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Perben invite la justice à manier le bâton contre les mécontents

Publie le samedi 31 juillet 2004 par Open-Publishing
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"Faucheurs" d’OGM, défenseurs de mal-logés, antinucléaires, mais aussi
syndicalistes nouveau genre, tous risquent d’avoir à affronter les
tribunaux.

A LA veille de l’arrachage, le 25 juillet, d’une parcelle expérimentale de
maïs génétiquement modifié par un petit millier de militants, Dominique
Perben avait annoncé une " réponse judiciaire exemplaire ". Et les médias
n’ont pas manqué de rappeler sa circulaire du 4 juin enjoignant les
procureurs de châtier avec " rigueur et fermeté " les destructeurs de plants
OGM : ces faucheurs encourent jusqu’à 5 ans de prison et 75 000 euros
d’amende. De fait, les gendarmes présents à Verdun-sur-Garonne
(Tarn-et-Garonne), lieu des exploits des anti-OGM, n’ont rien fait pour
neutraliser ces vandales mais ont pris des centaines de photos et relevé
consciencieusement les numéros d’immatriculation des véhicules. S’opposer
d’une façon un peu spectaculaire devient une activité à haut risque. Le 19
août, un éducateur et un enseignant vont être jugés pour avoir aidé, à
Calais, des immigrés clandestins. Alain Hébert, un syndicaliste, a déjà été
condamné en appel à 6 mois avec sursis après des incidents survenus lors
d’une manif. Pour sa part, Greenpeace vit sous la menace d’une visite
d’huissier qui viendrait, à la suite d’une décision de justice, saisir 100
000 euros pour le compte de la Cogema.

Chicaneries hors de prix

Le tribunal est maintenant l’endroit privilégié où calmer les militants
encombrants. Avec une cible toute trouvée : le tiroir-caisse. A Paris, en
mars dernier, la RATP et Metrobus, sa régie publicitaire, ont ainsi réclamé
pour près de 1 million d’euros de dommages et intérêts aux 62 graffiteurs
anti-pub accusés d’avoir gribouillé des affiches dans le métro. A aucun
moment les plaignants ne se sont demandé - et ils sont parfaitement dans
leur droit en agissant ainsi - si les dangereux maniaques du bombage et du
marqueur, dont certains étaient de jeunes RMIstes, pourraient payer des
sommes aussi astronomiques. Cette stratégie du coup de bambou judiciaire
n’épargne pas les syndicats. Ainsi, en janvier 2000, la société qui gère le
tunnel sous la Manche a réclamé plus de 500 000 euros de dommages et
intérêts à FO, à la CFDT et à la CGT, qui avaient bloqué le trafic lors
d’une grève. De fait, Eurotunnel manque singulièrement d’argent en ce
moment. Bien que les magistrats répugnent à suivre ce genre de plaignants
jusqu’au bout de leurs requêtes, cette petite guérilla finit par coûter très
cher aux " délinquants ". Chaque année, 5 à 10% des budgets de la
Confédération paysanne et de Greenpeace sont engloutis dans ces chicaneries
judiciaires. " Nous sommes obligés de mesurer le coût économique de nos
actions, avant de nous lancer ", déplore Jean-Noël Faure, le trésorier du
syndicat paysan. Il est vrai (voir ci-contre) que pour certaines de ces
organisations un bon petit procès vaut parfois un gros coup de pub.
Certaines entreprises n’hésitent plus à traîner leurs propres salariés au
tribunal. Aux yeux de nombreux patrons, distribuer un simple tract est un
acte de subversion. Ainsi Abdel Mabrouki, délégué CGT chez Pizza Hut, a été
attaqué en diffamation pour avoir dénoncé l’insécurité des conditions de
travail, après la mort accidentelle d’un salarié de la boîte. Le
syndicaliste a finalement été relaxé en octobre 2003.

Très show militants

Depuis les années 90, une nouvelle génération de militants - qu’ils soient
antinucléaires, anti-OGM ou défenseurs des sans-papiers, sans-abri ou
chômeurs - flirte avec la ligne jaune par rapport au Code pénal :
occupations d’Assedic et de locaux inhabités, opposition aux expulsions,
etc. Nombre de syndicalistes se retrouvent à leur côté. Ainsi, à Marseille,
Charles Hoareau, responsable de la CGT, compte une quinzaine de procès à son
actif. Entre autres méfaits, ce dangereux récidiviste a fracturé la porte
d’un logement vide pour y loger une famille. " Il y a une criminalisation de
la pauvreté. Nous sommes obligés de mener des actions aux limites de la
légalité ", explique ce syndicaliste remuant. De fait, la bonne vieille
grève ne fait pas toujours recette, même pour les revendications les plus
traditionnelles. Les actions des protestataires d’EDF, ce printemps,
consistant à neutraliser les compteurs électriques des hommes politiques en
témoignent. Ces odieux kidnappeurs risquent de s’attirer des ennuis :
d’après la CGT, une soixantaine d’agents encourent des sanctions
disciplinaires. Encore heureux que Sarkozy n’ait pas eu intérêt à jeter de
l’huile sur le feu dans sa négociation avec la CGT sur le statut d’EDF.

L’ ADN des militants

Lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, Sarkozy n’avait pas de ces
scrupules. " Nos camarades sont régulièrement arrêtés et poursuivis ",
s’indigne Romain Binazon, porte-parole de la Coordination nationale des
sans-papiers. Comme Alain Hébert, militant de la CGT, il a été jugé pour
outrage ou violence à l’encontre des forces de l’ordre. Et les accusations
pour " destruction de biens " ou " bris de porte " sont légion. C’est au
Conseil constitutionnel, qui a, le 2 mars dernier, censuré la loi Perben II,
que les associations qui aident les sans-papiers doivent de ne pas être
traitées comme des criminels. En revanche, leurs militants risquent fort
d’être intégrés dans le Fnaeg, le fichier national automatisé des empreintes
génétiques. Lequel, depuis la loi sur la sécurité intérieure du 18 mars
2003, a ouvert ses portes aux syndicalistes, aux côtés des délinquants
sexuels. En avril dernier, Charles Hoareau, de la CGT, a été convoqué par la
police pour effectuer un prélèvement salivaire. Motif : il avait été
condamné en janvier 2000 pour" violence volontaire " contre des policiers.
Aujourd’hui, faute de s’être rendu à l’aimable invitation, il est passible
de 15 000 euros d’amende et de 1 an de prison.

Insupportable laxisme

Il est pourtant des circonstances où la justice sait faire profil bas. Comme
en 1999, quand le tribunal a conclu que les prévenus n’étaient pas les
auteurs de la dévastation des bureaux de Dominique Voynet, alors ministre de
l’Ecologie. Par le plus grand des hasards, il s’agissait de militants de la
FNSEA. Les saccages de locaux administratifs, le déversement de fumier dans
les préfectures par des syndicalistes paysans, la destruction de locaux de
la Sécu par un petit syndicat fascisant de commerçants ont, de même, été
rarement poursuivis. Et les responsables de l’incendie du parlement de
Bretagne, à Rennes, courent toujours. C’est peut-être cette "jurisprudence "
qui a incité le procureur de Boulogne-sur-Mer à déclarer que les militants
de Calais qui ont aidé financièrement, nourri et logé des clandestins ne
sont pas voués à " connaître un sort funeste" : ces malfaiteurs encourent
jusqu’à 30 000 euros d’amende et 5 ans de prison. Mais sans doute Perben
interviendra-t-il, d’ici au 19 août, date de l’audience, pour rappeler aux
juges que leur métier est d’appliquer la loi. Jérôme Canard

Tribunal-tribune

FAUTE de débat public, nous " utiliserons les prétoires comme tribunes ", a
lancé José Bové lors de l’arrachage de maïs transgénique, du côté de
Verdun-sur-Garonne, le 24 juillet. La Confédération paysanne prend soin de
médiatiser les procès : marches, afflux de militants par cars entiers... "
Il nous arrive d’aller en appel parce que cela maintient vifs les débats sur
la place publique ", explique Jean-Noël Faure, le trésorier du syndicat
paysan. A 6 000 euros pièce, un procès reste nettement plus abordable qu’une
campagne de pub. Et l’efficacité est garantie, surtout lorsque le garde des
Sceaux promet la plus grande sévérité à l’encontre des faucheurs d’OGM.

Messages

  • Mr Perben est un homme bien. Il est l"élu des français et en tant que tel, il est à leur écoute. Il sait que les Français, , à une très très large majorité NE VEULENT PAS D’OGMS dans leur assiettes ou dans leur magasins.
    Alors comme c"est un mec bien, il appelle à des sanctions exemplaires. Contre qui ? Ceux qui défendent les idées partagées par les Français qui NE VEULENT PAS D’OGM. Quels mots peut-on trouver pour le qualifier : Pauvre type ? Sans doute..

    Mr le ministre, messieurs les ministres, continuez comme cela et il n’y aura pas d’autres solutions qu’une radicalisation. Et ce sera de votre faute.

    Un citoyen.