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Italie "le Budget" : certaines choses à défendre, beaucoup à améliorer

Publie le jeudi 12 octobre 2006 par Open-Publishing

de Claudio Grassi* traduit de l’italien par karl&rosa

L’entité du Budget de l’Etat 2007 dessine une opération objectivement "lourde", qui répond aux contraintes de l’Union Européenne et s’engage à ramener en 2007 le rapport déficit/PIB à 2,8% et l’avance primaire à 2%.

Sur ce terrain la gauche alternative doit enregistrer une nette défaite : la proposition avancée ces derniers mois par un réseau très ample d’éminents économistes de stabiliser la dette a été refusée, l’hypothèse - soutenue même par le ministre Ferrero - d’étaler la réduction de la dette sur deux ans n’a pas été acceptée et même la demande des organisations syndicales de réduire d’une façon significative l’entité globale de l’opération n’a pas été écoutée.

L’analyse de l’opération doit être faite dans ce cadre. Une analyse forcément articulée, mettant en évidence les pas en avant réalisés (les éléments de discontinuité par rapport aux budgets du centre-droit) et les très profondes limites, qui inquiètent.

Le débat parlementaire, appelé à intervenir sur le texte rédigé par le Conseil des Ministres, ne doit pas reculer sur le résultat le plus encourageant parmi ceux qui ont été atteints (sur lequel s’est déchaînée la campagne de revanche de classe de la droite et de Confindustria [correspondant en Italie au MEDEF, NdT] : le combiné de la réforme des taux IRPEF et du nouveau régime des détractions (allocations familiales, détractions liées à la charge familiale, détractions liées au travail). Par la réforme fiscale on réalise une action d’indiscutable redistribution vers les couches de revenu les plus basses. En dessous de 40.000 euros, les revenus nets économisent jusqu’à 800 euros par an, la tranche haute des couches de revenu moyen subit, parallèlement, une aggravation, dans certains cas consistante et sensible.

Nous sommes encore loin de l’esprit de l’article 53 de la Constitution : le critère de la progressivité tributaire (vers laquelle on démontre de toute façon vouloir procéder à travers la nouvelle modulation des taux IRPEF) se heurte inévitablement à une réalité dramatique d’évasion et de contournement du fisc. Nous ne nous lasserons jamais de dire qu’il faut un système qui reconnaisse les revenus patrimoniaux :ce n’est qu’ ainsi que nous serons sûrs de faire payer aux riches ce qui leur revient.

Ce gouvernement s’est engagé à combattre l’évasion et les 10 milliards de récupération indiqués dans le budget 2007 semblent le démontrer. Il faut vite passer des paroles aux faits.

Ce budget contient d’autres points lumineux (comme la hausse de 12,5% à 20% du taux sur les plus-values et les spéculations financières). Des points lumineux qui risquent pourtant d’être assombris lourdement par les fautes, profondes et inacceptables, contenues dans le même texte.

La première est celle qui concerne les coupes aux autonomies locales. 4,6 milliards d’euros sont une grosse pierre qui se traduira en une augmentation de l’IRPEF, de l’ICI [impôt communal sur les immeubles, NdT] et, vraisemblablement, en des réductions des services sociaux. Si même la ministre Lanzillotta (première signataire du bien connu projet de loi ultralibérale sur les services publics locaux) ressent l’urgence de « rééquilibrer les nouvelles mesures introduites », si l’ANCI [Association Nationale des Communes Italiennes, NdT] est sur le sentier de guerre, il est évident que quelque chose ne va pas. Et ce quelque chose, c’ est le risque concret que le solde entre les avantages fiscaux et les aggravations de la taxation locale soit, pour de larges secteurs populaires, tout à fait négatif.

Les coupes de l’assistance maladie, de l’ordre de 3 milliards, s’ajoutent à cela. Parmi les différentes mesures, le durcissement des tickets modérateurs est odieux, simplement irrecevable.

Et si l’article 114 consacre, entre 2007 et 2009, 85 millions d’euros aux entreprises en difficulté, l’article précédent, le 113, prévoit, sur trois ans, 4.450 millions (cinquante fois plus !) pour le « fond pour les exigences d’investissement pour la défense » c’est-à-dire, avant tout, pour de nouveaux armements.

Enfin le travail, avec deux injustices macroscopiques : de la coupe de cinq points du coin fiscal (déjà distribuée dans une mesure insatisfaisante au profit des entreprises) les salariés ne recevront rien dans la poche, grâce à la destination à la globalité des contribuables de ces 4 milliards bruts d’euros ; les très précaires para subordonnés subiront - avec des salaires inchangés - une augmentation des cotisations de 18,2% à 23%.

Si les riches pleurent, même pour nous il n’y a pas tellement de quoi rire. Maintenant c’est au tour des forces de la gauche d’alternative d’éviter, au Parlement, que les avantages soient annulés par les pertes et que les efforts accomplis pour arracher la redistribution présente dans ce budget soient rendus vains par les lourdes retombées des pires mesures de l’opération. Mais c’est à la société aussi, sans laquelle la politique ne peut pas grand-chose.

Que reprenne dans le pays une initiative diffuse, de masse, qui sollicite et accompagne la confrontation parlementaire, en se cramponnant à la défense de ce qui fonctionne et en harcelant radicalement le gouvernement sur tant d’ombres de ce Budget. L’effacement, obtenu presque tout de suite, de cet article 188 qui visait à constituer un fond spécial de renouvellement et financement automatique pendant trois ans des missions à l’étranger déjà opérationnelles (y compris celle en Afghanistan), démontre qu’il est possible de changer ce texte. La deuxième phase du Budget vient de commencer.

* Sénateur de Rifondazione comunista

http://www.ilmanifesto.it/Quotidiano-archivio/10-Ottobre-2006/art37.html

http://bellaciao.org/it/article.php3?id_article=15158