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Lettre ouverte à J-F Julliard, secrétaire général de Reporters sans Frontières

18 décembre 2008, 14:47, par maxime vivas

Tout sur Ménard au Qatar.

Robert Ménard dirige« le Centre for Media Freedom » à Doha. RSF est cofondatrice avec l’émirat de ce « Centre pour la liberté de l’information » créé en décembre 2007.

Le Qatar est un pays peuplé de moins d’un million d’habitants, gorgé de pétrole et dirigé par le cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani, chef de l’Etat comme le fut son père et comme le seront ses descendants.

Il attribue au centre de Ménard une dotation annuelle de 3 millions de dollars.

Ce pays est-il le pire qu’on puisse trouver dans sa région ? Non, il existe autour de lui des dictatures d’un obscurantisme plus grand.

Attendons-nous d’ailleurs à voir bientôt nos médias, aiguillonnés par Ménard, nous expliquer sous peu les mille et un mérites du Qatar.

Ménard concède cependant que l’émirat, 79e du classement 2007 de la liberté de la presse de RSF, peut encore « faire des progrès en la matière ».

Et pas qu’en cette matière, d’ailleurs. En effet, le Qatar connaît-il des déficits de démocratie uniquement avec la presse ? Non, si l’on en croit l’organisation Amnesty International.

Les tribunaux continuent de prononcer des condamnations à mort et des peines de flagellation.

Les autorités n’ont pris aucune mesure appropriée pour mettre fin à la discrimination et aux violences contre les femmes.

Les travailleurs migrants sont durement exploités, certains ne sont pas payés, ceux qui protestent sont interpellés, maltraités, puis renvoyés dans leur pays.

Après une visite au Qatar la rapporteuse spéciale des Nations unies sur la traite des personnes, en particulier les femmes et les enfants, a exprimé sa préoccupation à propos des travailleurs immigrés victimes de traite d’êtres humains.

On compte au moins 22 prisonniers sous le coup d’une sentence capitale.

Aucune enquête n’a été menée par les autorités du Qatar sur les actes de torture et les mauvais traitements qui auraient été infligés à au moins 31 prisonniers condamnés pour leur participation présumée à une tentative de coup d’Etat.

Le droit du Qatar ne comporte pas une définition de la torture conforme aux normes internationales, les procédures d’arrestation et de détention sont susceptibles de favoriser le recours à la torture contre les suspects.

Quant à la presse il lui est interdit d’exprimer toute critique contre la famille régnante ou d’avancer toute idée de changement politique.

Résumons : Ménard, donneur universel de leçon, travaille pour une monarchie polygame où la violence contre les femmes n’est pas illégale, où les lois découlent non pas des élus du peuple mais de la charia (loi musulmane), où la liberté de la presse est restreinte, où les travailleurs immigrés subissent un quasi-esclavagisme, tandis que perdurent la flagellation, la torture et la peine de mort.

Depuis sa reconversion dans ce pays, un des plus riches du monde, Robert Ménard a déjà proféré quelques mensonges.

Le premier, est que son salaire n’a pas été négocié. Il part sans savoir s’il va être payé comme un manœuvre Népalais qui n’a pas intérêt à prononcer le mot « syndicat ».

En vérité, et alors que le centre ne fonctionne que depuis quelques semaines, RSF reçoit depuis un an 10 000 dollars par mois en provenance du Qatar. On attend de savoir combien Ménard touche depuis qu’il travaille.

Le deuxième mensonge est que son Centre n’est pas une maison d’accueil de journalistes. Il est, à ce jour, une maison d’accueil de journalistes femmes. Il va ouvrir une seconde maison pour les hommes. Cette discrimination qui ferait hurler RSF si elle existait en France ou dans un pays d’Amérique latine en lutte contre l’hégémonie des USA, ne le choque pas au point de lui faire claquer la porte en criant des injures.

Enfin il affirme que le Qatar est le seul pays arabe où l’on peut réunir des journalistes musulmans et juifs. C’est évidemment faux.

Et d’ailleurs, pourquoi aller si loin ? On peut les réunir en France, et sans séparer les hommes des femmes.

Il semblerait que Ménard ait été "démissionné" avec conseil d’aller se faire oublier. Il aurait pu cependant choisir dans son document "classement de la liberté de la presse" un pays plus attaché à la démocratie, et tant pis s’il est moins généreux.