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Marie George Buffet : Dix heures à la rencontre des Parisiens

Publie le mardi 23 janvier 2007 par Open-Publishing
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Campagne . Avant le meeting du Zénith, demain soir, Marie-George Buffet a débattu vendredi dans différents arrondissements de la capitale avec des salariés, des habitants.

Cour Saint-Émilion (12e arrondissement)

8 h 35. Un homme s’extrait de la foule qui court, à la sortie du métro, vers les immeubles de bureaux de Bercy. Il fait demi-tour. Son fils est autiste. Dans quelques mois il aura seize ans, aucune structure ne le prendra plus en charge. Seule solution : arrêter de travailler, lui ou son épouse. Et, à la maison, l’enfant risque de régresser. « La France est à la traîne des pays développés pour la prise en compte du handicap, il n’y a aucune raison », s’insurge Marie-George Buffet.

Rue Maindron (14e arrondissement)

10 h 5. Une femme ouvre la porte. Une pièce sans fenêtre, seulement un vasistas qui donne sur un couloir. 7 mètres carrés impeccablement rangés, propres. Des lits superposés, un évier et des étagères. Sept personnes vivent là : le grand-père, les parents, quatre enfants. Ils payent 300 euros par trimestre.

10 h 30. Le collectif logement du 14e arrondissement a donné rendez-vous à Marie-George Buffet dans un bar alentour. Amanda serre contre elle un petit garçon d’un an à peine. Quand il avait deux mois, elle et son mari se sont retrouvés deux fois à la rue. Vers 2 heures du matin, ils ont été emmenés dans un hôtel. Depuis le mois de mai, c’est là qu’ils vivent. Un hôtel infesté de cafards et de souris : « J’en ai trouvé dans le lit de mon enfant, dans le linge. » Un hôtel où on ne peut cuisiner, seulement faire des biberons, et pour lequel ils payent 1 050 euros quand le mois a trente jours, 1 085 euros quand il en a trente et un. « Mon mari gagne 1 100 euros, on va me couper le RMI parce qu’on nous dit qu’on est au-dessus du plafond. » Amanda égrène son budget. Une fois payé le nécessaire pour le petit, elle ne peut plus acheter que du pain. « Je ne demande qu’un studio pour avoir un peu la tête tranquille et chercher du travail. J’ai de la peine pour mon enfant. »

Des mains se lèvent pour témoigner. L’une est enseignante : divorce, dépression, expulsion. En formation de reconversion elle est hébergée par des amis, sa fille habite chez son père. Une autre travaille et gagne 1 500 euros. Ses deux enfants de neuf et cinq ans dorment chez ses parents, elle dans la cave. D’autres histoires encore qui nouent la gorge. « Il faut dire que ça peut arriver à n’importe qui, dit en aparté une femme d’une cinquantaine d’années. Je suis fille d’universitaire, je sors d’un cancer, je cherche du travail. Je vis à droite, à gauche, séparée de ma fille. »

Les premiers mots de Marie-George Buffet sont pour dire le courage de ces femmes, pour rendre hommage au collectif qui organise la lutte et la solidarité. Devant l’ampleur de cette crise du logement, « aussi grave que dans les années cinquante, le droit opposable est un plus, mais il faut en face de vraies solutions ». La candidate propose l’interdiction des expulsions, les réquisitions face à l’urgence, la mise en chantier immédiate de 600 000 logements sociaux, l’interdiction de toute destruction sans construction préalable, le plafonnement de la charge logement à 20 % du revenu des familles, l’inéligibilité pour les maires qui en dépit de la loi refusent de construire des logements sociaux sur leur commune. Et elle appelle à ne pas suivre « ceux qui veulent opposer les uns aux autres. Tout le monde est prioritaire, il faut que le logement devienne un droit ».

Devant le Printemps (9e arrondissement)

12 h 30. Une syndicaliste : « La vie est de plus en plus dure avec l’extension des horaires, la précarité, la pression qui augmente. Les salaires sont tellement bas qu’on en arrive à vouloir travailler le dimanche. » Une autre : « Que ferez-vous au second tour ? Et Si Ségolène Royal gagne, irez-vous dans un gouvernement avec le PS ? » Marie-George Buffet : « Si la politique ne résout pas les problèmes des gens, elle ne sert à rien. Nous n’irons pas dans une alliance qui ne romprait pas avec le social libéralisme. Nous continuerons à nous battre. Mais au second tour, c’est très clair, toute la gauche doit se rassembler, sans condition, pour arrêter Sarkozy. »

Hôpital Saint-Louis (10e arrondissement)

13 h 45. Toujours le logement. Un médecin explique la difficulté à recruter des infirmières, des techniciens de laboratoires. Un travail prenant, des horaires difficiles. Ajouter le temps de transport parce que les salaires ne correspondent pas aux loyers parisiens. Résultat : 500 postes infirmiers budgétés ne sont pas pourvus à l’AP-HP (Assistance publique-Hôpitaux de Paris). Devant les médecins et les responsables de l’hôpital, Marie-George Buffet dit sa volonté de « porter dans le débat citoyen une ambition pour l’hôpital public et pour la santé ». Alors que la médecine avance, que la durée de vie augmente, la baisse des coûts a une limite. « L’économie a évolué, elle s’est financiarisée. Mais les modes de financement de la protection sociale n’ont pas changé », souligne-t-elle, en proposant de faire contribuer les revenus financiers.

14 h 20. Dans le local syndical avec des personnels et les représentants de la CGT et de la CFDT. Une femme se présente : cuisinière titulaire. À ses côtés, quatre jeunes portent la veste blanche des cuisiniers. « Eux sont en CDD depuis plus d’un an, dit-elle. On les a fait espérer. Mais on vient de leur dire que leurs contrats s’arrêteront fin février. C’est tombé comme un couperet, ce n’est pas acceptable. Est-ce qu’on va nous renvoyer d’autres CDD qu’il faudra à nouveau former ? »

La journée de Marie-George Buffet ne s’arrêtait pas là : débat avec des militants associatifs rue de la Fontaine-au-Roi, dans le 11e, avec des parents du Réseau Éducation sans frontières devant une école du 18e, avec les habitants de la cité Curial Cambrai dans le 19e. À tous, elle a donné rendez-vous demain soir au Zénith. Elle y présentera son programme avec, insiste-t-elle, les moyens pour le réaliser. « Parce qu’il ne faut pas raconter des balivernes, dire qu’on va faire et refuser de prendre l’argent là où il est. »

Jacqueline Sellem

Sources : Humanité 22 janvier
http://unautremonde.gauchepopulaire.fr/

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