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Irradiation des aliments, une situation scandaleuse

Publie le dimanche 25 novembre 2007 par Open-Publishing
6 commentaires

Dossier par le Collectif français contre l’irradiation des aliments [1]

Novembre 2007

Tandis que le nombre d’installations d’irradiation dans le monde
s’accroît et que le volume d’aliments irradiés commercialisés dans les
pays de l’Union européenne est inconnu - a fortiori en France - nous
sommes inquiets de l’inefficacité de la réglementation européenne, et
du manque de contrôles - notamment en France. Pourtant, nous manquons
de données sur les risques pour la santé liés à la consommation
d’aliments irradiés.

L’usage de l’irradiation se développe à travers le monde (et très
vraisemblablement le commerce international de produits irradiés). On
assiste à une véritable explosion du nombre des installations
d’irradiation dans les pays à fort développement. La Chine est passée
de 7 unités d’irradiation en 2003 à 50 en 2006, l’Inde a programmé 25
nouvelles installations d’ici 2012, et le Mexique prévoit de
construire la plus grande unité d’irradiation du monde. La
mondialisation des échanges, et de surcroît des produits agricoles, va
aujourd’hui de pair avec cette technologie.
Une soixantaine de pays dans le monde autorise l’irradiation des
aliments et plus de trente pays la pratiquent, dont certains pour une
vaste palette de produits : en Afrique du Sud, au Brésil et au Ghana,
pratiquement tous les aliments peuvent être irradiés ; en Chine, en
Croatie, en Russie, en Turquie, en Ukraine, aux Etats-Unis, une grande
variété d’aliments, dont certaines viandes, peut être irradiée ; à
Cuba, en Inde, au Mexique, de nombreuses viandes peuvent être
irradiées [2].
Mais nul ne sait quels volumes de produits irradiés entrent dans
l’Union européenne.

Nous avons lu avec attention le dernier document de l’AFSSA [3] qui
conclut : « l’examen de la littérature scientifique récente n’apporte
pas d’éléments nouveaux qui permettraient, sous l’angle toxicologique
notamment, de remettre en question les conclusions des évaluations
conduites jusqu’à présent concluant à la sécurité des aliments traités
par ionisation ». Cependant, nous avons dû constater un manque de
rigueur, étonnant pour une agence de sécurité sanitaire, dans le choix
et l’analyse des sources bibliographiques. Nous avons procédé à une
lecture critique de cette revue.

On ne peut conclure que la sécurité des aliments traités par
ionisation est assurée. En effet, les risques pour la santé (pertes de
vitamines, risques de cancérogenèse et de mutagénèse liés à la
production de substances néoformées dans les aliments irradiés) n’ont
pas encore été sérieusement étudiés, les rares recherches sur ce sujet
n’étant pas prises en compte ou discréditées. Selon la revue médicale
indépendante Prescrire, qui fait pourtant état des avis positifs des
commissions scientifiques et des organisations internationales, « des
inconnues subsistent sur les effets à long terme d’une consommation à
grande échelle d’aliments irradiés » [4].

C’est pourquoi nous sommes particulièrement inquiets du peu de
contrôles réalisés en France au stade de la commercialisation : 0 en
2003, 60 en 2004, 86 en 2005, 105 en 2006 [5], tandis que l’Allemagne
par exemple procède à environ 4000 contrôles chaque année. Bien que
ces échantillons ne soient pas représentatifs, il est alertant de
constater une hausse constante de produits commercialisés illégalement
(irradiés mais non autorisés ou non étiquetés) dans notre pays,
jusqu’à 7% en 2005 et 10% en 2006.

Il faut aussi prendre en compte que les contrôles effectués par les
Etats membres sont très insuffisants. Les pays disposant
d’installations d’irradiation ne communiquent pas tous leurs données
sur les doses d’irradiation (Pays Bas) ou avec des valeurs qui ne
correspondent pas à la réglementation (Belgique), voire ne
communiquent aucune information sur les volumes et catégories de
produits traités (Espagne, Italie). Les contrôles au stade de la
commercialisation sont incohérents, disparates, variant d’une année à
l’autre et d’un pays à l’autre, et sans règles communes. Il n’en
demeure pas moins que le taux de fraudes constatées augmente
constamment de façon générale : de 1,4% en 2001 à 4% en 2005 des
échantillons testés en moyenne - pour l’ensemble des 16 pays ayant
transmis plus ou moins d’informations. Du fait de la porosité des
frontières, on ne peut que s’inquiéter de cet état de fait.

A ces risques pour la santé s’ajoutent les conséquences
socio-économiques et environnementales de la prolifération de cette
technologie : pour l’emploi et l’économie locale par la délocalisation
des productions ; les risques liés au fonctionnement d’installations
et au transport de matières nucléaires, et aux modes de production et
de distribution industriels de masse (pollutions, changement
climatique, atteinte aux milieux naturels et à la biodiversité).

Lors de sa conférence de presse à Paris le 21 novembre 2007, à
l’occasion de la Semaine internationale contre l’irradiation des
aliments, le Collectif français contre l’irradiation des aliments a
lancé sa nouvelle campagne et présenté l’évolution de la situation en
France et dans le monde, avec l’appui de scientifiques mobilisés sur
ces questions.

Selon Paul Lannoye, docteur ès sciences et député européen honoraire,
« La réglementation européenne - restrictive malgré les
recommandations du Codex Alimentarius, référence pour l’OMC [6] - est
aujourd’hui inefficace, grâce à l’impunité de certains Etats membres
qui ne respectent pas leurs engagements, tolérée par la Commission
européenne. La mobilisation de la société civile est essentielle pour
faire pression sur les institutions et les gouvernements. »

Roland Desbordes, physicien et président de la CRIIRAD [7] a rappelé
l’accord scandaleux liant l’OMS [8] à l’AIEA [9], accord qui la prive
de son indépendance sur les effets sanitaires des usages civils de
l’énergie nucléaire. Concernant l’irradiation des aliments, il a
déclaré : « Aucune méthode de contrôle ne répond simplement à la
question « Ce produit est-il ou non irradié ? » ni ne permet d’obtenir
des informations essentielles (date et dosage de l’irradiation). Les
institutions autorisent une pratique sans avoir les outils de contrôle
adéquats pour en maîtriser l’usage. »

Pour François Dufour, paysan et ancien porte-parole de la
Confédération paysanne, « Les enjeux de l’irradiation des aliments
sont au moins équivalents à ceux des OGM car ces technologies servent
avant tout les intérêts des multinationales de l’agroalimentaire qui
ont la mainmise sur la production et la distribution des produits
agricoles. Il est absolument essentiel de revoir les modes de
production et les politiques agricoles au vu des conséquences
sanitaires et environnementales, mais aussi pour le maintien d’une
agriculture paysanne et pour garantir la souveraineté alimentaire des
peuples. »

Christian Rémésy, nutritionniste et directeur de recherche au
CRNH/INRA [10] de Clermont-Ferrand, a déclaré : « Nous avons besoin de
modes alimentaires répondant à nos besoins nutritionnels, en
considérant en priorité la qualité nutritionnelle des produits et les
régimes alimentaires, et en évitant les « calories vides ». Il faut
donner de nouvelles règles à l’industrie agro-alimentaire pour
améliorer la densité nutritionnelle des produits . Dautre part, il
faudrait en priorité organiser la production et la distribution
alimentaires à l’échelon régional »

Pour Wenonah Hauter, directrice de Food and Water Watch (ONG
nord-américaine issue de Public Citizen et mobilisée depuis plus de 30
ans dans la lutte contre l’irradiation des aliments) « L’agriculture
industrielle privilégie la production et les profits au détriment de
la réglementation et de la protection sanitaire. En augmentant la
durée de vie des aliments, l’irradiation des aliments encourage les
producteurs à produire dans des pays où la main d’oeuvre est moins
chère et la réglementation sanitaire moins rigoureuse. Plutôt que de
traiter l’alimentation avec une technologie discutable, les
entreprises et les gouvernements devraient s’assurer que
l’alimentation est saine du début à la fin du processus de production.
 »

Véronique Gallais, présidente d’Action Consommation, a présenté la
lecture critique par le Collectif contre l’irradiation des aliments du
dernier rapport de l’AFSSA [11] sur l’irradiation des aliments. Elle a
déclaré : « Cette revue bibliographique, dont les sources sont
sélectives, adopte une approche hygiéniste du risque sanitaire, comme
tous les rapports officiels internationaux, européens et nationaux.
Elle ne tient pas compte - ou très insuffisamment - des risques pour
la santé humaines liés à la consommation d’aliments inertes, ayant
perdu des vitamines et susceptibles d’être à l’origine ou de
contribuer à l’émergence de cancers ou de mutations génétiques. Au
lieu d’analyser les causes de l’augmentation des pathogènes - y
compris dans les pays occidentaux malgré des politiques de plus en
plus hygiénistes - on formule des normes calibrées sur les besoins de
production et de commercialisation industrielles et on joue la course
en avant technologique (irradiation, nanotechnologies,
bioinformatique, ...). Cela se fait au détriment de la santé des
consommateurs, de l’environnement et des productions de proximité. »

Compte-tenu de l’inefficacité avérée de la réglementation européenne,
de l’absence de maîtrise des quantités effectivement commercialisées
dans les Etats membres (notamment en France, où les contrôles sont
presque inexistants) alors que le nombre d’installations d’irradiation
dans le monde s’accroît, du manque de certitudes sur l’innocuité des
aliments irradiés et des risques socio-économiques et environnementaux
liés à un usage important de cette technologie, les associations
membres du Collectif français contre l’irradiation des aliments
demandent au gouvernement français :
 Des contrôles significatifs par la DGCCRF [12] à l’importation et
à la commercialisation, et l’application de sanctions sévères
aux industriels en cas de fraude ;
 La modification de la liste des aliments autorisés en France, de
telle façon que celle-ci se conforme à la liste de l’Union européenne ;
 L’attribution de fonds pour une recherche, indépendante et
transparente, sur les effets pour la santé de la consommation
d’aliments irradiés.

Aux parlementaires français, elles demandent la mise en place d’une
commission d’enquête parlementaire sur les fraudes. A la DGCCRF, elles
adressent une série de questions qui ne trouvent pas de réponse dans
les textes et rapports officiels.

Avec d’autres associations de l’Union européenne, elles interpellent
la Commission européenne et demandent :
 Des contrôles significatifs par les différents pays de l’Union
Européenne, que des règles et obligations de contrôle et déclaration
soient établies, et que des sanctions soient prises à l’égard des pays
ne respectant pas leurs obligations communautaires ;
 La mise en place d’enquêtes sur les fraudes ;
 L’harmonisation de la liste des aliments autorisés au sein de
l’Union européenne, par la suppression des dérogations actuelles et
l’application de la liste positive actuelle (herbes aromatiques
séchées, épices et condiments végétaux) à tous les Etats membres ;
 L’attribution de fonds pour une recherche, indépendante et
transparente, sur les effets à long terme pour la santé de la
consommation d’aliments irradiés.

Les citoyens et consommateurs peuvent aussi se mobiliser en restant
vigilants lors de leurs achats et en posant des questions aux
commerçants, aux producteurs, aux restaurateurs.

Ils peuvent aussi soutenir l’action des associations en participant à
la cyberaction menée avec Cyber@cteurs à l’attention du gouvernement
et écrire au député de leur circonspection.

L’action de tous et de chacun-e est essentielle !


[1] Les membres du Collectif Français contre l’Irradiation des Aliments :
Action Consommation - Adéquations - Agir Pour l’Environnement - Les
Amis de la Terre - Association Léo Lagrange pour la Défense des
Consommateurs - Association pour l’Information sur la Dénaturation des
Aliments et de la Santé (AIDAS) - ATTAC - Biocoop - Collectifs
Bure-Stop - Confédération Paysanne - CRiiRAD - Ecoforum - Ekwo -
Fédération Nature et Progrès - Food and Water Watch Europe - Mouvement
pour les Droits et le Respect des Générations Futures (MDRGF) - RECit
(Réseau des écoles de citoyens) - Réseau Sortir du Nucléaire

[2] « Irradier nos aliments ? non merci », Maria Denil - Paul Lannoye,
mars 2005 (réédition par FUGEA asbl, GRAPPE asbl, Public Citizen,
Réseau Sortir du Nucléaire)

[3] « Revue des données récentes relatives à l’ionisation des denrées
destinées à l’alimentation humaine »

[4] « L’irradiation des aliments. Deuxième partie : L’évaluation des
bénéfices et des risques de l’irradiation des aliments. » ; La Revue
Prescrire Juillet-Août 2006, Tome 26, N°274.

[5] Selon les rapports annuels de la Commission sur le traitement des
denrées alimentaires par ionisation et le document « Contrôle des
denrées alimentaires susceptibles d’être décontaminées par traitement
ionisant », DGCCRF, 28.03.2007

[6] Organisation mondiale du commerce

[7] Centre de recherche et d’information indépendantes sur la
radioactivité

[8] Organisation mondiale de la santé

[9] Agence internationale de l’énergie atomique

[10] Centre de recherche en nutrition humaine / Institut national de
la recherche agronomique

[11] Agence française de sécurité sanitaire des aliments

[12] Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la
répression des fraudes


En savoir plus sur la campagne
http://www.actionconsommation.org/p...

Agir par la consommation
http://www.actionconsommation.org/p...

Le site du Collectif français contre l’irradiation des aliments
http://www.irradiation-aliments.org/

Messages

  • « Nous étions automatisés, nous fumes atomisés ! » Skapad

  • Pourquoi faire un article aussi long ? L’information est très importante mais nous ne voulons devenir dans l’instant un spécialiste de la question.

  • Bonjour à tous,

    Je suis un peu déçu par le traitement du sujet. C’est une question importante qui mérite effectivement un long article.
    Mais comme souvent les personnes qui veulent bien faire desservent la cause. Tout ce qui suit n’a rien contre l’auteur en sa personne.

    Mon impression en fin d’article est qu’il n’y a pas de réelles raisons à interdire l’irradiation. Etrange non ?
    En effet, on décèle un manque de preuves sérieuses et un nombre de citations/"preuves" qui lorsque l’on y réfléchit n’en sont pas. Il en sort donc un suspicion du lecteur qui a l’impression d’être enfumé par un bonimenteur de foire.

    2 exemples parmi d’autres :
    #1
    "Prescrire" n’est pas une revue scientifique. Il s’agit d’une revue médicale qui n’a scientifiquement pas plus de poids que l’ont Science et Avenir, le moniteur du pharmacien ou pif gadget. Ces revues sont écrites pas des journalistes et non par des scientifiques. Un médecin ou un scientifique qui écrit un article sur un sujet sans être reconnu comme spécialiste du sujet n’a pas plus de valeur scientifique que un journaliste ayant fait une école de journalisme. C’est toute la différence entre des revues du type de Nature et Prescrire.
    Venons en à la citation : « des inconnues subsistent sur les effets à long terme d’une consommation à grande échelle d’aliments irradiés ». Oui c’est vérité admise puisque l’irradiation est une technique trop jeune. Personne ne le contredit même pas les défenseurs de l’irradiation. Il en a été de même pour le chemin de fer et le cinéma.

    #2
    "Selon Paul Lannoye, docteur ès sciences et député européen honoraire, « La réglementation européenne ..."
    Si je me souviens bien Mr Lannoye ne parlait pas l’irradiation spécifiquement mais de la réglementation dans son ensemble. L’irradiation fait partie de la réglementation mais rien ne dit que Mr Lannoye y faisait allusion.

    A cela s’ajoute que votre texte est principalement fait de collés/copiés sans aucune digestion de votre part. Il en résulte de nombreuses redites, des conséquences avant des faits. On a surtout une impression que vous avez avez fait 24h de recherche d’informations puis pondu maladroitement un article et que vous ne maîtrisez absolument pas votre sujet.

    Je me fâche un peu car l’irradiation est un sujet important (principalement pour des raisons socio-économiques et très peu sanitaires) et vous le vendangez.