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Echange de courrier entre la LCR et LO

Publie le jeudi 28 février 2008 par Open-Publishing
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Le 25 novembre, nous avons envoyé à LO une lettre dans le but d’engager une discussion écrite suite à une rencontre entre des délégations de nos deux organisations qui s’est déroulée le 14 novembre. Ce courrier avait pour but d’approfondir le débat sur le nouveau parti et les municipales. Nous publions ici la réponse de LO à ce courrier et une réponse de la LCR à celle-ci.

Courrier de Lutte ouvrière

A l’attention du Bureau Politique de la LCR

Chers camarades,

Nous souhaitons, quoique avec retard, répondre à votre courrier en date du 27 novembre 2007 qui, écrivez-vous, avait pour but de poursuivre la discussion engagée lors de notre rencontre du 14 novembre 2007. Nous avons tardé en grande partie car nous avons pensé, vu le contenu de votre lettre, qui ne faisait que reprendre en substance notre discussion, que vous n’attendiez pas vraiment de réponse, surtout immédiate. Cela a cependant servi de prétexte à un des rédacteurs de Rouge pour écrire que nous refusions la discussion (Rouge du 7/02/08), rédacteur qui confond manifestement cela avec le fait de ne pas être convaincu par le renouvellement de vos arguments et qui oublie, ignore ou feint d’ignorer, qu’il est arrivé à la LCR de répondre bien plus tardivement que cela à l’un de nos courriers sans que nous l’accusions de surdité volontaire. Mais revenons au fond. Nous vous avons dit ne pas accepter de constituer des listes en tête-à-tête avec vous aux municipales car nous ne voulons ni participer ni paraître associés à la construction du parti que vous envisagez ni cautionner les bases sur lesquelles vous voulez le construire. Votre courrier affirme que vous ne faisiez pas de l’adhésion à cette construction une condition “pour constituer des Iistes de rassemblement anti‑capitaliste". C’est heureux ! Cependant dans tous vos textes ou presque, tout en disant que c’est différent, vous associez la construction de vos listes et votre campagne avec le projet de construction de ce parti. Nous n’en finirions pas de citer ce que vous écrivez à ce propos, mais quelques extraits prouveront amplement ce dont nous ne voulons pas ;

"De fait, l’essentiel de la discussion, lors de cette DN, s’est cristallisé sur la question du processus de fondation d’un nouveau parti anticapitaliste. Une large majorité de la direction ( 717. pour, 23 Z contre) s’est dégagée pour soumettre au débat de l’organisation la perspective de chercher à fonder, avec tous ceux et celles qui le souhaitent, un nouveau parti politique a ticapitaliste, afin de "défendre un programme d’urgence anticapitaliste, à l’image de celui qu’a porté Olivier Besancenot à la présidentielle", et lutter sans concession contre la politique du gouvernement, dans le cadre d’un refus de toute alliance institutionnelle avec le PS. Cette démarche devrait articuler débats dans la LCR, réunions publiques dès la rentrée, présentation d’un maximum de listes anticapitalistes indépendantes du PS aux elections municipales, puis la tenue d’assises départementales et nationales, le congrès national de la LCR permettant d’effectuer un bilan d’étape" (Rouge no 2213 ‑ 5/07/2007)

“Dans un premier temps, nous proposons que s’organisent, dès la rentrée de septembre, des réunions dans le plus grand nombre de villes, de quartiers, d’entreprises, de facs et de lycées possibles. Il s’agira de débattre à la fois des formes et des moyens de la riposte indispensable aux measures prises par le gouvernement, du programme et du fonctionnement démocratique du parti que nous voulons créer, de la présentation, dans un maximum de villes, pour les prochaines échéances municipales, de listes anticapitalistes totalement indépendantes du PS et de ses alliés. La constitution de ces listes participera de la démarche pour le nouveau parti (Rouge n’> 2213 ‑5/07/2007)

"Les municipales de mars 2008 ont pour ambition de faire de cette échéance un test contre la politique du gouvernement et d’offrir une perspective de rassemblement anticapitaliste face au ralliement du PS au libéralisme. D’autre part, nous inscrivons notre politique électorale dans le cadre plus large de construction d’un nouveau parti anticapitaliste, en toute indépendance des partis de lagauche institutionnelle"... "Si les listes dont nous serons à l’initiative ne seront pas des listes pour un nouveau parti anticapitaliste, si elles viseront à rassembler bien au-delà de celles et ceux qui seront déjà convaincus de cette perspective, la LCR mettra à l’ordre du jour de leurs débats sa proposition de construction commune d’un tel parti. Ainsi, notre campagne aux municipales servira à élargir et dynamiser la bataille politique pour le nouveau parti" (Résolution Municipales 2008 ‑ Réunion Direction Nationale LCP, ‑ Fin septembre 2007)

"Dans de nombreuses localités, comme au niveau national, les élections municipales permettront, là encore, de débattre, parmi d’autres thèmes, de la nécessité d’un nouveau parti, qui soit une reference pour les luttes et les mobilisations" (Rouge No 2222 ‑ 11/10/2007)

"Il existe une certaine autonomie entre la bataille que mène la LCR pour la création d’un nouveau parti anticapitaliste et la volonté de constituer et d’être partie prenante d’un maximum de listes aux municipales. En particulier, pour la LCR, l’adhésion au projet d’un NPA ne saurait être une condition pour constituer des listes à ces élections. Mais si les élections municipales e t le NPA ne se recoupent pas totalement, ils n’en demeurent pas moins que les deux sont étroitement liés. C’est la bataille politique que nous menons pour la création d’un NPA qui donne une cohérence d’ensemble à ce que nous faisons aux élections municipales. En retour, les résultats des élections municipales, par la capacité à faire militer largement avec la LCR, peuvent donner de nouveaux points d’appui pour développer le processus" (Rouge no 2227 ‑ 15/11/2007)

"Penser global, agir local, rassembler celles et ceux qui veulent une gauche 100 % indépendante du PS, commencer à militer et fonctionner comme le nouveau parti anticapitaliste pour lequel nous militons, tels sont les enjeux de cette campagne dans les trois mois à venir. (Rouge no 2231 ‑ 13/12/2007)

"Toutes ces questions et expériences ont conforté les principales thématiques, développées dans la brochure "Municlpales mars 2008, les propositions de la LCR" que défendront les candidats de la LCR 100 % à gauche. Ces revendications seront un point d’appui pour que naisse enfin la force anticapitaliste nécessaire pour que cet autre monde soit enfin possible"(Rouge n 2232 ‑ 20/12/2007)

"Dans certaines villes, des listes se constituent en cohérence avec les propositions du nouveau parti anticapitaliste, rassemblant plus largement des candidats de multiples horizons déterminés à présenter un projet alternatif à la droite qui gouverne, mais également à la gauche ralliée au libéralisme. (Rouge n 2235 ‑ 17/01/2008)

"Ces élections seront donc bien l’occasion de rassembler et de construire une force anticapitaliste pour défendre la transformation révolutionnaire de la société autour de mesures concrètes signifiant que nos vies valent plus que leur profit" (Rouge n 2235‑17/01/2008)

" Multipliées à travers la France, et regroupant bien au-delà de la LCR, ces listes pourraient faire surgir de leur engagement commun l’espoir et le projet d’un nouveau parti anticapitaliste, indépendant des institutions et de la gauche de renoncement, un parti pour un chanqement radical de société" (Lettre aux sympathisant/tes de la LCR, avec invitation à une réunion le 18/01/2008 à Metz)

"Une liste pour redonner l’espoir. Si des centaines de listes sur les bases définies ci-dessus sont présentes nationalement et rencontrent un succès, cela redonnera l’espoir pour les luttes du monde du travail. La LCR et Olivier Besancenot appellent à la construction d’un nouveau parti anticapitaliste, indépendant des institutions et de la gauche de renoncement. L a participation à ces listes n’est pas un engagement à construire ce parti. Mais un succès de ces listes renforcerait la possibilité d’engager un tel projet" (Tract LCR, Montreuil ‑ avec invitation réunion publique ‑ 18/02/2008)

"Nous voulons, au-delà de ces municipales, construire ce nouveau parti an ticapitaliste dont nous avons tant besoin. A ces élections, on peut se regrouper, défendre à l’échelle locale, la même logique qu’OB a défendue lors de l’élection présidentielle. Et dans le cadre des listes, on peut agir, débattre ensemble "(Brochure Municipales 2008)

"Nos listes seront, aussi, un point d’appui pour que naisse, enfin, la force anticapitaliste dont le monde du travail a tant besoin "(Brochure Municipales 2008)

Comme on le voit, nous associer à vos listes serait ipso facto laisser entendre que nous nous associons à la construction du parti que vous envisagez. Or, nous l’avons dit, si nous voyons votre tentative d’un oeil sympathique, nous ne sommes pas d’accord avec les bases sur lesquelles vous voulez la mener. En effet, vous ne parlez plus d’un parti révolutionnaire, d’un parti qui milite pour une révolution sociale, vous parlez de “révolutionner la société". Vous direz peut‑être que nous coupons les cheveux en quatre mais, si vous choisissez systématiquement une telle formule, ce n’est pas sans raison et c’est sans doute pour pouvoir associer des gens qui ne veulent pas se dire révolutionnaires. Vous le voulez "anticapitaliste". Mais est-ce la même chose que dire que vous voulez supprimer le capitalisme en supprimant la propriété privée de toutes les puissances et les forces économiques ? Ce parti se donnera‑t‑il pour but d’exproprier les grands moyens de production pour qu’ils soient gérés par la collectivité, et non réglés par le marché et la loi du profit ? Vous pouvez dire que c’est sous‑entendu par l’anticapitalisme, mais pourquoi ne pas dire expressément que vous voulez associer à un tel but ceux qui construiront ce parti ? Et puis, vous accueillerez favorablement des militants, certes dévoués, se réclamant de l’anarchisme, ce qui veut qu’avec une telle composition, ce parti fera l’impasse sur les enseignements de Karl Marx. De la même façon, vous tournez le dos à Lénine et, lorsque vous dites qu’il est inutile, voire nuisible, de se revendiquer du trotskysme sous prétexte que cela est dépassé et n’attire personne, vous ne renoncez pas seulement à vous réclamer d’un nom, vous renoncez aussi à toutes les analyses, à toutes les positions que Trotsky ct pu faire et prendre entre 1924 et 1940. Vous écrivez que nous ne désirions pas, en 1995, "vouloir construire un parti trotskyste", mais nous ne disions pas vouloir remettre en question l’héritage de Trotsky. Vous nous écrivez "que le contenu actuel, pratique, de cette référence mériterait d’être précisé". Certes, on peut et on doit tout discuter et rediscuter en permanence, mais nous, qui le faisons, nous considérons que, sans l’héritage politique de Marx, Lénine et Trotsky, on ne saurait construire un parti révolutionnaire. Oublier Trotsky, cela veut dire abandonner la défense de la révolution russe, la seule révolution prolétarienne de l’histoire. En effet, cela revient au moins par le silence, à assimiler la révolution bolchévique au stalinisme qui lui a succédé. En effet, c’est Trotsky qui a fait l’analyse et la critique du stalinisme, en démontrant qu’il y avait une différence fondamentale entre la révolution bolchévique et le stalinisme et en défendant les transformations sociales de la révolution de 1917 et leur rôle positif au moins jusqu’à sa mort. Mais nombreux sont ceux qui, formés par l’enseignement de Trotsky, ont pu, bien après sa mort, se retrouver dans le monde d’après guerre et sans confondre la révolution chinoise de 1949 avec une révolution prolétarienne, les Démocraties populaires avec des Etats ouvriers même déformés, alors qu’ils n’étaient que des Etats bourgeois déformés par la pression militaire et économique de l’Union soviétique et n’avaient rien, rien du tout, de prolétariens. Renoncer à l’enseignement de Trotsky et à son héritage, c’est aussi renoncer à tout ce qu’il a écrit sur la politique de la IIIe Internationale, face à la révolution chinoise de 1927 et à la politique "frontiste" qui a abouti au massacre de la plupart des militants communistes chinois. C’est encore renoncer à la critique qu’il a faite de l’attitude de la IIIe Internationale dans les événements d’Espagne ou de France en 1936. Pour notre part, nous considérons que des militants qui ignoreraient cet héritage en appartenant à un parti refusant de le maintenir vivant, même si beaucoup de gens ont oublié qui était Trotsky, ne pourraient pas être des militants qui garderaient une boussole de classe dans une tourmente révolutionnaire, qui ne pourraient pas y intervenir utilement et qui seraient loin de pouvoir "révolutionner" la société, comme vous dites. C’est pourquoi, entre autres, nous ne pouvons nous associer à la construction d’un parti sur les bases que vous proposez. Cela ne nous empêche cependant pas de regarder votre tentative avec sympathie. Vous dites que vous voulez offrir une solution politique pour tous ceux que vous appelez, depuis des années, des "orphelins de parti" c’est-à-dire que vous voulez construire en quelque sorte "une arche de O.B.", armée momentanément pour la pêche aux voix mais destinée à l’avenir à recueillir des échantillons de toutes les espèces vivant "à gauche de la gauche". Constituer des listes avec vous serait, vous le dites et vous le répétez, une participation à votre tentative de construction de votre nouveau parti. Et nous ne le voulons pas. Vous nous reprochez d’accepter de participer, dès le premier tour des municipales, à des listes composées par le PC, ou le PC et le PS. Vous nous opposez une politique qui, cependant, nous fait quelque peu sourire puisque ces accords que vous refusez au premier tour, vous êtes prêts à les accepter au second, si vous dépassez les 5 %, sous prétexte que ce seraient, au second tour, des "accords techniques" A notre avis, il s’agit là d’une pirouette sémantique dont aucun bateleur de foire ne pourrait vivre. En quoi ces accords seraient‑ils plus techniques au second tour qu’au premier, et en quoi seraient‑ils plus justifiés ? Nous avouons ne pas comprendre cette rhétorique. Il est vrai que nous devrions en avoir l’habitude puisque vous niez encore farouchement avoir appelé en 2002 à voter pour Chirac et son ombre Sarkozy, et afirmez n’avoir appelé qu’à voter contre Le Pen. Bien sûr, cela fait bien sur le papier, mais comment est-ce possible, pratiquement, dans l’isoloir ? Et si vos listes n’obtiennent pas les 5 % nécessaires pour fusionner avec des listes de la gauche, appellerez-vous au second tour les électeurs de gauche à s’abstenir ou à voter, sans condition ni politique ni technique, pour la gauche ? Y compris pour ce PS que vous vouez aux gémonies ? On pourrait d’ailleurs élargir le problème à toutes les communes où vous ne présenterez pas de liste. Y appellerez‑vous, ou pas, à l’abstention ou à voter pour la gauche ? Alors, à quoi bon toutes ces circonlocutions pour justifier vos positions et critiquer les nôtres ? Si nous étions opportunistes, comme vous l’affirmez, vous le seriez au moins autant que nous, l’hypocrisie en plus. A propos du PS, nous ne comprenons pas non plus le changement que vous semblez découvrir dans sa nature avec, par exemple, des formules comme “l’intégration toujours plus grande du PS à lapolitique libérale de la bourgeosie" Est‑ce qu’il y a trente ans, lorsque Mitterrand avait annexé le PS, ce parti n’était‑il pas déjà largement intégré à la défense des intérêts de la bourgeoisie ? Et nous ne remonterons pas jusqu’à Guy Mollet ou Jules Moch ! Vous nous reprochez d’accepter de participer à la gestion de municipalités, ce qui n’est pas le cas. Mais vous dites qu’à "certaines conditions" vous pourriez participer à un gouvernement. Pas nous ! Voilà, camarades, ce que nous pouvons vous répondre sur les points que vous soulevez. Fraternellement,

Pour Lutte Ouvrière,

Georges KALDY Jean‑Pierre VIAL François DUBURG

Réponse de la LCR à LO

Montreuil, le 22 février 2008

Cher(e)s camarades,

Sans doute ne manquerez-vous pas de vous étonner d’une réponse aussi rapide de notre part à votre courrier du 14 février mais votre orientation politique sur la question des municipales, la crise politique, les luttes actuelles nous semblent justifier une réelle discussion entre nos deux organisations. Les enjeux sont d’importance. Notre lettre précédente n’avait pas d’autre objectif que de vous rappeler notre disponibilité pour constituer, avec vous, des listes unitaires, ouvertes, pour les municipales. Vous confirmez votre refus déjà confirmé dans les faits, et par vos nouvelles alliances, en invoquant un seul et unique argument : « nous ne voulons ni participer ni paraître associés à la construction du parti que vous envisagez ni cautionner les bases sur lesquelles vous voulez le construire ». Vous consacrez deux pages à des citations pour prouver que nous associons « la construction » de nos listes et notre « campagne avec le projet de construction de ce parti ». Nul besoin de faire tant de citations, nous en convenons. Bien évidemment, la LCR défend son orientation y compris pendant la campagne des municipales. Est-ce à dire que nos partenaires, car plus de la moitié de nos listes sont des listes unitaires, cautionnent, approuvent ou appuient la démarche définie dans les thèses de notre congrès ? Non, bien évidemment. Nous avons toujours expliqué que nous ne faisions pas de la question du nouveau parti une condition pour des listes unitaires. Par contre, nos partenaires ne nous demandent pas de taire nos positions. Nous avons fait accord aux municipales sur la base d’une plate-forme politique dans le respect des divergences. C’est un débat ouvert, public. Si vous aviez fait des listes unitaires avec nous, vous auriez eu la pleine liberté et possibilité, est-il besoin de le dire, de défendre la conception du parti qui est la vôtre. L’unité entre nous, une unité ouverte sur les autres courants politiques locaux et nationaux, se situant en rupture et en totale indépendance avec le parti socialiste et la politique d’union de la gauche, ne vous aurait nullement associés à une orientation que vous ne partagez pas, à condition bien sûr que vous acceptiez le débat démocratique et public. Nous pouvions unir nos forces dans le respect des différences. A notre sens, votre participation à des listes d’union de la gauche dans le cadre d’un front électoral va à l’encontre des nécessités et possibilités du moment. Pour ne pas « cautionner » notre politique vous préférez « cautionner » celle du PS ou du PC ! D’ailleurs, dans les trop rares cas où vous avez fait des listes avec nous, pensez-vous avoir plus servi de point d’appui à notre orientation qu’à la vôtre ? Avec le PC, comme à Vigneux, ou avec des militants du PC, comme à Alfortville, ces listes sont-elles uniquement « un point d’appui pour que naisse, enfin, la force anticapitaliste dont le monde du travail a tant besoin » pour reprendre une des citations que vous faites ? Vous ont-elles empêché de défendre votre propre orientation ? Comment ne pas évoquer le sectarisme à propos de votre attitude quand on lit vos arguments qui définissent nos divergences sur la question du parti. « Vous ne renoncez pas seulement à vous réclamer d’un nom, vous renoncez aussi à toutes les analyses, à toutes les positions que Trotski a pu faire et prendre entre 1924 et 1940 », écrivez vous après nous avoir reproché de renoncer aussi à Marx, Lénine…Votre profession de foi d’orthodoxie a quelque chose de dérisoire quand on sait toutes les interprétations voire les caricatures auxquelles la pensée des révolutionnaires a donné lieu. Non seulement nous ne renonçons à rien mais nous avons même l’ambition de repenser l’ensemble des acquis du mouvement ouvrier et révolutionnaire à la lumière de nos tâches nouvelles, de l’évolution du capitalisme, des luttes de classes. Vous le dites vous mêmes, le trotskisme a donné lieu à bien des interprétations. Peut-être serait-il d’ailleurs utile de relire la critique de Trostky des fronts électoraux avec les réformistes ce qui sûrement nourrirait votre réflexion sur vos alliances avec un parti qui a renoncé à être réformiste, ou plutôt qui est devenu un parti des réformes libérales. Revenant sur vos divergences avec nous à propos du parti, Arlette Laguiller déclarait sur France 2, après s’être félicitée des 60 listes d’union de la gauche auxquelles vous participez : « A mon avis ce sera un parti réformiste radical qui pourra sans doute jouer un rôle. Tant mieux et je regarde ça avec sympathie mais ce n’est pas le type de parti que l’on veut construire". C’est une opinion mais qui n’est guère conforme à ce que notre congrès a décidé. Vu le nombre de citations que vous faites de nos propres textes, vous n’êtes pas sans avoir lu l’adresse adoptée très largement par notre congrès. Mais peut-être vous a-t-elle échappé ? Il y est dit clairement : « Nous sommes nombreuses et nombreux à vouloir cet outil : un parti utile aux mobilisations d’aujourd’hui. Un parti pour préparer un changement radical, révolutionnaire de la société c’est-à-dire la fin du capitalisme, de la propriété privée des principaux moyens de production, du pillage de la planète et de la destruction de la nature ». Bien sûr, ce ne sont que des écrits qui, par eux-mêmes, ne peuvent suffire... Certes, mais, camarades, cette polémique publique qui caricature notre politique n’est pas très... sympathique ? Et comment ne pas évoquer l’opportunisme quand on lit vos arguments pour justifier que vous militiez pour des listes d’union de la gauche. « Vous nous reprochez, écrivez-vous, d’accepter de participer, dès le premier tour des municipales, à des listes composées par le PC, ou le PC et le PS ».La question n’est pas que vous acceptiez mais que vous militiez pour des listes d’union de la gauche en regrettant la division, que vous repreniez à votre compte la politique du PC regrettant les divisions de la gauche institutionnelle et gouvernementale. Cette politique vous conduit, parfois, à voter le budget ce que jusqu’alors vous ne faisiez pas. Et il semble que, dans bien des cas, vous souteniez le candidat du PC aux cantonales. Nous ne pouvons que nous étonner que vous ne compreniez pas la différence entre militer pour des listes d’union de la gauche au premier tour et envisager des « accords techniques » au second tour, ou d’envisager d’appeler à voter, toujours au deuxième tour, pour des listes de gauche contre la droite. Nous ne vous accuserons pas « d’hypocrisie », nous vous laissons cet étrange plaisir qui consiste à déplacer le débat politique sur le terrain de la morale, mais pour le moins d’aveuglement. Ce que nous vous reprochons, et surtout que nous regrettons, c’est que vous ayez fait le choix de soutenir une politique qui n’est pas la vôtre, qui n’est pas celle des travailleurs pour, parallèlement, diviser notre camp. Par delà les raisonnements des uns et des autres, il y a les faits politiques, qui, comme chacun sait, sont têtus. Vous tentez de banaliser votre virage politique, alors que vos nouveaux partenaires eux-mêmes en notent l’importance. Pour notre part, il nous inquiète. Ce que vous présentiez au début comme simplement tactique est devenu un axe politique, militer pour des listes d’union de la gauche. Il nous faudra poursuivre la discussion, confronter nos politiques, nos analyses, faire les bilans à l’issue de cette importante séquence que représentent les élections municipales. Cela pourrait être l’occasion d’une nouvelle rencontre. C’est la proposition, qu’en conclusion, nous vous faisons.

Avec nos salutations révolutionnaires

Le bureau politique de la LCR

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