Accueil > ... > Forum 445249

Quelques réflexions sur le mouvement des "Indignés" en France et la tentative de campement de la Bastille

31 mai 2011, 10:11, par la Canaille via AC

fatigué..je laisse mon tour à la C@n@aille Rouge sur son blog

Ses réflexions recoupent certaines de.L.L..

http://canaille-le-rouge.over-blog.com/article-grandir-a-madrid-et-ailleurs-75148443.html


Grandir à Madrid…et ailleurs


"Je ne pense pas que le mouvement me permettra de trouver du travail, mais il me redonne de l’espoir, l’envie de me battre
", Rien que cette phrase prononcée à Murcie par un gars de 26 ans est une première grande victoire.

A partir de quelques infos glanées dans la presse et de contacts avec des gens sur place, ce qu’envoient des amis de La canaille, un constat.

Madrid, sur la Puerta del sol, pendant près de deux heures, les mains souvent peintes de blanc, la foule a agité des fleurs et des bouquets de toutes les couleurs pour signifier son refus de la violence. C’est beau, certes. Cela ne calme pas la féroce exploitation des ouvriers agricoles où les récoltes sont aussi hors sol que les latifundiaires qui les exploitent.

Tout est là : le fond de colère ne dispose pas des formes d’action nécessaires pour imposer les changements. Elles sont à inventer ou à réinventer. Pas à exporter d’un ailleurs peu qualifié (et qui ferait bien de s’occuper de sa situation avant de donner des leçons), ni à importer, la lutte de classe, car c’est d’elle qu’il s’agit, ne supporte pas le prêt à porter, à penser, à déléguer. La traversée du 20ème siècle et là pour nous le rappeler.

Scandant "Barcelone n’est pas seule" ou "Nous ne sommes pas des délinquants mais des citoyens" La foule brandissait des pancartes indiquant "Moins de policiers et plus d’éducation". Aux abords de la place, les flics, pas trop pressant, se tenaient immobiles, devant une dizaine de fourgons.

Du monde, qui se mobilise via les portables. On peu mobiliser avec internet, rapidement. Cela ne suffit pas pour s’emparer des leviers politiques. Un courriel permet d’envoyer les flics pour évacuer une entreprise, il ne suffira pas pour décider et organiser un piquet de grève. Il permet de fermer une usine, de licencier le personnel, il ne permet pas d’occuper l’usine et de paralyser les pratiques patronales, il ne permet pas la prise en main de ces leviers économique et politiques qui transforme l’indignation en action.

Pour autant ne pas sous estimer ou se moquer de ce qui se forme. Une onde grandit en amplitude et d’autres la rejoignent. Si fréquence et amplitude augmentent, là du neuf est possible.

Il est sûr que les laboratoires à idées du capital doivent tourner à toute vitesse pour élaborer des parades à ce qui par manque de densité et de projet n’est pas encore une subversion mais qui à la moindre étincelle pourrait faire évoluer la donne. Avec une idée fixe pour eux : empêcher toute convergence sociale. La CES et ses apparatchiks, aussi hors sol que les fraises d’Andalousie, s’y emploient.

L’étincelle espagnole, peut partirpar exemple de la condamnation forte de ceux qui ont dépêché la police contre les manifestants de Barcelone.

Relevé dans le Monde :

"Inadmissible qu’une telle manifestation de violence ait eu lieu à l’encontre d’un mouvement qui n’a cessé d’être pacifique", s’offusque Eduardo, psychologue de 33 ans. Les autorités ont voulu nous faire peur. Mais nous n’avons pas peur !"."Cela ne change en rien notre mobilisation, confirme Miquel, professeur d’histoire de 56 ans. Au contraire, ces événements vont renforcer le mouvement, nous souder davantage."

"Certains, parmi les plus indignés des "indignés", ont appelé à éteindre la télévision, ce samedi soir, au moment de la diffusion du match de football opposant le FC Barcelone à Manchester United à Londres. "Le foot, c’est la seule chose qui intéresse le gouvernement, car il draine beaucoup d’argent", déplore Santiago, l’un des porte-parole du mouvement madrilène."

A Madrid, les manifestants sentent d’autant plus solidaires que la police a déjà tenté de les déloger de la place emblématique de la ville, où campent encore plusieurs centaines de personnes.

Le ministre de l’intérieur, Alfredo Perez Rubalcaba, a aussi annoncé que les autorités "étudiaient" une éventuelle évacuation de la place, suite aux demandes insistantes du gouvernement régional et des commerçants. L’aiguisement en termes de classe se précise : le négoce prend position pour …l’ordre fût-il celui du PSOE.

Sur la place de la Puerta del Sol.

"Le maintien d’une adhésion forte au mouvement du 15-Mai dépendra en grande partie du comportement des autorités, souligne Jaime Pastor Verdu, politologue espagnol. Si elles se livrent à la répression et évacuent les campements, la mobilisation gagnera en force et bénéficiera d’une solidarité accrue de la population."

Murcie, extrême sud, quatre cent mille habitants 27 mai :L’émotion gagne l’assistance lorsqu’un retraité prend la parole : "A l’époque de Franco, je me suis battu pour cette démocratie. Depuis, on l’a dénaturée. Il faut reprendre le combat et ne pas s’arrêter." Le politique commence à se donner des repères.

L’indignation est forte. Elle ne suffit pas à bouger les lignes et encore moins à subvertir le système. Cela doit-il conduire à se moquer de ceux qui depuis des jours sont au moins la mauvaise conscience d’une social-démocratie pris en flagrant délit permanent de si bien gérer le système que même la droite n’arrive pas à faire aussi bien pour le capital ? Bien sur que non.

Si on regarde ce qui structure socialement la protestation en Espagne, il est clair que des correspondances fortes avec les jeunes de tous les pays de cette UE de plus en plus honnie se retrouvent :

¤ 45% de chômage chez les jeunes
¤ une crise économique qu’on prévoit longue
¤ l’absence de perspectives d’avenir
¤ des mesures de restrictions économiques et sociales
¤ des appels au sacrifice et à l’austérité
¤ le spectacle de l’impunité de la corruption des politiciens
¤ le scandale des hauts revenus dans les conseils d’administration et des bénéfices des banques
¤ l’attitude conciliatrice des syndicats
¤ le discours vide des partis politiques et leurs magouilles
Avec tous les jeunes …et au delà.

Trouvé cela dans rue 89, qui n’explique pas tout mais débroussaille bien le terrain : L’interview d’un militant genre coco-anar ou anar-coco au choix, qui a connu 68, pointe quelques réalités qui ne sont pas propre à l’Espagne :

" Il y a là un ensemble de circonstances qui expliquent suffisamment le mécontentement, l’indignation et l’écœurement d’une partie de la jeunesse, mais il y a aussi d’autres éléments qui ont rendu possible ce que tu appelles l’insurrection actuelle :

la crise de la représentation, c’est-à-dire le sentiment de n’être reconnu par personne dans une démocratie dite représentative

l’abandon de la peur : c’est elle qui, dans des situations de récession, bloque la combativité ; les gens ont peur de perdre leur travail, d’encourir des représailles…

le sentiment d’un manque d’éthique généralisé, dans les relations internationales, dans les partis politiques, dans les milieux financiers

le sentiment qu’alors que des manifestations de résistances se produisaient un peu partout, Grèce, Angleterre, Portugal… la jeunesse espagnole était anesthésiée

la capacité de vaincre, très présente dans la force de l’imaginaire récent, manifestée par la détermination des occupants de la place Tahrir, au Caire.

En même temps, il est probable que pour ce qui est des formes concrètes prises par le mouvement, auto-organisationnelles, autogestionnaires, « assembléaires », sans leaders, avec des rotations permanentes, une certaine influence provienne des traditions libertaires ancrées dans l’imaginaire espagnol, et des réminiscences d’un Mai 68 que l’on retrouve dans l’ingéniosité des phrases écrites sur les affiches."

Mais là bas comme ici, constat de l’absence d’une organisation créée par et pour le mouvement populaire, ancrée dans la réalité de ce mouvement, d’une organisation qui soit le fruit de ce mouvement, capable d’aider à construire l’alternative et d’occuper le terrain politique, pas par délégation mais par investissement massif.

En France à l’automne la classe ouvrière, les salariés ont subit l’absence de forces politiques capable de pousser une alternative ouvrant perspective aux mobilisations. En Espagne, dans des conditions différentes, cette disparition d’une telle force politique, comme en Italie d’ailleurs laissent le capital tranquille.

Là où existent de ces partis communistes qui donnent des cauchemars au FMI, à l’UE, et à toutes les forces politiques qui ne les combattent pas frontalement (GUE comprise qui les boycotte voir les calomnie), le dynamisme des luttes met plus et mieux les pouvoirs en difficulté.

Contre le Patronat et ses serviteurs, contre le FMI de Lisbonne à Athènes

A voir ici les programmes qui se concoctent dans les gargotes du prêt à voter 2012, urgent non seulement de s’indigner y compris contre ces tambouilleurs mais d’ouvrir les fenêtres et de créer le courant d’air qui mettra le rouge aux joues.

C’est dans le mouvement que se créera l’organisation capable de conduire la transformation. Un mouvement qui travaille au dépassement des partis compromis pour se mettre en marche pour supprimer le capital.

Ce capital qui, les formes, la diversité et le niveau des luttes pour lui résister le montre, est d’abord un rapport social, un rapport social d’exploitation.