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> Un grand espoir

30 mai 2005, 10:34

C’est une erreur : la France est "contributeur net" au budget de l’Union européenne, autrement dit l’Etat français verse plus qu’il ne reçoit, pour un différentiel d’environ 3 milliards d’euros chaque année (il y a 6 pays sur 25 qui sont dans ce cas : outre la France, l’Allemagne, la Suède, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Grande Bretagne, avec cependant pour cette dernière un mécanisme de remboursement partiel, depuis 1984 et le fameux "i want my money back" de Margareth Thatcher, appelé encore le "chèque britannique"). Ensuite l’expression "vos travailleurs qui profitent des subventions" est tout à fait erronée : personne ne "profite" des subvention, il n’y a pas de "profit" là-dedans. Les subventions sont un mécanisme de péréquation et de régulation des distorsions "spontanées" du marché capitaliste. Prenons un seul exemple l’agriculture : "spontanément" le marché tire les prix agricoles à la baisse ; il y a en effet une multitude d’acteurs producteurs (des millions d’agriculteurs indépendants) face à un petit nombre d’acheteurs, non les consommateurs eux-mêmes, mais les oligopsones de la grande distribution et de l’industrie agro-alimentaire qui controlent de 60 à 80% du marché. Fatalement la concurrence jouant à fond, entraine les prix à la baisse, jusqu’à un niveau où le producteur devient non rentable. Le mécanisme de la subvention dite de "soutien aux prix", permet, par les prélèvement fiscaux opérés tout au long de la filière agro-alimentaire ( TVA, impôts sur les bénéfices), de redistribuer une partie de la valeur ajoutée créée aux producteurs de base. C’est un "juste retour" des choses et non un "profit". C’est ce mécanisme même, qui depuis 40 ans a rendu l’agriculture européenne si performante, la première du monde en valeur absolue de production, en production par habitant, en exportation.
L’un des grands enjeux de ce Traité de constitution est précisément la pérennité ou non de ce modèle, le cas échéant son extension à d’autres secteurs (services, éducation, culture, eau et énergie, infrastructures de transport...) comme il le faudrait, ou son démantèlement tel qu’il est promu par les traités de Maastricht et d’Amsterdam, et tel qu’il est radicalisé par les dispositions de la partie III du traité ! Le marché seul, pour de très nombreux domaine conduit à l’échec, à preuve la faillite financière d’Eurotunnel, type même des grandes infrastructures pour lesquelles les mécanismes du marché capitaliste est inadapté. Demain, face au "global challenge" de la crise écologique, d’immenses investissements à long terme seront nécessaires dans les domaines des transports (ferroutage, limitation de l’auto et de l’avion etc.), des sources d’énergie renouvelables, de l’urbanisme... Or le néo-libéralisme conduit en ces domaines à la catastrophe. Le TCE tend à interdire, par rigidité idéologique, et alignement complet sur la ligne des Fonds de pension, des marchés financiers, du capital le plus spéculatif, que l’Europe politique se mette en place sur ces programmes d’économie mixte, capable de piloter et de réguler à terme, les dysfonctionnements spontanés issus de la "concurrence parfaite", et faire face au défi de l’avenir.
Voilà pourquoi le NON en France est une bonne nouvelle, et sera suivi, vraisemblablement par les différents peuples d’Europe appelés à se prononcer à ce sujet (Pays-Bas, Danemark, Pologne, Grande Bretagne, peut-être la République Tchèque...)