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Recherche : La stratégie du capital

Publie le jeudi 15 janvier 2009 par Open-Publishing

La recherche scientifique et la mise en œuvre de ses découvertes dans la production et les relations sociales représentent des éléments incontournables dans le développement des forces productives et des rapports sociaux de production. Tout au long de son histoire, le capitalisme a cherché à capter les découvertes scientifiques pour les utiliser à son profit. C’est vrai dans la production de marchandises nouvelles, dans les modes de production eux-mêmes, mais aussi dans les outils de la domination sociale comme dans ceux des armements qui confèrent aux Etats les moyens de la puissance militaire. Il est clair, que la recherche scientifique constitue pour les Etats les plus riches et pour les grandes sociétés capitaliste un enjeu énorme dans la concurrence féroce qu’ils se livrent pour l’accès aux ressources naturelles, leur contrôle, leur exploitation mais aussi dans la domination économique, culturelle et militaire leur permettant d’asseoir leur hégémonie. Tout au long de l’histoire, sous des formes diverses, les forces sociales dominantes ont cherché à contrôler et utiliser les résultats de la recherche, stimulant parfois par des programmes et des institutions spécifiques de nouvelles voies de recherche.

Il n’est donc pas étonnant, que dans une situation où le capitalisme fait face à une crise sans précédent de suraccumulation, celui-ci ne cherche pas à optimiser, de son point de vue, les capacités de la recherche scientifique. S’agissant d’une activité largement financée par l’Etat, la recherche scientifique et ses institutions se voient appliquer les mêmes politiques que celles qui gouvernent les réformes des institutions publiques. Ces politiques touchent les financements, l’organisation des services, l’évaluation et les statuts des personnels. Dans le domaine des financements, le pouvoir a mis en place un système de contrats par objectifs (Agence Nationale de la Recherche) dont l’obtention est sous le contrôle direct du Ministère de la recherche et qui oblige les équipes de recherche à se plier aux orientations définies par le pouvoir et le capital. Il a doublé ce système par une évaluation de projets et d’objectifs particulièrement opaque qui donne en réalité tout pouvoir à l’Etat de définir ce qui est ou non dans la ligne du moment. Les équipes de recherche sont donc particulièrement vulnérables et leur marge de manœuvre et d’initiative s’est réduite comme une peau de chagrin. Soulignons que les contrats Européens qui doublent et accompagnent cette politique amplifient encore la dépendance vis-à-vis des choix du capital. De fait, la notion même d’équipe s’éclipse derrière des structures plus étendues assurant la maintenance des outils de recherche qui échappent de plus en plus aux scientifiques, l’équipe est donc une structure de nature transitoire en lien avec un objectif. Elle doit en permanence justifier son existence par rapport au contrat dont elle ne maîtrise en rien les orientations. Dans ces conditions, il n’est pas difficile de comprendre que pour une telle politique, il faut des personnels vulnérables liés eux aussi par un contrat dont la durée est limitée dans le temps, c’est-à-dire des précaires payés de manière inégalitaire pour accroître la concurrence et empêcher toute action collective susceptible de contester les choix mis en œuvre. C’est le sens de la volonté du pouvoir d’en finir avec le statut de titulaire qui autorise une certaine autonomie des personnels vis-à-vis de l’Etat et celle d’une rémunération différenciée selon l’adéquation aux exigences des programmes (le salaire au mérite).

Ainsi, une profonde réorganisation du système de recherche se met en place. Malgré les arguments des directions et des membres du Gouvernement, ces mesures n’ont rien à voir avec une amélioration du service public de recherche mais tout à voir avec sa mise sous contrôle complet de l’Etat au service des intérêts capitalistes. Combattre cette politique, dans ses conséquences concrètes pour les personnels, doit prendre en compte l’enjeu de classe que représente la recherche scientifique.