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L’inquiétude monte sur le niveau d’abstention

20 avril 2012, 13:21

Même si la montée de l’abstention est une tendance lourde de la vie politique, la présidentielle reste une élection où la mobilisation demeure forte.

À l’issue d’une campagne jugée décevante par l’opinion, des indices laissent redouter une désaffection assez importante pour les urnes.

Y aura-t-il du monde dans les bureaux de vote ? Comme à chaque veille de scrutin, la question revient. Pour tenter d’y répondre, chacun scrute les indices disséminés au fil de la campagne. Côté positif, le succès de la primaire socialiste qui a donné le coup d’envoi de cette présidentielle a montré une envie de participer des citoyens. De même, l’affluence record dans les ­meetings de plein air de plusieurs candidats confirme un attrait pour l’élection. À l’inverse, le nombre de nouveaux inscrits sur les listes électorales est resté bien loin de l’afflux constaté avant 2007. De plus, toutes les enquêtes enregistrent le regard très critique porté par l’opinion sur la campagne, les électeurs jugeant qu’elle s’est déroulée loin de leurs préoccupations.

Tout cela donne un paysage contrasté, nourrissant l’idée que le millésime 2012 pourrait bien enregistrer une poussée de l’abstention, sans forcément culminer à un niveau historique. La présidentielle, mère de toutes les batailles électorales, est d’ordinaire le scrutin qui mobilise le plus les électeurs. D’ailleurs, rappelle le politologue Jérôme Jaffré dans une note réalisée pour le Centre d’études politiques de Sciences-Po, « si l’on classe toutes les élections depuis 1965 selon leur niveau de participation, neuf des dix premières places sont occupées par la présidentielle ». Le record, tous scrutins confondus, revient ainsi à un second tour de présidentielle, celle de 1974, où seuls 12,7 % des électeurs avaient déserté les urnes.

Ce taux de participation historiquement haut semble cette fois totalement hors d’atteinte. Dans leurs dernières prévisions, les instituts de sondages mesurent une abstention sensiblement au-dessus de 20 %, peut-être même au-delà de 25 %. Soit tout de même un électeur sur quatre. Cela propulserait l’élection 2012 à un haut niveau d’abstention, proche du premier tour de 2002 où la désaffection avait culminé à plus de 27 %. Et confirmerait la tendance lourde d’une érosion de la participation au fil des ans, même si « l’abstention varie aussi en fonction de l’intérêt que ressentent les électeurs », nuance Thierry Vedel, professeur à Sciences-Po.
Un contexte pas favorable à la mobilisation

Des configurations particulières peuvent en effet accentuer ou contredire le mouvement. L’élection de 1969, où la gauche était atone, avait ainsi connu une participation médiocre pour l’époque de seulement 77 %. Au contraire, celle de 2007 avait enregistré une chute brutale de l’abstention (16,2 %) en raison du souvenir du « coup de tonnerre » de 2002 et des personnalités très « clivantes » en lice, Ségolène Royal comme Nicolas Sarkozy.

Cette fois-ci, le contexte n’est pas favorable à la mobilisation. En revanche, rien ne dit que cette désaffection se fera au détriment de la gauche. L’envie d’alternance et de vote sanction semble en mesure de pousser l’électorat de gauche aux urnes. « On voit une mobilisation de l’électorat de gauche entretenue d’ailleurs par François Hollande qui brandit souvent le spectre du 21 avril 2002 », note Thierry Vedel. À l’inverse, c’est l’électorat de droite qui pourrait cette fois se montrer plus réticent à rejoindre les urnes pour reconduire le président sortant.

MATHIEU CASTAGNET La Croix 19/4/12