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Entre un et deux millions d’enfants pauvres en France

Publie le mercredi 18 février 2004 par Open-Publishing

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la version complète du rapport du Cerc au format Pdf (151 pages)


La France compte entre un et deux millions d’enfants pauvres, suivant les critères
utilisés. Selon l’Insee [1], 8 % des moins de 18 ans vivent
dans une famille
pauvre, si l’on situe le seuil de pauvreté à 50 % du revenu médian [2].
Mais ils sont deux fois plus nombreux (18 %) si on choisit le seuil de 60 % du
revenu
médian, comme le fait la Drees, la Direction de la recherche du ministère de
la Santé [3]

Le taux de pauvreté [4] des enfants est donc plus élevé que
celui de l’ensemble
des ménages français, qui atteint 16 % selon la Drees. En effet, même si les
ménages avec enfants bénéficient d’allocations qui élèvent leurs revenus, les
catégories les plus démunies ont en moyenne davantage d’enfants que les autres
ménages. Surtout, lorsqu’il y a des enfants, les revenus du ménage sont à partager
entre davantage de personnes, ce qui appauvrit l’ensemble du ménage.

La cause la plus évidente de la pauvreté est la situation professionnelle des
parents : un chômage qui se prolonge conduit rapidement vivre avec des minima
sociaux inférieurs au seuil de pauvreté. La situation familiale joue aussi :
un enfant issu d’une famille monoparentale a deux fois plus de risques d’être
pauvre qu’un enfant qui vit avec ses deux parents. D’autres facteurs complètent
ce tableau. La nationalité : 28 % des enfants de parents non ressortissants de
l’Union européenne sont pauvres, contre 6 % pour les Français. Mais aussi la
taille de la famille :47 % des enfants pauvres vivent dans une famille de plus
de trois enfants, alors qu’ils ne forment que 34 % de l’ensemble des enfants.

Même si la pauvreté d’aujourd’hui n’est pas comparable avec la misère des lendemains
de la Seconde Guerre mondiale, beaucoup d’enfants vivent donc dans l’insécurité économique
et sociale et demeurent à l’écart des normes de confort dont bénéficient les
autres enfants. Les répercussions sont nombreuses, en particulier sur la santé :
ils souffrent davantage de sur- poids ou d’obésité, par exemple, que le reste
des enfants (21 % contre 15 %). Mais surtout, la pauvreté appelle la pauvreté.
Si le niveau de diplôme des parents reste le moteur de la réussite scolaire des
enfants [5], le niveau de vie familial joue également. Rien
de tel pour étudier
que d’avoir un logement confortable et de bénéficier de sa chambre personnelle.

De la protection maternelle et infantile (PMI) à l’école maternelle, en passant
par les allocations familiales, l’effort de la France en direction des plus jeunes
est loin d’être négligeable. Selon la Drees, le taux de pauvreté des enfants
vivant en France est de 7 points inférieur à celui des enfants du Royaume-Uni,
par exemple. On ne peut pas toutefois s’en contenter : en laissant autant d’enfants
dans la pauvreté, la France oublie ses valeurs fondamentales et, en même temps,
sacrifie une partie de son devenir.

Camille Dorival et Louis Maurin

Cet article a été publié par Alternatives économiques,
n°218, octobre 2003

[1] « La pauvreté chez les enfants », Insee Première n° 896,
avril 2003
[2] Revenu médian : revenu qui partage la population en deux
 : la moitié gagne
plus, l’autre moitié gagne moins
[3] « Niveau de vie et pauvreté des enfants en Europe », Drees,
Etudes et Résultats
n° 201, novembre 2002.
[4] Proportion de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté,
qui correspond,
selon les calculs, à 50 %ou 60 % du revenu médian du pays
[5] Voir Eric Maurin "L’égalité des possibles", coll. La République
des idées, éd.
du Seuil, 2002

17.02.2004
Collectif Bellaciao