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La marée verte, l’hypocrisie de nos dirigeants…

Publie le lundi 24 août 2009 par Open-Publishing
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de Michel MENGNEAU

S’il est un thème récurrent, à la mode, c’est celui de la croissance verte. Croissance économique mise à toutes les sauces dans lesquelles on a rajouté un colorant vert, baptiser bio pour leurrer le chaland et surtout pour faire semblant de sauver la planète. Il ne s’agit pas de celle-ci, mais d’une autre croissance verte toute aussi néfaste, celle de l’Ulve, appelée par les Bretons : « La Marée Verte » ; appellation que l’on doit aux similitudes avec les marées noires qui ont aussi souillé les côtes bretonnes.

Que sait-on de l’ulve ! On connaît bien maintenant les caractéristiques de la salade de mer, prénommée aussi la laitue de mer, dont on remarquera surtout qu’elle est cosmopolite et d’un naturel opportuniste car elle a la propension à une croissance exponentielle dans certaines circonstances. C’est donc vers les paramètres qui favorisent son expansion qu’il faut se tourner pour combattre les dégâts et désagréments causés par sa prolifération.

Une baie semi-ouverte et sablonneuse est propice à l’épanouissement de l’ulve. Si l’on ajoute à cela un fleuve côtier déversant de l’eau douce riche en azote pendant un fort ensoleillement de juillet, on a réuni les conditions pour voir un développement rapide de la laitue de mer. Puis celle-ci rejetée par la mer sur la côte va se décomposer et fournir de l’azote minéral qui va servir aussi de nutriment pour les autres laitues et favoriser ainsi la prolifération, régénération en circuit fermé en quelque sorte. En même temps, cette décomposition sera accompagnée d’émissions d’ammoniac et d’hydrogène sulfuré. C’est d’ailleurs à la suite d’un dégagement d’hydrogène sulfuré que le 4 aout un cheval a respiré ces émanations sur une plage de Lannion et de fait est décédé d’une embolie pulmonaire. Déjà, deux chiens avaient succombé, des vacanciers furent incommodés comme ce fut aussi le cas de la personne chevauchant le malheureux cheval, cavalier qui d’ailleurs fut hospitalisé.

Ces événements circonstanciés ont ravivé les récriminations à l’encontre de l’ulve. Cependant ils ne sont pas les seuls désagréments que l’on a constatés puisque les pêcheurs se voient dans l’impossibilité de tendre des filets lorsque les bancs d’algues deviennent trop compacts, pour ne citer que ce seul exemple qui n’est d’ailleurs pas un fait nouveau. On avait donc prévu dans le programme Prolittoral plusieurs investissements en direction d’opérations de remise en cause des méthodes agricoles sur les bassins versants puisque l’élément principal qui favorise la prolifération de l’algue est l’azote venu du ruissellement, du lessivage des terres peu perméables et saturées d’engrais chimique et par les rejets des élevages intensifs. En concomitance à été mis en place un programme de ramassage car, en plus de débarrasser le rivage pour en améliorer la salubrité, cette algue fait un bon engrais et le cas échéant peut être transformée en composte. Il va sans dire que ce ne furent que bonne intentions pour les bassins versants et surtout avec un moindre résultat dans la mesure où il n’y a pas eu de mesures drastiques envers l’agriculture, d’autant que sont les Chambres d’Agriculture qui unilatéralement furent chargées de toutes les procédures, juges et partie si l’on peut s’exprimer ainsi… ; ce ne sont d’ailleurs pas les seuls paradoxes de cette affaire.

Donc nous voilà revenu au départ et l’on a vu le premier ministre profitant des incidents de Lanion s’offrir une pub écolo, un à-propos médiatique dans la mesure où son intervention tombait à pic pendant l’université d’été des Verts.

Cette inconséquence manifeste des politiques servie par une communication médiatisée et superficielle avait commencé avec les actes du Préfet des Côtes-d’Armor -représentant de l’Etat qui pourtant n’est pas par habitude un plaisantin- qui avait recommandé aux plaisanciers de faire preuve de responsabilité, c’est-à-dire qu’il leur subodorait de ne pas mettre leurs pieds où la laitue se décomposait, comme on le voit un engagement fort de l’état qu’il a renforcé encore avec la nomination d’un vague Monsieur algues vertes ! Comme on peut l’imaginer ces mesures dérisoires on fait grincer des dents plus d’un, ce qui a même fait dire à certains qu’il lui ferait bien bouffer ce genre de laitue pour le mettre véritablement devant ses responsabilités, c’est donc sur une polémique en devenir que Fillon est apparu tel le messie. On remarquera d’ailleurs que dès que le moindre problème devient épineux, que l’on veut faire semblant de s’en occuper sans rien faire sur le fond, pour noyer le poisson en somme, on crée un poste pour un Monsieur Machin, un Monsieur Truc grassement payé, un faire valoir pour tromper le lampiste… Et l’apothéose de l’hypocrisie est la clôture de l’événement par l’intervention médiatisée d’un ministre, du Premier le cas échéant, et la cerise sur le gâteau, l’apparition de sa Majesté, dans ce cas là, incontestablement, on est sauvé !

Pour compléter les initiatives minables de son Préfet, Fillon, qui est à l’évidence un comique qui s’ignore, a décidé que l’Etat prendrait en charge le nettoyage des plages et mettrait en place une commission interministérielle pour établir un plan d’action. Si le nettoyage libère un peu les communes sur le plan financier rien n’a été proposé d’efficience sur un problème que l’on connaît de longue date. Ca c’est pour la part gouvernementale !

Pour les Verts qui étaient réunis à , s’ils ont regretté la réaction tardive des autorités ce fut surtout pour faire remarquer que celle-ci intervenait au moment où eux tenaient leur université d’été et que cela était un leurre pour montrer au public qu’il n’y avait pas que les Verts qui s’intéressaient à l’environnement. Moralité, ces gens là sont plus intéressés par la guerre médiatique, à l’évidence obnubilés par qui occupera la une de l’actualité, plutôt que de s’attaquer véritablement à des problèmes de fond en faisant des propositions réellement constructives avec des choix de société.

Les socialistes ne pouvant rester à la remorque de cette joute médiatique se sont donc mêlés aux débats et ont reproché au gouvernement de ne pas parler d’une mutation agricole et d’agriculture durable –expression à la mode et qu’ils aiment décidemment beaucoup, mais qui ne veut rien dire- pour les bassins versants. Certes, le terme de mutation est probablement le bon, mais pour que cela soit efficient c’est la mutation de l’agriculture dans son ensemble afin de sortir d’un productivisme dévastateur qui est souhaitable, c’est donc par un véritable choix de société que se régleront des problèmes comme celui de l’ulve et non par quelques replâtrages épars. La médiatisation ponctuelle sur la marée verte et ses conséquences -même s’il n’était pas inutile de prendre véritablement conscience de la nocivité de l’ulve et trouver des solutions d’urgence- ne doit pas cacher que c’est l’ensemble du système qui conduit à de telles détériorations de la nature. Si la marée verte est le résultat visible de la pollution due au productivisme humain n’oublions pas, par exemple, que les nappes souterraines sont aussi polluées dans leurs grandes majorités.

De fait, il faut changer totalement les mentalités et dire halte à l’agro-business, revenir à une agriculture plus proche du consommateur et qualitativement naturelle, entre autre, est une priorité pour l’avenir de l’humanité. Ce qui n’est pourtant pas le cas car il est question que d’autres élevages industriels de porcs viennent s’implanter dans le secteur déjà touché par la marée verte. Pour éviter cela, il n’y a donc pas d’autre alternative que de redonner la part belle à une agriculture plus humaine où le rendement maximum obtenu par n’importe quel moyen ne sera plus un leitmotiv et favoriser ainsi les petites et moyennes exploitations. Cela évitera des situations paradoxales comme celle du céréalier qui cultive du blé et autres céréales sur 700 à 800 hectares et qui va acheter un poulet infect élevé à la farine dans une grande surface. Sans doute qu’avec une pratique plus proche aurait-il pu consacrer un petit enclos avec quelques volailles élevées aux grains non-OGM pour sa consommation personnelle et fournir le cas échéant le voisinage, c’est effectivement un autre concept. Aussi ne pas produire du maïs coûte que coûte nécessitant des arrosages intempestifs, dont une grande partie est destinée à une exportation subventionnée. Ce qui fait que les paysans mexicains ou africains ne pourront plus produire leurs céréales pour la vente de proximité car on trouvera sur place des exportations beaucoup moins chères que leurs productions. Aberration du système qui en détruisant la petite agriculture locale des pays défavorisés favorise activement la migration des populations et de surcroit assèche les nappes souterraines. Et lorsque l’on subventionne l’agriculture dans certains pays d’Afrique par exemple c’est en direction des grosses exploitations qu’une grande partie des subsides est distribués, et le pire, pour souvent produire des agro-carburants, la nouvelle manne juteuse de l’agro-business. Sans parler de l’ensilage de maïs qui ne donne pas une viande de bonne qualité pour ne citer que ce défaut là. Revenons à une agriculture plus raisonnable en fonction de nos besoins et avec surtout un regard qualitatif tout en respectant l’environnement, « avec des localisations planétaires en respect des spécificités du terrain afin de mieux répartir les richesses ».

Le cas de la marée verte s’inclut donc dans une autre conception de notre société, faire quelques ajustements, faire des actions ponctuelles même percutantes, ne résoudront en aucune manière le processus engagé de désagrégation de la planète. Il est donc urgent de prendre le taureau par les cornes et d’inverser le mouvement productiviste actuel, demain il sera trop tard, l’ulve éradiquée en partie ici aura une petite sœur qui étouffera notre espace ailleurs. Cent fois il faudra remettre l’ouvrage sur le métier à tisser et ceci pour un piètre résultat si l’on ne traite pas le problème sur le fond et en totalité…

Ce n’est donc pas par des pis-aller médiatisés que l’on sauvegardera la planète, par conséquence en relocalisant et en sortant du concept de croissance exponentielle nous devons en même temps nous débarrasser du capitalisme productiviste, c’est la condition première pour avoir véritablement des résultats concrets.

Comme cela n’est semble pas au programme de nos dirigeants, qu’ils soient à l’UMP, au Modem ou socialistes, raison de plus chez les Verts, c’est le pourquoi d’une façon de faire qui n’est qu’hypocrisie, de la et c’est tout…

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