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Via Campesina : « le FSM est l’occasion de renforcer nos liens entre Amér. latine et Asie

Publie le mardi 20 janvier 2004 par Open-Publishing

Via Campesina : « le FSM est l’occasion de renforcer nos
liens entre Amérique latine et Asie »


Entretien avec Rafael Alegria, secrétaire exécutif de Via Campesina (environ
60 millions de paysans au niveau mondial).

Q : Quelle est le sens de la présence de Via Campesina au FSM de Mumbai
 ?

R : Nous sommes 200 délégués du monde entier à participer cette année au Forum
social mondial. Pour nous, le FSM est un moment très important car il correspond à l’appel
que nous avions lancé en 1999, après la mobilisation de Seattle contre l’OMC, à la
constitution d’une alliance stratégique internationale pour lutter contre l’hégémonie
des organismes financiers internationaux. C’est la raison pour laquelle nous
faisons un gros effort de participation depuis le premier Forum. À Cancun, nous
avons obtenu un succès qui doit maintenant connaître des prolongements. C’est
le sens que nous donnons à notre présence ici.

Q : Quels contacts avez-vous avec les syndicats et mouvements paysans
indiens ?

R : La KRRS, de l’État de Karnataka, qui est l’organisation indienne membre de
Via Campesina, est ici mais participe au Forum « Mumbai Résistence ». Nous avons
aussi d’autres partenaires dans la région, en particulier aux Philippines, au
Vietnam et au Japon, et nous sommes en train d’établir des ponts avec une coalition
paysanne et d’autres mouvements sociaux. Nous profitons aussi du fait que nous
sommes en Inde pour renforcer nos liens, en particulier entre Amérique latine
et Asie. Être ici, c’est ressentir dans notre propre chair les inégalités et
l’extrême pauvreté de la population, mais c’est aussi constater que les pauvres
et les opprimés sont majoritaires dans les participants au Forum. L’Asie, ce
sont les deux tiers de la population mondiale et Via Campesina se nourrit beaucoup
des expériences de luttes paysannes asiatiques.

Q : Est-ce la présence de votre partenaire indien au Forum « Mumbai résistance » signifie
que le mouvement paysan se radicalise ? Quelle est la position de Via Campesina
 ?

R : Pour nous, se radicaliser signifie adopter une attitude offensive de lutte,
mais ne veut pas dire confrontation. Cependant, c’est vrai que nous sommes préoccupés
de voir qu’il y des initiatives parallèles au FSM avec « Mumbai Résistance »,
avec le Forum des mouvements populaires et d’autres encore. Le problème n’est
pas qu’ils existent puisque, à Porto Alegre, Via Campesina a été la première à revendiquer
un espace particulier pour les paysans et les indigènes. Mais cette diversité ne
doit pas servir à nous confronter et à nous diviser. L’important est que Via
Campesina a établi une sorte de passerelle entre les différents forums et a obtenu
que nous nous rencontrions tous autour d’un débat sur les perspectives de l’après-Cancun
et de l’après-Mumbai.

Q : Quel est le principal problème auquel les paysans que vous représentez
sont confrontés aujourd’hui
 ?

R : Toujours le même, celui de l’accès à la terre. Avant, c’était un problème
grave, mais qui ne concernait que les pays du tiers-monde. Aujourd’hui, les petits
paysans sont partout menacés. Mais le contexte est en train de changer : le thème
de la réforme agraire, par exemple, revient de plus en plus dans le débat public.
Même la Banque mondiale s’en dit préoccupée et a lancé une campagne pour l’accès à la
terre (on sait bien que ça ne va pas résoudre le problème).

Q : Qu’en est-il en particulier en Amérique latine (le secrétariat de
Via Campesina est basé au
Honduras) ?

R : En Amérique latine, nous apercevons actuellement quelques lueurs d’espoir
 : en Argentine, le président Kirchner est en train de revenir en arrière par
rapport au processus de privatisation et au modèle économique néo-libéral. En
Bolivie, au Venezuela, en Équateur, les peuples se sont prononcés contre les
candidats qui incarnent ce modèle. J’espère que ce vent d’espoir va venir souffler
en Europe et sur les autres continents…


Auteur : Isabelle

20.01.2004
Collectif Bellaciao