du Comité belge de la société des auteurs et compositeurs dramatiques. Voulons-nous uniquement des grosses productions ? Non ! Sans aides d’Etat, il ne restera que ce type de productions. »

La directive doit, à présent, repasser à l’examen du Parlement européen pour être adoptée. Mardi, les professionnels belges du cinéma ont lancé un appel aux eurodéputés afin qu’ils se mobilisent sur cette question. Et évitent de se transformer en fossoyeurs d’un certain cinéma européen.