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Ne pas confondre héroïsme et sacrifice

18 mai 2007, 02:54

La mort des victimes ne sert à rien hélas ; c’est un appel à la jeunesse non à se révolter ni à l’insoumission mais au sacrifice, et au contraire un appel à la soumission sacrificielle de la jeunesse pour la collectivité, dans le sens le plus biblique du terme... (Abraham) tel m’apparaît la signification de ces intentions présidentielles inaugurales ; en associant le jeune Möquet avec l’hommage à Clémenceau, celui qui a réprimé durement les déserteurs fraternels pendant la première guerre mondiale au nom de la victoire nationale, il créée un effet d’effacement de la résistance, il ne faut pas s’y tromper, tout en flattant les communistes déçus par le premier tour... C’est proprement machiavélique (non pas dans le sens progressiste du terme car il en est un, mais dans le sens négatif convenu ;-)

La mort du colonnel Fabien n’a servi à rien, ce qui a servi c’est qu’il se fut porté volontaire comme militant communiste pour donner le signe clair de l’entrée du parti en résistance, en tuant un allemand dans le métro de Paris. Et par conséquent, commettant en quelque sorte le premier attentat sucide en France moderne ; à défaut de se faire sauter avec sa cible, puisqu’il fallait donner clairement le message de la guerilla, il s’est fait immédiatement arrêter et certes fut condamné à mort. Ce qui a servi c’est le crime qu’il a commis lui-même, mais contre les liberticides — quitte à en avoir sciemment payé le prix de sa propre vie.

Ni l’affiche rouge, ni Fabien, n’auraient pu faire l’objet d’une célébration par ce nouveau président, vu la somme des signes contradictoires ou associés de morbidité et de mortifications du peuple qu’il a adressés aux citoyens français mercredi, en cinq annonces symboliques.

Si de Gaulle avait une place associée à la résistance communiste, ce n’était sûrement pas à mettre en équivalence l’armée civile et militaire des forces françaises libres commandées depuis un gouvernement en exil (donc tous insoumis), avec l’armée nationale de Clémenceau qui a fusillé des internationalistes, communistes et anarchistes parce qu’ils refusaient la guerre nationaliste et convainquaient des deux côtés de la frontière les autres soldats de ne pas faire la guerre.

Où de Gaulle n’a jamais trahi son héritage héroïque propre, c’est en restaurant le devoir d’insoumission aux droits de l’homme suspendus, en annexe de la constitution du gouvernement de la Libération, et en le restaurant dans la 5è comme il avait disparu dans les gouvernements précédents adeptes des droits adoptés à Rome par les réactionnaires collaborateurs revenus au pouvoir en 1955.

Sans amnistie. il n’y aurait jamais eu de paix civile assurée par de Gaulle plutôt que la guerre civile. Mais insoumission et amnistie sont liés. On sait et on voit avec Battisti, comme avec les prisonniers d’Action Directe pourtant parvenus au terme de leur temps de prison incompressible, commele nouveau président ignore l’amnistie du peuple... Au point qu’il a dérogé à l’amnistie présidenteille des petits délits, pourtant traditionnelle pour inaugurer sa fonction.

Ignorer que la notion de paix civile dans la conception et la pratique de de Gaulle reposait à la fois sur la reconnaissance du droit d’insoumission et de l’amnistie succédant aux crises, tout en associant l’hommage à de Gaulle à celui de Clémenceau, avec d’un côté le soldat inconnu et de l’autre l’activiste otage se réalisant en victime et non pas en héros, ou même les fusillés du monument de la cascade, parce qu’ils composaient un syncrétisme des forces de résistance, est proprement un détournement du sens de chaque symbole, au profit d’un sens global dont il ne faut ni se réjouir ni ne pas s’apprêter à le combattre.

Je trouve au contraire cela non pas putassier, mais clairement signifiant d’un pire annoncé. Cela même, fait froid dans le dos.

O.