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Attention poète ! Récital . Allain Leprest est au théâtre du Renard, à Paris.

Publie le lundi 17 décembre 2007 par Open-Publishing
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de Marie-José Sirach

Récital . Allain Leprest est au théâtre du Renard, à Paris. Poète, chanteur, il est l’un des plus grands représentants de la chanson de notre temps.

Il est né près de Rouen, à Mont-Saint-Aignan. Dans une famille d’origine modeste. Il a fréquenté l’école buissonnière, goûté très tôt aux mots en liberté, écrit des poèmes sous forme de vermicelles, quand la soupe, servie, est encore chaude. Il a poussé comme la mauvaise herbe, un brin rebelle, le coeur aux quatre vents, toujours en goguette, jamais au bon endroit. Allain Leprest a pas mal roulé sa bosse, histoire de gagner sa croûte, chopé le virus de la poésie et contre ça, il n’existe encore aucun vaccin. Il écrit des chansons. Et quelles chansons ! Pas des bluettes à trois francs six sous ; pas des-qui-passent-à-la-radio. Ses chansons parlent cru, parlent vrai, mettent de la couleur dans la grisaille de notre quotidien, tressent les mots à l’infini jusqu’à leur redonner leur sens, sans interdits. Elles ont le goût de l’enfance et des embruns de la mer du Nord. Elles résonnent des cris des chalands qui passent et des morsures de l’amour. Elles disent les petites gens et la grande poésie. Elles vont droit au coeur de qui veut bien les entendre. Elles sont libres d’aller et venir, dans nos coeurs et dans nos têtes, mélopées tragi-comiques dépouillées des oripeaux de la bienséance et du bien-pensant.

Allain Leprest est un grand de la chanson, dans le droit fil d’un Ferré, d’un Brel, d’un Maurice Fanon ou d’un François Béranger. Prenez Dans le sac à main d’une putain, Chien d’ivrogne, l’Horloger ou le Ferrailleur : que racontent-elles d’autre que la vie qui passe, avec ses hauts et ses bas, ses larmes de colère qu’on ravale et ses rêves qui nous font tenir debout ? Leprest a les mots justes, lit dans l’intimité des hommes qu’il croise là où ça boit et ça fume, dans des troquets de seconde zone, dans la rue ou dans les squares. Et dresse des portraits d’une rare humanité où chacun a sa place, sa chance. De faits divers aux faits d’Ivry, il croque des personnages d’une plume noire et tourmentée, amicale et complice, dessine une humanité où la générosité et la solidarité ne sont pas vaines. Les laissés-pour-compte, les cassés de la vie, les qui aiment mais n’en peuvent, ce sont ses frères de combat, ses copains de coeur. Là où l’indifférence grignote chaque jour un peu plus nos vies, Leprest traque le regard de l’autre, un sourire esquissé, la silhouette d’une femme qui s’éloigne dans le brouillard. Richard Galliano, Romain Didier, Gérard Pieron ont entre autres composé les musiques de ses chansons avec cette complicité artistique et amicale qui met en relief les mots bruts du chanteur.

Devant son micro, seul en scène simplement éclairé d’un halo de lumière, il ne feint rien, il ressent tout au plus profond de son être, de son corps aujourd’hui rattrapé par la maladie. Qu’importe. Il est debout. La voix, même abîmée, résonne, tonne et gronde et nous bouleverse. Il s’accroche au micro, le corps plie mais ne rompt pas. Son regard nous transperce. Il sourit. Il « vient nous voir », comme dans la chanson, et s’en va, « sur les pointes des pieds ». Et ses mots résonnent dans nos têtes, et on est sonné par sa poésie qui nous émeut, qui nous bouleverse, qui nous donne l’envie d’aimer, encore et toujours, le courage de nous battre, de retourner au chagrin. Accompagné par Nathalie Miravette au piano, doigté aérien qui fait corps avec le chanteur, Allain chante avec cette conviction que la vie vaut d’être vécue.

Allain Leprest au théâtre du Renard, à Paris, jusqu’au 21 décembre.

Places disponibles : dimanche, mardi, mercredi, jeudi, vendredi et samedi à 21 heures.

A 16 heures le dimanche. Tarifs : 23 euros tarif plein ou 17,50 euros tarif adhérent. 12, rue du Renard, Paris 4e.

Réservations : 01 42 71 46 50.

En première partie, Pascal Clément chante François Béranger et c’est un bonheur de réentendre l’auteur de Département 26. Enfin, un disque rend hommage à Leprest, Chez Leprest (Tacet/L’Autre Distribution), avec la participation d’Higelin, d’Enzo Enzo, de Loïk Lantoine…

http://www.humanite.fr/2007-12-14_Cultures_Attention-poete

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