Accueil > Le Peuple souverain, l’auto-gouvernance…

Le Peuple souverain, l’auto-gouvernance…

Publie le vendredi 3 juillet 2009 par Open-Publishing
2 commentaires

de Michel MENGNEAU

Notre Révolution de 1789 est considérée à juste titre comme une révolution bourgeoise. Il serait plus juste de dire qu’elle a profité essentiellement à la bourgeoisie active qui peu à peu s’est transformée en ferment du capitalisme, pour éclore en oligarchie capitaliste avec la révolution industrielle.

On pourrait épiloguer sur une révolution qui, si elle ne fut pas complètement ratée, n’apportera néanmoins pas le panel de liberté et de bien-être que le peuple pouvait en attendre. Il existe cependant une notion qui aurait du empêcher cette déviation de la révolte populaire vers l’instauration des privilèges d’une nouvelle classe sociale, c’est la notion de peuple souverain.

Notion qui pourtant fut la doctrine du parti populaire de 1789, qui du 14 juillet aux 5 et 6 octobre a tenté de la mettre en pratique. On verra pendant cette période les grands esprits de la révolution, Loustalot, Camille Desmoulins, Fréron, Danton, Robespierre la rabâcher partout où ils avaient à s’exprimer, à l’assemblée, dans les clubs, dans les journaux… Mais que disait au juste ce préambule tant proclamé et dont il serait bien que de nos jours il soit de nouveau une sorte de référence pour défendre la notion de peuple souverain.

C’est dans le livre « Les origines de la France contemporaine » d’Hyppolite Taine dans lequel je suis allé puiser ce texte qui va nous donner à réflexion ; (Les Jacobins, chapitre I, page 567, 568).

« Dès l’origine, pour justifier toute explosion et tout attentat populaire une théorie s’est rencontrée, non pas improvisée, surajoutée, superficielle, mais profondément enfoncée en pensée publique, nourrie par le long travail de la philosophie antérieure, sorte de racine vivace et persistante sur laquelle le nouvel arbre constitutionnel a végété : le dogme de la souveraineté populaire - pris à la lettre, il signifie que le gouvernement est moins qu’un commis, un domestique. C’est nous qui l’avons institué, et, après comme avant son institution, nous restons ses maîtres. Entre nous et lui, « point de contrat » indéfini ou du moins durable « qui ne puisse être annulé que par consentement mutuel ou par l’infidélité d’une des deux parties ». Quel qu’il soit ou quoi qu’il fasse nous ne sommes tenu de rien envers lui, il est tenu à tout envers nous ; nous sommes toujours libres « de modifier, limiter, reprendre, quand il nous plaira, le pouvoir dont nous l’avons fait dépositaire ». Par un titre de propriété primordiale et inaliénable, la chose publique est à nous, à nous seuls, et, si nous la remettons , c’est à la façon des rois qui délèguent provisoirement leur autorité à un ministre ; celui-ci est toujours tenté d’abuser, à nous de le surveiller, de l’avertir, de le gourmander, de le réprimer, et, au besoin, de le chasser. Surtout, prenons garde aux ruses et manœuvres par lesquelles, sous prétexte de tranquillité publique, il voudrait nous lier les mains. Une loi supérieure à toutes les lois qu’il pourra fabriquer lui interdit de porter atteinte à notre souveraineté, et il y porte atteinte lorsqu’il entreprend d’en prévenir, gêner, ou empêcher l’exercice. L’Assemblée, même constituante, usurpe quand elle traite le peuple de roi fainéant, quand elle le soumet à des lois qu’il n’a pas ratifiées, quand elle ne lui permet d’agir que par ses mandataires ; il faut qu’il puisse agir lui-même et directement, s’assembler, délibérer sur les affaires publiques, discuter, contrôler, blâmer les actes de ses élus, peser sur eux par ces notions, redresser leurs erreurs par bon sens, suppléer à leur mollesse par son énergie, mettre la main avec eux au gouvernail, parfois les en écarter, les jeter violemment par-dessus bord, et sauver le navire qu’ils conduisent sur un écueil. ».

La première constatation qui s’impose est que l’on est loin de ce texte où presque tout est dit. D’abord, force est de constater que la constitution de la Véme République est, si l’on s’appuie sur cette doctrine, une constitution de type monarchique avec les pouvoirs qui sont donnés au Chef de l’Etat. Certes, il est élu au , mais n’est pas révocable par le peuple, c’est la première erreur. De plus, il est évident que tant de pouvoir concentré dans les mains d’un seul homme va à l’encontre d’un système véritablement démocratique. Chaque jour qui passe avec son lot d’abus de pouvoir apporte de l’eau au moulin de cette constatation, et les droits du peuple souverain n’existant pas la dictature avance à grand pas sans que l’on puisse y faire quelque chose de législatif et efficient pour l’en empêcher, il ne reste, un fois encore, qu’à battre le pavé de la révolution. Certes, on pourra voter à échéance déterminée, si cela comporte un intérêt, cela ne permet pas le contrôle continuel du pouvoir, les députés étant aussi logés à la même enseigne puisqu’aucun contrôle, blâme ou sanction ne peut permettre au peuple de rester le maître.

Il est évident que déjà on doit remettre en cause le principe du tel qu’il est conçu, d’autant qu’en dehors du non suivi de son action par le peuple son élection est sujette à caution car plus souvent élu sur la forme que sur le fond, la ayant pris l’avantage sur l’idéologie.

Il va aussi de même pour les élus des diverses assemblées, dont certains avec le système actuel ont même installé leurs affaires définitivement au ou à l’Assemblée nationale, non, on devrait pouvoir les révoquer, dans certaines conditions cela va de soit, lorsque l’on estime que leur travail ne sert plus les intérêts du peuple souverain.

Il va sans dire qu’un tel bouleversement ne sera pas du goût de l’oligarchie dominante, mais il faut bien se mettre dans la tête que la majorité c’est le peuple, et c’est cette majorité qui doit gouverner. Le peuple étant souverain par principe inaliénable, les hommes politiques n’en sont que les représentants et par conséquence les inféodés, comme dit la doctrine : les commis.

Cela nous amène donc à voir les choses sous un jour différent et à nous intéresser à l’auto-gouvernance. Concept dont on parle peu, mais qui remet la démocratie active à la base en préconisant l’autogestion, l’autonomie, l’autoproduction. Cela ne peut se concevoir qu’à travers une démocratie locale, une solidarité locale différente, et ceci allant même jusqu’à autogérer la production. Ce ne sont là que quelques pistes de travail ouvertes à ceux qui voient autre chose pour le monde de demain que l’exploitation de l’Homme par l’Homme…

Il y a deux siècles nos ancêtres y avaient pensé, pourquoi leurs descendants vivant dans un monde encore en construction n’apporteraient pas ce concept fermenté sur un terreau ancien et pourtant encore d’actualité…

http://le-ragondin-furieux.blog4ever.com

Messages

  • et ceci allant même jusqu’à autogérer la production.

    C’est tentant comme programme, mais il y a eu des précédents, kolkozes, kibboutz, qui ont duré le temps d’une génération, puis terminé ! Qu’est-ce qui a cloché ?

    • Il va sans dire qu’un tel bouleversement ne sera pas du goût de l’oligarchie dominante, mais il faut bien se mettre dans la tête que la majorité c’est le peuple, et c’est cette majorité qui doit gouverner.

      L’oligarchie (le 1% d’en-haut) fait partie du peuple souverain, pas les résidents étrangers qui travaillent ici. Le peuple nation ou le peuple démocratico-citoyen fait rarement peur à l’oligarchie qui paye chèrement sa classe d’appui (le dernier décile d’en-haut) pour soutenir le néolibéralisme.

      C’est d’en appeler au peuple-classe qui n’est pas du gout de l’oligarchie et de la classe dominante. Car par définition, il n’y a pas d’oligarchie dans le peuple-classe. Par contre il y a tous ceux d’en-bas. Y compris les résidents extracommunautaires.