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Battisti, écrivain de l’exil et de la mémoire blessée

Publie le mercredi 30 juin 2004 par Open-Publishing

L’Italien Cesare Battisti, dont l’extradition a été demandée par la cour d’appel de Paris, est l’auteur d’une dizaine de fictions, où la part autobiographique est importante et qui brassent les thèmes de la mémoire blessée, de la rédemption et de l’exil d’ex-militants extrémistes.

La cour d’appel de Paris s’est déclarée mercredi favorable à l’extradition vers l’Italie de l’écrivain, condamné dans son pays à la prison à perpétuité pour meurtre.

Depuis son installation en France au début des années 90, après plusieurs années au Mexique, il a notamment écrit (pour plusieurs éditeurs dont Gallimard, Rivages ou Joëlle Losfeld) »Les habits d’ombre » (93), »L’ombre rouge » (95), »Buena Onda » (96), »Jamais plus sans fusil » (2000), »Avenida Revolucion » (01).

Lire Battisti, c’est entrer dans des narrations où la psychologie n’a pas le beau rôle. »On sait le passé des personnages, on sait un peu leur caractère, mais on ne tergiverse pas sur les raisons qui leur font prendre le métro ici plutôt que là », a expliqué le spécialiste du roman policier, Hubert Artus. »Dans ses romans, a-t-il poursuivi, on a l’exil ou le voyage, la rédemption, ainsi que l’alcool, le sexe, du loufoque et l’humour. Le tout assemblé par une espèce d’ironie ».

Si la plupart de ses romans évoquent, de près ou de loin, sa propre histoire tourmentée, ses ouvrages les plus autobiographiques sont »Dernières cartouches » (2000), celui qu’il préfère, et, dans une moindre mesure, »Le cargo sentimental » (02).

L’intérêt de »Dernières cartouches », qui raconte la cavale d’un repris de justice entraîné dans la lutte armée, est »de livrer un témoignage de l’intérieur sur une période de la vie politique italienne (ndlr : »les années de plomb ») qui reste encore une énigme », selon Claude Mesplède, auteur d’une encyclopédie de référence sur le roman policier et fervent défenseur de l’Italien.

 »Le cargo... » est une histoire d’amour, mélancolique et triste. Dans les années 70, en Italie, un jeune homme quitte sa famille pour rejoindre un mouvement gauchiste. Il rencontre et aime Silvana mais celle-ci, enceinte, disparaît. Le garçon doit fuir son pays. On le retrouve en pleine errance à Paris où il affronte les difficultés d’un exilé politique sans statut. Il apprend la mort de Silvana et part à la recherche de leur fille, elle aussi militante. Que sera l’avenir ?

Alors que l’auteur à succès Fred Vargas, porte-voix des défenseurs de Battisti, a conçu un livre intitulé »La vérité sur Cesare Battisti », l’Italien a reçu ces dernières semaines le soutien de nombreux écrivains, notamment de romans policiers. De Patrick Raynal (devenu éditeur) à Thierry Jonquet, en passant par Frédéric H. Fajardie, pour ne parler que des Français, les anciens gauchistes sont nombreux à s’être investi dans le roman noir.

Mais Battisti est aussi défendu dans d’autres cénacles. Paris-Match écrivait en mars à propos du »Cargo... » : »Ave Cesare, ceux qui t’ont lu te saluent (...). Il n’y a pas de réquisitoire mieux tourné contre l’impasse absolue du terrorisme ».

http://www.tageblatt.lu/edition/article.asp?ArticleId=23697