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Florence Cousin : "Laurent Joffrin m’a dit qu’il ne capitulerait pas. Moi non plus" (reportage photos bellaciao)

Publie le mardi 24 février 2009 par Open-Publishing
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Libération : Florence COUSIN en est à son quinzième jour de grève de la faim. Elle tient bon et lutte dignement contre un licenciement dont le motif avoué n’a rien a voir avec le motif réel. Malgrè les manipulations de monsieur JOFFRIN , personne n’est dupe, la CGT du Livre ne cautionnera pas le premier licenciement contraint d’une ex déléguée CGT. Soutien à Florence à 12 heures, ce mardi 24 février 2009 11, rue Béranger - 75003 Paris

Interview de Ophélie Rat

Pourquoi avoir refusé la compensation proposée par le journal ?

 Accepter cet accord, passé entre la direction et le syndicat Info’Com, entérinerait mon licenciement alors que je souhaite rester à Libération et obtenir le poste promis. D’autant que j’estime mon licenciement injuste et discriminatoire. Prendre pour motif mon incompétence alors que je n’ai eu que 9 jours de formation au lieu de 3 ou 4 mois comme en moyenne pour les autres salariés c’est inacceptable. Alors que je suis prête à suivre une formation... La direction m’a répondu qu’à 47 ans, j’étais trop vieille.

Est-ce que ça n’est pas excessif de bloquer la parution d’un journal en raison du licenciement d’une salariée ?

 Avant de décider de cette grève nous avons fait une proposition à Laurent Joffrin et à Nathalie Collin [co-présidente de Libération, ndlr]. Les syndicats ont demandé à ce qu’il n’y ait pas de rupture de contrat et que je suive une formation d’un an de correcteur et de secrétaire de rédaction. A l’issue de cette formation mes "compétences" seraient évaluées à la fois par l’organisme de formation et par Libération. En cas de désaccords, Laurent Joffrin resterait seul juge et prendrait la décision finale quel que soit l’avis de l’institut de formation. Et s’il estime que je ne suis pas compétente, j’accepterai un reclassement, même à l’extérieur. A la suite de cette proposition, la direction n’a pas donné de réponse et a préféré attendre lundi pour se décider. Cette grève n’était donc pas une surprise.

Pourquoi les syndicats des NMPP et SGSE vous ont-ils suivi alors qu’une grève avait déjà été organisée et peu suivie ?

 Les NMPP [Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne ndlr] et le SGSE [Syndicat général du livre et de la communication écrite, ndlr], ont été scandalisés par les pressions exercées sur moi pour que j’accepte l’accord conclu entre Info’Com, qui est un syndicat minoritaire, et la direction. Ces syndicats étaient aussi inquiets pour ma santé et ont voulu lancer un appel fort. Ce ne sont d’ailleurs pas les seuls à m’avoir soutenue puisqu’une partie des journalistes a protesté. Ils ont envoyé un courrier pour signifier à la direction que ce licenciement va à l’encontre de leurs idées et des principes qu’ils défendent et dénoncent tous les jours.

Quelle est votre réaction lorsque la direction déclare que cette action est menée par "une petite minorité syndicale extérieure à l’entreprise" ?

 Les NMPP et la SGSE qui me soutiennent ne sont pas des syndicats minoritaires. Pour Info’Com, par contre, ils sont minoritaires et ont négocié avec la direction l’accord qui m’a été proposé et qui aurait dû rester secret. Mais visiblement, le secret n’est valable que pour moi puisque les termes de l’accord ont été divulgués et des bruits ont circulé sur le montant de mon indemnité de départ. Les montants annoncés sont d’ailleurs 2 ou 3 fois plus élevés que ce que la direction m’a proposé.

Lorsque la direction parle de "remise en question de la liberté de publier" à propos de cette grève, quelle est votre réaction ?

 La direction a reçu une proposition pour empêcher ce blocage. Mais, elle préfère perdre 500.000 euros et mettre en jeu la santé économique du journal plutôt que de trouver un accord satisfaisant avec une salariée. Pour moi, il n’y a aucune logique comptable dans leur attitude. Pour preuve, les augmentations reçues par les cadres qui représentent 2 ou 3 fois le salaire que je demande. Il faut savoir que les 59 cadres de l’entreprise représentent environ 40% de la masse salariale.

Est vous toujours en grève de la faim ?

 Oui et je continuerai ma grève de la faim jusqu’à ce que Laurent Joffrin entende mes revendications. Et je n’irai pas faire ma grève de la faim à l’hôpital comme me l’a demandé la co-présidente du journal, Nathalie Collin. Laurent Joffrin m’a dit qu’il ne capitulerait pas. Moi non plus. Pour moi, son attitude n’est pas responsable et ce licenciement malhonnête. La direction ne peut pas revenir, comme ça, sur la proposition faite il y a 18 mois et conclue avec un contrat signé. Je considère que les méthodes qu’ils emploient sont tout simplement grossières. Par ailleurs, sans brutalité de la DRH et de la chef de l’édition, on n’en serait pas arrivé là. Ce sont elles et Laurent Joffrin qui sont responsables de la situation actuelle.

Qu’attendez-vous maintenant de la direction qui se dit prête à discuter ?

 J’ai rempli ma part du contrat qui était de rester 18 mois dans un service. A présent, à eux de remplir leurs engagements. Je souhaite simplement obtenir le poste promis avec une formation de secrétaire de rédaction (SR) et de correcteur. On m’a refusé plusieurs fois des postes de SR, j’ai été patiente et aujourd’hui, je demande à être uniquement jugée sur mes compétences.

http://tempsreel.nouvelobs.com/actu...

Messages

  • le "point de vue" de la direction a fait l’objet de deux articles dans Libération

    ils sont en commentaire Libération : grève de la faim d’une journaliste contre son licenciement

    Mais laissons aussi parler l’un des ex journalistes de Libération, qui décrit bien les procédés indignes de cette "direction", digne du Comité des Forges

    MOURIR A LIBERATION ?

    Je ne suis pas le mieux placé pour parler de Libération, ni de la crise qui l’agite. En même temps, vu mon passé (vingt-cinq ans de fidélité exclusive à Libé dont je suis parti volontairement, mais à bout de force, à bout de nerfs, voici bientôt deux ans), j’en connais assez sur le fonctionnement de la maison Libération, celle de July autant que celle de Joffrin, pour pouvoir émettre deux ou trois hypothèses, ne serait-ce que des hypothèses purement météorologiques, des hypothèses d’ambiance, sur la crise grave, une crise d’un nouveau genre, qui l’agite.


    L’ambiance. Il me reste deux ou trois amis, pas plus, à Libé. Les autres sont morts (Serge Daney, Michel Cressole) ou partis (Nidam Abdi, Daniel Licht, Jean-Luc Allouche, Emmanuel Poncet …). Je ne veux pas dire par là que rester à Libé, c’est se mettre sur une position idéologique avec laquelle je serais forcément en désaccord, c’est juste un titre de presse, déboussolé, sans énergie, fatigué tout autant par la mollesse de sa direction que par le manque d’enthousiasme de ses journalistes. Disons que c’est la lâcheté ambiante qui m’a fait partir, pas l’absence d’amis dans la maison.

    Si je raconte tout ça (qui n’intéresse peut-être pas grand monde) c’est pour témoigner à la première personne du peu de cas qui est fait de la vie d’une de ses journalistes, Florence Cousin, qu’on tente de déstabiliser et de renvoyer brutalement du journal où elle travaille depuis plus de vingt ans, avec deux mois de salaire pour tout dédommagement, sous prétexte qu’elle serait "incompétente". On aurait pu s’en rendre compte plus tôt. Florence Cousin est actuellement secrétaire de rédaction à Libération, elle y a occupé sept ou huit postes différents par le passé. Elle sort d’une longue et grave maladie. Elle a entamé depuis mardi 10 février, dans le hall du journal, une grève de la faim.
    Faut-il mourir pour son journal ? Faut-il mourir pour Libération ?

    Florence cousin fait partie du petit peuple de Libé, les obscurs, les faibles, ceux dont on ne remarque l’absence qu’une fois qu’ils sont partis pour de bon. C’est l’une de ces deux ou trois personnes dont je disais en ouverture de ce texte que ce sont encore pour moi "des amis". Sans doute pour cette raison aussi peut-on penser que je ne suis pas le mieux placé pour la défendre. Doit-on se taire pour autant quand un ami souffre, quand il souffre injustement ? Doit-on se taire quand ces souffrances, on les partage, on les comprend un peu, on les a un peu soi-même vécues (j’ai été viré manu militari de Libé, un mois avant ma date officielle de départ volontaire, avec une violence et un sadisme rares) ? C’est pourquoi j’ai décidé, même si je ne suis pas la personne la mieux placée pour parler du peu de cas qui est fait de la vie de Florence Cousin, de parler quand même. Avec des mots peut-être excessifs, excusez-moi, ce sont les miens, je n’en ai pas tant que ça. Ecrire pendant quarante ans aux Cahiers du cinéma ou à Libé vous donne un peu de vocabulaire, mais pas ce vocabulaire là. Que Libération se mette ou non en grève -pour protester du peu de cas qui est fait du sort de l’une de ses employées, mais aussi et surtout pour s’indigner légitimement de certaines nouvelles inégalités salariales, insupportables en temps de crise- ne me regarde pas. Je prie juste pour la vie de Florence. Elle en sera jeudi à sa dixième journée de grève de la faim. Elle est digne, courageuse. Mais la lassitude profonde, la fatigue réelle, se font évidemment sentir. Un peu de décence, un peu de justice, un peu de compassion, un peu de pitié, messieurs de Libé, serait tout à votre honneur. J’ai la faiblesse de n’attendre rien d’autre de vous.

    lire aussi, toujours sur le même blog une lettre de daniel licht, ex journaliste à libération, sur l’état REEL de cet ex journal ... à méditer