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La "paye du lait" allégée, (la paye pas le lait)

Publie le mercredi 10 juin 2009 par Open-Publishing

Les statuts des agriculteurs se sont nettement différenciés depuis le début des années 60. Une petite partie de la paysannerie a construit des entreprises capitalistes. Le syndicaliste interrogé évoque Alexis Gourvennec, comme représentant de ce modèle, qui fut propriétaire d’un des plus gros élevages porcins et qui a beaucoup œuvré pour structurer les marchés agricoles. D’autres agriculteurs plus modestes mais déjà bien établis en foncier ont sorti leur épingle du jeu en évitant la trop forte spécialisation et ont agrandi leurs exploitations. Ces deux groupes sont souvent adhérents ou proches de la FNSEA (foi dans le productivisme et dans la libre entreprise, co-gestion avec l’Etat).

Mais ce dynamisme passe par la concentration : 2/3 des exploitations vont disparaître entre 1970 et 2000 et d’autres, « les modernisés-endettés », voient leurs situation empirer au milieu des années 70 lorsque les marchés deviennent excédentaires et que les conditions de crédit se durcissent. Ce sont ces laissés pour compte de l’agriculture intensive qui, lors de la grève du lait en 1972, remettent en cause l’unanimisme syndical, encore très fort jusqu’aux premières ruptures perceptibles lors du 12ème congrès du CNJA (Centre national des jeunes agriculteurs) du 5 et 6 juillet 1970.

Si la branche libérale domine toujours dans les Côtes d’Armor et en Ille-et-Vilaine, les modernistes (Bernard Lambert) qui dénoncent les pratiques capitalistes l’emportent dans le Finistère et le Morbihan. Ces contestataires de la FNSEA seront les plus mobilisés en 1972 et exigeront la définition du prix de revient du lait de façon à garantir la rémunération du travail. La lutte sera particulièrement vive dans le Morbihan et le Finistère, où des milliers d’hommes et de femmes s’engagent dans l’action. Ils s’associeront en 1973 pour former « le comité de Redon » qui se montrera très anti-libéral et qui participera activement en 1977 et 1978 à la lutte contre les Montants compensatoires monétaires (MCM).

C’est également au début des années 70 que les CDJA d’opposition créeront la revue Paysans en lutte très marquée par l’extrême gauche et proche des mouvements ouvriers. Cette mouvance quittera ensuite la FNSEA pour former en 1974 l’association nationale des « paysans-travailleurs ». Ces jeunes syndicalistes dénoncent l’échec de la politique fondée sur la productivité et la compétition qui mène à l’exploitation et la paupérisation d’une majorité. Dans l’esprit des années 70, ils proposent une union avec le milieu ouvrier, divergeant en cela du MODEF (Mouvement de défense des exploitants familiaux) qui dénonce également le capitalisme mais avec des méthodes moins radicales.

L’arrivée de la gauche en 1981 fera évoluer à nouveau ce paysage syndical : sous l’impulsion de Bernard Lambert, la Confédération nationale des travailleurs paysans est crée (CNTSP) alors que les CDJA et FDSEA sécessionnistes (comme le comité de Redon) se regroupent autour de Guy Le Fur pour créer « l’interpaysanne » qui deviendra plus tard la fédération nationale des syndicats paysans (FNSP). En 1987, la FNSP et la CNSTP fusionneront pour former la Confédération paysanne.

 La « Grève du lait »

 Bernard Lambert, Françoise BOURQUELOT et Nicole Mathieu, « Paroles de Bernard Lambert : un paysan révolutionnaire », Strates

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