Accueil > ALTERCITOYEN : Christian DELARUE soutient Bellaciao... Merci Christian

ALTERCITOYEN : Christian DELARUE soutient Bellaciao... Merci Christian

Publie le mercredi 27 septembre 2006 par Open-Publishing

CITOYEN CONFINE, SEPARE, EXCLUS ou CITOYEN D’EMANCIPATION

de Christian DELARUE

Face à la mondialisation capitaliste sous ses trois formes marchande, financière et d’appropriation privée, ATTAC a placé le citoyen au centre de son dispositif intellectuel et militant afin d’une part d’en assurer sa promotion - le citoyen dispose d’un rôle mineur dans les démocraties réellement existantes - et d’autre part pour assurer la construction d’un autre monde vraiement autre par l’activité citoyenne.

Un défi, une gageure ! Je tiens cette promotion du citoyen pour ambiguë dès lors que le peuple est ignoré (il ne figure pas dans Alter, le nouveau dictionnaire altermondialiste), que l’égalité n’est pas assurée et que la "démocratie participative" ne tend bien souvent qu’à des faux-semblant d’intervention citoyenne.

La notion de citoyen qui fait le lien entre deux "cultures" présentes au sein d’ ATTAC, la culture de mouvement et culture de gouvernement, semble s’accommoder de la vision libérale d’une société globale clivée entre société civile et Etat. Pour autant il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain : Contre le citoyen instrumentalisé par le néolibéralisme l’altermondialisme a raison de défendre et promouvoir le citoyen collectivement engagé pour la libération des peuples.

I. - CITOYEN ENTRE SOCIETE CIVILE ET ETAT : LE CITOYEN INSTRUMENTALISE PAR LE NEOLIBERALISME.

Le citoyen est le bouche-trou des théories libérales . Sans lui le vide de la séparation aliénante entre l’Etat et la société serait intolérable.

A) Le citoyen comme masque de la séparation entre société civile et Etat :

On ne voit pas d’emblée cette séparation entre société civile et Etat puisque l’accent est mis d’une part sur les notions englobantes, d’autre part sur les rapports de médiation qui masquent la séparation.

Les libéraux aiment les notions englobantes, les entités unies sous un destin commun sans conflit ni rapports sociaux. Ils aiment la Nation, la famille, l’entreprise. Si structuration il y a c’est sur le mode de la complémentarité dans la hiérarchie : l’Armée et le drapeau pour la nation, le père pour la famille, le chef d’entreprise propriétaire et manager pour l’entreprise. Le seul clivage mis en avant par les libéraux mais qui camoufle tous les autres c’est celui de la société civile contre l’Etat. Il fait le bonheur des libéraux et sociaux-libéraux et ce quelque soit leur positionnement de part et d’autre de ce clivage, qu’ils soient acteurs de la société civile ( patrons ) ou acteurs étatiques (élu ou haut fonctionnaire).

La théorie libérale est celle ou "tous les chats sont gris" ou il n’y a ni bourgeois ni prolétaire, ni Etat de classe .La théorie constitutionnelle classique enseignée dans les universités et tout particulièrement celle de la démocratie ignore les rapports sociaux qui clivent la société et donc les inégalités structurelles distributrices de pouvoirs institués, de dominations, d’exploitation, d’oppression .

B) Les médiations entre société civile et Etat :

Cette théorie et ses diverses variantes prend la société civile comme un tout et met en rapport cette société civile et l’Etat. A ce stade il sera évoqué soit les "corps intermédiaires" entre la société civile et l’Etat, autrement dit les associations, syndicats qui mettent en mouvement la société civile ; soit la théorie de la représentation qui légitime les pouvoirs de l’Etat démocratique et séculier . La théorie de l’Etat de droit ne vient qu’ensuite compléter ce dispositif.

 La médiation sociale : Les associations peuvent avoir un positionnement ambigu par rapport à l’Etat car soit elles viennent compléter bénévolement son action (jugée insuffisante au regard des besoins non satisfaits) tout en le percevant comme un outil neutre, soit elles portent une critique qui atteint la nature même de l’Etat, notamment son rôle de "Conservateur" de la propriété privée des moyens de production et d’échange ou son rôle de redistribution des richesses au profit des riches. Une association qui s’inscrit dans une perspective et une dynamique altermondialiste ne saurait s’accomoder d’un rôle d’accompagnement social du libéralisme. Cette ambiguîté n’épargne pas les syndicats de salariés pourtant inscrits au coeur du conflit de résistance face aux attaques de la classe patronale.

 La médiation individuelle : Avec l’invention de la représentation, la société civile est individualisée sous la forme du citoyen, doté du pouvoir "un homme = une voix" . Cette théorie adopte ce faisant une vision contractuelle de la représentation par laquelle chaque citoyen opère délégation de souveraineté . Elle en vient alors à décrire les mécanisme de représentation, souligner les distortions, etc. Elle va étudier les rapports entre le mandataire et le mandant et la meilleure représentation possible. La population est y est conçue comme une addition de citoyens qui délèguent leur souveraineté en se faisant représenter.

II. - POUR UNE CITOYENNETE D’EMANCIPATION ET DE LUTTE

A ) Un engagement fondé sur la critique de la représentation et l’invention de l’Etat séparé (2) :
Car il y a aussi un autre statut de la représentation, inspiré de Marx : celle-ci serait la forme d’organisation politique de la société civile-bourgeoise (1). C’est alors le mouvement d’organisation politique de la société qui est le point de départ : "L’élection est le rapport réel de la société civile bourgeoise réelle à la société civile bourgeoise du pouvoir législatif, à l’élément représentatif. Ou : l’élection est le rapport immédiat, le rapport direct, qui n’est pas simplement de représentation, mais d’être, de la société civile-bourgeoise à l’Etat politique" ( ) La représentation est d’abord ce par quoi s’institue l’Etat politique. Ce qui donne lieu à une double critique formelle et de contenu.
 Formelle : Les députés de la société civile bourgeoise sont une société qui n’est pas en liaison avec ses commettants par la forme de l’instruction de la commission. Formellement ils sont commis mais dès qu’ils le sont réelement ils ne sont plus des commis. Ils sont censés être des députés, ils ne le sont plus.
 Matérielle : En ce qui concerne les intérêts , c’est l’inverse qui a lieu. Ils sont commis en tant que représentant de l’affaire universelle mais représentent réellement les affaires particulières.

B) Le citoyen engagé pour la libération du peuple et des peuples...

Pareille critique aide à voire l’intervention de l’Etat dans la société sur le mode foncièrement inégalitaire, notamment dans son rôle essentiel et primordial de conservation et promotion de la propriété privée , rôle camoufflé par le discours socialibéral de "justice sociale" et de "démocratie participative" des élites politiques et administratives . L’Etat n’est pas neutre et la société civile est elle-même clivée entre peuple et dirigeants, entre salariés et patrons. Dès lors, la lutte citoyenne se mène contre le néolibéralisme agissant tant dans la société civile qu’au coeur de l’Etat . Car le néolibéralisme s’emploie à détourner les aspirations de chacun à la maîtrise individuelle et collective du destin commun, à la participation aux choix de la production sociale de l’existence.

...et pour l’égalité : Une telle participation ne saurait se concevoir avec les autres inégalités notamment racistes. Si des camarades d’ ATTAC souhaitent se placer plus sous les auspices de Jaurès que de ce Marx-là afin d’en appeler à "lier le combat laic et le combat social" (cf B Teper ) alors soyons clair et faisons dire à Jaurès qu’il approuve ce qui est au coeur d’une dynamique citoyenne et républicaine à savoir l’égalité "une et indivisible". Il en va de la lutte contre le sexisme et le racisme. Et le racisme diffusé sous le discours sécuritaire contemporain est bien la dynamique radicalement anticitoyenne, antiégalitaire incompatible avec la construction d’un autre monde possible.

Christian DELARUE Rennes
Secrétaire national du MRAP
Membre du CA d’ ATTAC France

Altercitoyen : texte issu de
http://krismondial.blogg.org/

notes :

1) Lire "Marx, l’Etat et la politique" par Antoine ARTOUS Syllepse

2) Sur la double séparation à surmonter : ATTAC mouvement anti/altermondialiste donc mouvement d’émancipation ! Christian Delarue http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=19670